dynamo a écrit:j'ai lu et relu les trois tomes de Gamelin "servir" et je ne vois pas ce qu'on peut lui reprocher dans les conditions dans lesquelles est la France en 1939.
Quelle autre option que sa manœuvre Dyle-Bréda ?
La manœuvre Dyle permet de recueillir une armée belge de valeur, combattant sur son sol, permettant de s'appuyer sur des positions fortifiées bien implantées.
On peut éventuellement reprocher la variante Breda qui envoie la VII e armée française à l'aventure dans les polders hollandais, privant au passage le GQG d'une réserve qui aurait pu contre attaquer ( ou ralentir) les Pzd qui avaient percé dans les Ardennes.
Je n'ai jamais pris le temps de lire GAMELIN, 1940 n'étant pas ma tasse de thé en dehors de la Campagne des 18 jours sur laquelle mon grand-père est toujours restée très amer.
Si on parle un peu plus stratégie et un peu moins GAMELIN, la manœuvre Dyle respecte de nombreux principes :
. la manœuvre (non l'armée française ne s'enterre pas au premier coup de canon, le 10 mai 1940 elle lance une vaste manœuvre avec toute son aile gauche, ses meilleures troupes) ;
. l'appui sur une droite solide derrière une position fortifiée imprenable (c'est à ça que sert une position fortifiée, libérer des ressources pour contrer l'attaquant) ;
. une aile marchante à travers l'espace le plus approprié à une guerre de mouvement : des Flandes aux Pays-Bas ; précisément là où il faut s'attendre à voir apparaître l'ennemi ;
. l'anticipation d'une bataille de coalition avec la BEF et les armées belge (merci à Patrick d'en reconnaître la valeur) et néerlandaise.
On peut chipoter sur la variante Bréda qui prive les Français d'une réserve mobile à engager sur la Meuse. Mais on ne peut réfléchir comme cela que si l'on connait la fin de l'histoire.
Outre le fait qu'elle lie l'armée néerlandaise à l'ensemble du dispositif, la variante Bréda offre l'avantage qu'elle tente de priver les Allemands du littoral hollandais. Délibérément pour éviter une pression sur les îles britanniques ?
Digression : cette manœuvre ne vous rappelle rien ? Il ne s'agit rien d'autre que du plan allié de l'été 1944 après la percée en Normandie. L'aile marchante est aussi l'aile gauche (le
21st Army Groupe) montant jusqu'aux Pays-Bas pour trouver la percée sur le Rhin inférieur et se rabattre sur la Rhur ; l'aile droite (la
3rd US Army) finissant par fixer la masse de manœuvre allemande en Lorraine.
Une question à ceux qui ont lu GAMELIN : en déployant son principal corps de bataille en moyenne Belgique et en Hollande, vise-t-il une contre-attaque sur la Rhur ??
Mais j'en reviens à 1939. Jusqu'au 30 janvier 1940, la manœuvre Dyle et sa variante Bréda répondent parfaitement au plan allemand qui est effectivement de passer par la Belgique avec la majorité des
Panzer-Divisionen.
On ne peut donc rien reprocher à GAMELIN. Il est sur la même longueur d'onde que les planificateurs allemands. Si HITLER attaque à l'Ouest en 1939, la bataille de rencontre se déroule comme GAMELIN l'a imaginée. Quel sens de l'anticipation
dynamo a écrit:Je suis vraiment curieux de connaître quelles dispositions il eut fallu prendre par les éminents stratèges critiques ressassant ad nauseam l'esprit de 14-18.
Pas la peine de nous resservir l'avertissement de Taittinger, la saillie de Pétain " on les pincera à la sortie des forêts", la non prolongation de la ligne Maginot jusqu'à Dunkerque et autres sentences assenées depuis des dizaines d' années .
On veut de la critique stratégique (pas à l'échelon tactique) du dispositif imaginé par Gamelin.
Il faut aussi se pencher sur le plan belge (dans les grandes lignes) qui se déroule en 3 actes :
1. abandon de l'Ardenne en y ayant semé préalablement obstacles et destructions pour rendre le massif encore moins franchissable ;
2. repli derrière la Meuse (Liège/Namur) et le canal Albert (Liège/Anvers) le temps de l'exécution de la manœuvre Dyle ;
3. au pire, replis sur la ligne principale de défense Anvers/Wavre.
Comme les autres, les stratèges belges ont tiré les leçons d'août 1914 et prévu une planification phasée en vue d'une défense commune contre une agression allemande.
Le passionné de bataille des Ardennes que je suis s'est toujours posé la question suivante :
si les Chasseurs ardennais tiennent le massif ardennais (leur microcosme comme les Alpes le sont aux chasseurs alpins), le corps de bataille allemand vient s'enliser dans nos belles forêts… ...comme en 44. Dans les faits, là où les Chasseurs ardennais défendront les obstacles ils démontreront la faiblesse de colonnes mécanisées bloquées en forêt. Sachant que des éléments français remontent d'ouest en est à travers l'Ardenne, ces forces légères auraient pu se combiner activement pour entraver la manœuvre fatale.
Au lendemain de la remilitarisation de la Rhénanie, le choix politique du gouvernement belge de s'enfermer dans la neutralité n'est pas sans conséquences sur le dispositif allié du 10 mai 1940.
Enfin, les manœuvres alliées du 10 au 14 mai 1940 favorisent bien involontairement et à l'envie le plan allemand !
Alors que l'aile gauche marche vers le nord en étirant le front à l'excès, le centre se replie derrière la Meuse, ouvrant la voie aux Panzer. Après, la course contre la montre est gagnée par les Panzer aidés par une Luftwaffe maîtresse du ciel des Flandres. Une fois lancé, le mouvement est difficile à arrêter avec les moyens et doctrines alliées de l'époque…
Quels sont les autres avis ?