Post Numéro: 8 de Tom 25 Aoû 2008, 14:04
Oui, tout à fait d'accord, je n'ai pas voulu dire que la Résistance n'avait pas existé (!) et ce, sous différentes formes, dont les aspects civils, pour être moins connus, n'étaient pas les moindres...
D'ailleurs, les Allemands ne s'y trompaient pas. Comme l'écrit F.-G. Dreyfus dans son Histoire de la Résistance (de Fallois, 1996) :
Au reste, les Allemands [avant le débarquement des Alliés] se sentent-ils vraiment concernés par les maquis ou par les sabotages ? Si certaines voies ferrées comme [...] Limoges-Clermont, Clermont-Neussargues fonctionnent mal, [...] jusqu'à début mai 1944, les trains civils n'ont guère de retard. [...] Lutter contre les réseaux leur paraît beaucoup plus important [...]. Alors ici, la répression est terrible : la Résistance a perdu infiniment plus de monde du 1er janvier au 30 juin 1944 que durant toute l'année 1943...
Si la Résistance a joué un rôle majeur au niveau national sur les plans politique et psychologique, militairement, dans le contexte général, elle n'a eu qu'une action marginale. Il y a à cela plusieurs raisons. Les mouvements de zone sud ne font, jusqu'au printemps 1944, que de la propagande [...]. Même si cela est dangereux, les actions des groupes francs [...][n'ont] qu'un effet mineur [...]. [...] En zone nord, la situation est totalement différente, mais, comme c'est infiniment plus dangereux, les mouvements sont beaucoup moins structurés [...]. En dehors de quelques sabotages sérieux, [...] l'activité militaire essentielle, c'est le renseignement. [...] Le Sud-Ouest de la France a été libéré parce que l'armée allemande [à la suite des débarquements alliés] l'a évacué [...] avec un minimum de pertes.
L'historien E. Jäckel, dans La France dans l'Europe de Hitler (Fayard, 1968), rapporte, page 466, que le commandant en chef allemand à l'Ouest, le maréchal von Rundsedt, signale qu'après le débarquement allié en Normandie, les sabotages et les actions de la Résistance ont augmenté, mais pas dans la proportion à laquelle il s'y attendait et pas de manière vraiment gênante. Il ajoute à la même page 466 : De fait, nulle part, ni la Résistance ni les maquis n'ont eu d'action décisive sur l'issue de la guerre et les soucis qu'ils ont causés aux dirigeants du Reich devaient leur sembler bien secondaires comparés à la situation sur le front du débarquement.
Pour ce qui est du Limousin (Corrèze, Creuse, Haute-Vienne), il faut savoir que, d'après le KTB (journal de guerre n° 3 du 1er janvier au 13 septembre 1944) du Hauptverbindungsstab (Etat-major principal de liaison) 588 à Clermont-Ferrand, dont dépendait la plus grande partie du Massif central, pour couvrir l'Indre, la Haute-Vienne, la Creuse, l'Allier (avec Vichy), la Dordogne, la Corrèze, le Puy-de-Dôme, le Cantal, la Haute-Loire, les parties de zone sud de l'Indre-et-Loire, du Cher et de la Charente, soit plus de 65 000 km2 (plus que la Belgique et la Hollande réunies, mais avec seulement quelque 2,5 millions d'habitants), les Allemands ne disposaient pas de plus de 5000 hommes dont les principales unités consistaient en un régiment de sécurité et un bataillon de Georgiens peu sûrs...
Certes, il y avait les forces de l'ordre de Vichy (le M.O. : gardes mobiles, GMR, francs-gardes de la Milice), mais que font-elles lorsque les maquisards attaquent, par exemple, la garnison allemande (deux compagnies de sécurité et quelques Feldgendarmes) de Tulle le 7 juin 1944 ? Certains gardes mobiles se joignent aux résistants, les autres se rendent ou fichent le camp...
Cela dit, selon la préfecture régionale de Limoges (Archives départementales de la Haute-Vienne, 185 W1 44), les sabotages et attentats ont augmenté de juillet 1943 à juin 1944 :
- pour la Haute-Vienne : de 14 (dont 4 ferroviaires) à 219 (dont 50 ferroviaires) ;
- pour la Creuse : de 4 (dont 3 ferroviaires) à 152 (dont 16 ferroviaires) ;
- pour la Corrèze : de 50 (dont 15 ferroviaires) à 181 (dont 18 ferroviaires) ;
- pour la Dordogne : de 4 à 265 (dont 20 ferroviaires) ;
- pour l'Indre : de 3 (dont 2 ferroviaires) à 25 (dont 14 ferroviaires)...
Bien sûr, la plupart des sabotages ferroviaires, par exemple, n'interrompent le trafic que pour un temps relativement court et beaucoup ont lieu sur des voies secondaires, mais ils ont considérablement augmenté et entraînent, entre autres, l'intervention d'éléments de la division SS Das Reich...