Tomcat a écrit:j'ai une question pour les spécialistes de l'artillerie navale:
Quelles sont les capacités de percement de blindage (en épaisseur) en fonction des différents calibres (du 150mm au 406mm par ex...) ?
En fonction du type d'obus utilisé, de la charge propulsive, de la distance, de l'angle (final) d'attaque du pélôt ?
Les canon de 15 cm et les calibres légèrement inférieurs étaient conçus, pour opérer (efficacement) jusqu'à 10 000 m (au plus), sur un cuirassement vertical (trajectoire quasi-horizontale) ... cuirassés, croiseurs de bataille, croiseurs lourds.
La protection cuirassée horizontale des croiseurs, dits "protégés" était sensée les protéger des tirs à trajectoire "parabolique" des calibres de l'ordre de 15 cm. Au-delà, 203 mm ou plus, leur cuirasse "horizontale" avait , à peu près, les performances d'une gaufrette dessechée!
Les cuirassés associaient cuirasse horizontale, pour parer aux tirs de gros calibres "plongeants" (semi-parabolique, en fin de trajectoire) à plus de 15 000 m, et verticale, face aux mêmes, en tir tendu, à moins de 10 000 m.
Le problème a, toujours, été qu'un bâtiment entièrement cuirassé, aussi bien horizontalement que verticalement, débouchait sur une monstruosité technique, d'une masse ingérable! Le poids du cuirassement influait, directement, sur la puissance de la machinerie et les performances de vitesses étaient, elles, toutes-aussi, dépendantes du rapport, longueur, largeur, tirant d'eau et déplacement (exprimés en tonnes). Bref, une équation insoluble
, qui avait abouti à la solution "tout ou rien", initiée par toutes les grandes marines de guerre, dans les toutes dernières décennies du XIXème siècle. On protège, au maximum, les zones vitales (horizontales & verticales) - machinerie, tourelles, blockhaus - et on oublie le reste, pour limiter l'excès de poids!
Là, on se rend compte que, hormis quelques classes de croiseurs-cuirassés ou de croiseurs lourds (allemands), avant 1914, les croiseurs "protégés" n'avaient pas intérêt à se retrouver dans le rayon de tir des cuirassés! Cela dit, un perforant de gros calibre risquait fort de transpercer de part en part, sans exploser (réglage des fusées à impact !), à 5000/6000 m, la coque non cuirassée d'un croiseur "protégé". Donc, il ne fallait pas se louper et, sur ce genre de bâtiments, on tirait à l'obus explosif pour ravager ses superstructures. La ceinture cuirassée qui ceignait, au-dessus et en dessous de la ligne de flottaison, les cuirassés, croiseurs cuirassés, croiseurs lourds et battlecruisers était destinée à contrer les obus de gros calibre, en tir direct ou en fin de course de trajectoire tendue.
A noter que les battlecruisers britanniques avaient "révélé", à la Bataille du Jutland, au printemps 1916, que leur cuirassement général était insuffisant, car conçu, à l'origine, pour privilégier leur vitesse - là, on entre dans le domaine du développement des turbines et de leurs puissances, une technologie qui avait, alors, moins de 10 ans d'expérience et qui imposait, alors, des limites dimensionnelles & structurelles! -. A l'inverse, à bord des grands croiseurs allemands - Großkreusern -, qui n'avaient pas été conçus pour de longues croisières océaniques - l'Allemagne ayant peu de colonies -, on avait, très sérieusement, limité les espaces "vie" des équipages, au profit du cuirassement; ce qui fait que cette classe de bâtiments avaient des épaisseurs de cuirasse équivalentes, voire supérieures, selon sa mise en chantier, aux cuirassés (Battleships) britanniques!
La plupart des dispositifs de correction de visée avaient été conçus pour "anticiper" les évolutions de l'adversaire, sur la base maximale d'une vitesse de combat de 15 noeuds - ce n'était, déjà, plus le cas, au Jutland, lors de l'affrontement entre les escadres de reconnaissance d'Hipper et de Beatty, qui, en conditions de combat, avaient évolué entre 26 et 28 noeuds!
En 1918, les cuirassés, les plus récents, marchaient à 21/22 noeuds "à fond les manettes", les croiseurs lourds allemands et les battlecruisers britanniques, à 27-28 noeuds. Après la Première Guerre Mondiale, la moindre trottinette navale - torpilleur, contre torpilleur, destroyer - flirtait, allègrement, avec les 30 noeuds, de même que, dans les années 1930, les premiers cuirassés rapides (allemands, français, italiens). Là, l'artillerie navale avait du, sérieusement, revoir sa copie ! Dès lors, percer une cuirasse était une chose, mais parvenir à toucher son adversaire, une autre!