Je ne vais pas exposer les causes du sabordage de Toulon qui ont déjà été traitées ici, mais parler du sabordage proprement dit et du sort des navires sabordés.
Le 27 novembre 1942, la flotte française stationnée à Toulon se saborde.
Une simple protestation officielle du Maréchal Pétain, fut la seule réponse à l'invasion de la zone libre par les allemands, celle ci est dénommée "opération Attila", le 11 novembre 1942; l'amiral Auphan qui n'a cessé de faire secrètement la liaison entre Darlan à Alger et Vichy pour essayer de faire rentrer la France dans la guerre est démissionnaire pour marquer sa désapprobation, suite à la tournure prise par les événements, il est remplacé par l'amiral Abrial, à la tête de la marine en France métropolitaine.
Cest la Wehrmacht et non la Kriegsmarine qui est chargée de l'opération Anton, consistant à investir l'arsenal de Toulon dans le but de s'emparer des navires, cela explique la réussite du sabordage proprement dit, des soldats peu au fait des choses maritimes, n'ont rien pu faire pour s'opposer au sabordage des navires.
La surprise est totale à Toulon le matin du 27 novembre lorsque les allemands surgissent à 4 h25, l'amiral Marquis préfet maritime est cueilli dans son lit.
L'amiral de Laborde ne peut croire au manquement de parole de la part des allemands.
à 5h20, les allemands sont au Mourillon, cinq sous-marins parviennent à s'échapper: le célèbre Casabianca, le Marsouin, le Glorieux, l'Iris et la Vénus. La Vénus se sabordera en grande rade, l'Iris sera internée en Espagne et les trois autres gagneront l'Algérie et reprendront le combat aux cotes des Alliés.
L'ordre se sabordage est donné par l'amiral de Laborde, de son navire amiral, le cuirassé Strasbourg à 5h25.
Les chars allemands arriveront trop tard sur les quais pour empêcher le sabordage.
Pendant que les interprètes allemands parlementent avec les marins; les navires coulent, les pièces d'artillerie sautent, sans que les allemands ne puissent rien empêcher.
L'amiral de Laborde refuse de quitter son bord avant de savoir "pourquoi la parole du Führer n'a pas été tenue", il ne le quittera que sur l'ordre du Maréchal Pétain.
La marine française à perdu 75 unités soit 235 000 tonnes:
-3 cuirassés:
Strasbourg; Dunkerque; Provence.
-7 croiseurs:
Algérie, Colbert, Dupleix, Foch, La Marseillaise, La Galissonniere, Jean de Vienne.
-1 transport d'aviation:
Commandant Teste
-15 contre-torpilleurs:
Lynx; Guépard; Vauban; Valmy; Verdun; Aigle; Gerfaut; Vautour; Cassard; Kersaint; Tartu; Vauquelin; L'Indomptable; Mogador; Volta
-13 torpilleurs:
Bordelais;.Le Mars; La Palme; L'Adroit; Casque; Foudroyant; Le Hardi; Lansquenet; Mameluk; Siroco; Baliste; La Bayonnaise; La Poursuivante
-6 avisos:
D'Iberville; La Curieuse; L'Impétueuse; Chamois; Yser; Dédaigneuse
-14 sous-marins:
Caiman; Redoutable; Vengeur; Pascal; Fresnel; Acheron; L'Espoir; Naïade; Sirène; Galatée; Thétis; Euridice; Aurore; Diamant
-9 patrouilleurs ou dragueurs
-19 bâtiments de servitude
-1 bâtiment école
-28 remorqueurs
-4 docks de levage
Seuls 39 bâtiments, tous de petit tonnage et sans grande valeur militaire ou désarmés seront capturés dont les contre-torpilleurs Panthère; Tigre et Lion et le torpilleur Trombe, en situation de gardiennage et sans équipages; le Tigre et le Trombe seront d'ailleurs récupérés lors de la capitulation italienne en septembre 1943.
Dés l'occupation allemande de Toulon, une répartition des épaves à lieu entre les allemands et les italiens, dès janvier 1943 des tentatives de renflouement sont entreprises, visant selon les cas à essayer de remettre en service les navires les moins avariés, démolir les autres pour récupérer l'acier qui part en Allemagne, et à libérer les quais et surtout les cales sèches et les infrastructures portuaires pour pouvoir les utiliser pour leurs sous-marins.
Quelques dates de renflouement des principaux navires:
18 février 1943 croiseur Jean de Vienne
9 mars 1943 croiseur La Galissonniere
16 avril 1943 croiseur Foch
13 mai 1943 transport d'hydravions Commandant Teste
3 juillet 1943 croiseur Dupleix
11juillet 1943 cuirasse Provence
17 juillet 1943 cuirasse Strasbourg
19 aout 1943 croiseur Algérie
Les italiens s'emparent des navires presque intacts ,Panthère, Tigre, Lion et Trombe
ils emmènent le torpilleur Siroco renfloué à Gênes le 10 juin 1943 malgré les protestations du gouvernement français, ainsi que le contre torpilleur Valmy, ils envisageaient de faire la même chose avec les croiseurs Jean de Vienne et La Galissonniere, lorsque la capitulation du 9 septembre 1943 met fin à leurs prétentions sur nos navires.
Avec le départ des italiens les renflouements continuent, mais beaucoup plus lentement .
Le 19 mai 1944 un accord est passé entre les allemands et le gouvernement français sur la rétrocession de bâtiments renfloués à la France en contrepartie de la cession à l'Allemagne de l'acier prélevé sur les bâtiments irrécupérables, sont rendus entre autres: les cuirassés Dunkerque et Strasbourg, le transport d'hydravions Commandant Teste, les croiseurs La Galissonnière et Jean de Vienne, 4 contre-torpilleurs, 6 torpilleurs, 9 sous-marins, aucun de ces navires renfloués ou en cours de renflouement n'est en état de naviguer, le Dunkerque toujours dans le grand bassin Vauban n'est plus qu'une épave à moitié démolie; cette flotte sera d'ailleurs dénommée la flotte symbolique.
Les bombardements alliés sur Toulon. 12 au total entre le 24 novembre 1943 et le 19 aout 1944 vont avoir raison de cette flotte symbolique, la plupart des navires seront coulés une deuxième fois sous les bombes et seront retrouvés ainsi lors de la libération de Toulon le 27 aout 1944.
Seuls le Strasbourg et le Commandant Teste pourront être utilisés comme pontons; le Strasbourg pour des expériences d'explosions sous marines, il sera démoli en 1955 ,et le Commandant Teste comme dépôt de matériel et de pièces de rechange,condamné en 1950 et démoli en 1963.
Alain