Bonjour à tous
Je vous livre ici un récit écrit par mon père à l'ocasion du 60ème anniversaire de cet événement.
Le 22 novembre 1942 les actes de résistances étaient encore rares. Un parachutage n'était pas courrant.
Contrairement aux actions du SOE il s'agit la d'un parachutage sans accompagnement d'agent. Et pour cause, le SOE n'est pas à l'origine de celui-ci.
Cette livraison trouve son origine via le Colonel "REMY" qui à obtenu l'accord du Général pour livrer aux "Font national de la résistance (PC) des moyens de communications.
Le morvan à été retenu comme point de largage pour sa proximité de PARIS, son isolement et les noyaux déjà actifs de résistants. Cette action à été pilotée par le BRCA
"Texte du Commandant Jean Longhi dit GRANDJEAN "Délégué département du service Maquis" pour la Nièvre
Chaque soir on entendait la radio anglaise égrener des phrases étranges dont seuls quelques initiés connaissaient le sens.
Pour nous ce serait “Célestin ira déjeuner ce soir chez Anastasie” qui nous indiquerait la nuit du parachutage..
Plusieurs soirs de suite, attentifs aux “messages personnels” nous entendions “Célestin ira dîner chez Anastasie” sans que l’opération ait lieu.
Quand, le soir du 22 novembre, le mot “dîner” fut remplacé par “déjeuner”, c’était le signal attendu pour que l’opération ait lieu le soi-même En effet, cette fois la 3ème lettre du 3ème mot était un “J” et c’était le code convenu pour déterminer le jour “J” tant attendu.!
Nos coeurs se mirent à battre très fort L’équipe était prête et nous connaissions le chemin qui nous conduirait au terrain à 9 heures du soir.
Par discrétion, la marche fut silencieuse surtout en traversant les petits hameaux disséminés sur le trajet.
Il gelait à pierre fendre, le sol était dur et nous marchions sur les parties herbeuses pour atténuer le bruit de nos grosses chaussures.
Nous étions cinq: Toinou l’aîné, peut-être un peu vieux pour une telle opération mais nous écoutions ses conseils avec attention.
Venait ensuite Bob qui sera chargé de mener le poste à Paris, puis Luc qui pris le prénom de Camille plus tard et moi qu’on appelait Lionel à Quarré avant que je devienne “Grandjean”..
Chevau le brigadier forestier nous attendait sur place. Il avait apporté des outils, pioches et pelles pour creuser le trou où nous cacherions les parachutes et le matériel restant après nos prélèvements personnels.
Alors commença pour nous une longue attente. Le froid nous saisissait nous engourdissait malgré nos petits sautillements, nos allées et venues sur le terrain, en bordure du bois.
Dix heures puis onze et nos oreilles affutées n’entendaient aucun bruit de moteur et le ciel, pur en cette nuit de pleine lune, était désespérément vide.
Des doutes m’assaillaient:: allait-il venir? Ne serait-il pas arrêté, abattu par la “Flack” allemande très dense sur tout le trajet ?
Trouvera-t-il le terrain avec les indications sommaires que nous avons données ?
Et si les Boches, renseignés, nous tombaient dessus ?
Dans quelle aventure nous étions nous fourrés alors que tant de gens se pelotonnaient tranquillement au creux d’un lit bien chaud !
Le froid allait nous mettre hors service, aussi le Brigadier alluma un feu tout près de la haie et nous sommes venus réchauffer nos mains, nos corps et aussi nos coeurs car nous avions rompu le silence écrasant et retrouvé la présence des autres, sans doute en proie aux mêmes incertitudes.
Les aiguilles de nos montres se serraient au chaud des chiffres romains de minuit et déjà nous pensions l’opération avortée !
Puis, un murmure lointain nous fit dresser l’oreille et retenir nos souffles. Il s’amplifiait levant nos doutes. Vite le feu fut éteint et couvert. Jamais bruit d’avion ne fut aussi agréable. Enfin l’espoir revenait et à grande allure.
Puis, à nouveau, le doute et encore la peur : et si c’était un appareil allemand ? Fallait-il mettre le balisage en place et faire le signal en morse avec ma lampe, point-trait la lettre “a” ti tâ chantions nous à l’instruction pour apprendre le morse. .
Le quadrimoteur semble grossir et le vacarme devenir épouvantable. Il va réveiller tout le monde à 20 kilomètres à la ronde ....
C’est bien lui et je fais la lettre convenue. Un deuxième passage et son feu de bord m’envoie un “n”, trait point; tâ ti, alors la joie éclate : ça y est, c’est vraiment lui, vite aux balises !
Trois lampes électriques allumées tracent au sol, un triangle isocèle qui dessine une flèche indiquant le sens du vent au sol
Pour la 3ème fois le quadrimoteur repasse mais il s’est placé contre le vent pour que la chute des parachutes soit freinée au maximum et l’impact se fasse sur le terrain et non dans les bois au loin.
Il largue sa cargaison.
De gros cylindres noirs suspendus aux corolles des parachutes descendent lentement, presque majestueusement. Le spectacle qui nous est offert pour la première fois est extraordinaire !
Cette fois l’avion passe au-dessus de nous pour la dernière fois et les feux de position clignotent pour nous dire “au-revoir et bonne chance”.