Post Numéro: 28 de Tom 10 Aoû 2007, 11:23
Sur l’affaire de Tulle : Jäckel (op. cit.), p. 460/461 :
La SS-Panzer-Division [Das Reich] reçut l’ordre de se porter immédiatement dans la région de Tulle et de Limoges. Un élément d’avant-garde fut envoyé à Tulle, chef-lieu de la Corrèze, dont la garnison allemande avait signalé qu’elle était menacée par de fortes bandes. De fait, la ville avait été également attaquée, dans la matinée du 7 juin [1944], probablement par un groupe de F.T.P. (Francs-tireurs et partisans, d’obédience communiste). […]
Il n’y avait, à Tulle, avec quelques Feldgendarmes, que deux compagnies [d'une centaine d'hommes] du 95e régiment [de sécurité] - la 8e était installée dans une école et la 13e était dans une caserne. En outre, la ville abritait six cents hommes de la Garde mobile française. Ces derniers, lorsque les partisans attaquèrent, se joignirent à eux ou se rendirent. La ville passa donc aux mains des résistants.
Comme pour Guéret, une compagnie [du 95e régiment] fut aussitôt envoyée en soutien à Tulle, mais voie ferrée et route étaient minées ; aussi l’unité resta-t-elle à Ussel, qui semblait d’ailleurs également menacé.
Le 8 juin au matin, les partisans attaquèrent les bâtiments de l’Ecole normale, dans lesquels un groupe d’Allemands s’était retranché […]. Le combat dura jusqu’à la fin de l’après-midi. Une fois l’école en flammes, les défenseurs, contraints de tenter une sortie, furent « impitoyablement fauchés », ainsi que le note le journal de marche [KTB/588].
Le préfet réussit à empêcher les partisans de fusiller vingt blessés transportés à l’hôpital, mais, selon le récit de plusieurs témoins oculaires, les cadavres de soldats allemands furent profanés : on en retrouva par la suite qui avaient le crâne défoncé, les yeux crevés et portaient les traces d’autres sévices. S’agissait-il, dans tous les cas, de profanation de cadavres ou bien aussi de mauvais traitements infligés à des soldats vivants et blessés ? Impossible d’en décider, non plus que de l’exactitude de ces renseignements [voir note en bas de page].
[…] les partisans s’attaquèrent le soir même à l’autre compagnie, dans la caserne. Les combats cessèrent pourtant lorsque l’élément avancé de la SS-Panzer-Division [Das Reich] fit son entrée dans la ville dont il ne tarda pas à prendre possession.
Les pertes allemandes étaient sensibles. Le Feldgendarmerie-Trupp 1115, qui avait quatre morts et cinq blessés, était complètement anéanti. Dans les deux compagnies [du 95e régiment de sécurité], on comptait trente-trois tués, vingt blessés, trente-cinq disparus. Le compte rendu d’opérations évalue à sept cent cinquante les pertes françaises, mais l’expérience prouve que, dans la guérilla, les pertes de l’adversaire sont généralement exagérées.
Le lendemain matin, 9 juin, le général commandant les troupes allemandes faisait connaître à la population de Tulle par voie d’affiche : « Citoyens de Tulle ! 40 soldats allemands ont été assassinés de la façon la plus abominable par des bandes communistes… 120 maquisards et leurs complices seront pendus. Leurs corps seront jetés dans le fleuve. »
De fait, dans l’après-midi, [99] hommes étaient pendus aux balcons et aux réverbères de la rue principale.
Sources :
- KTB/588, p. 12 à 54 (Kriegstagebuch, journal de guerre du Hauptverbindungsstab, état-major principal de liaison de Clermont-Ferrand dirigé par le général von Brodowski qui disposait au maximum de cinq mille hommes pour assurer la sécurité d’un territoire de 65 000 km2 et 2,5 millions d’habitants) ;
- Texte de l’affiche in Hans Luther, Der französische Widerstand (op. cit.), p. 249 ;
- Note de protestation du gouvernement français au général allemand à Vichy le 24 juillet 1944, F-613, IMT, vol. XXXVII, p. 335 et suiv. ;
- Récit du préfet d’alors Pierre Trouillé, Journal d’un préfet pendant l’Occupation (1964) ;
- Témoignages oculaires sur les exécutions in Robert Aron, Histoire de Vichy (1954).
N.B. Mais l’événement n’a pas été complètement tiré au clair, même par les procès venus après la guerre devant le tribunal militaire de Bordeaux (cf. Luther, p. 76 et suiv.).
Notre exposé se limite aux points sur lesquels les sources ne se contredisent pas.
La question des sévices contre les soldats allemands est particulièrement controversée (cf. Trouillé, p. 155 et suiv.).
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Tom le 11 Aoû 2007, 09:55, édité 1 fois.