Au cours des 12 derniers mois j'ai répété plusieurs fois que le texte de Robert Coulondre est consultable sur le forum (cf. post numéro 2365 du 13 mars 2016).
J'ai indiqué plusieurs fois le lien : http://www.39-45.org/viewtopic.php?f=17 ... start=2360
On peut également consulter le post numéro 3084 du 10 janvier 2017 qui comporte non seulement l'intégralité du texte de Coulondre mais aussi une exégèse réalisée par François Delpla.
http://www.39-45.org/viewtopic.php?f=17 ... start=3080
Cette exégèse, que l'on peut aimer ou ne pas aimer, est à lire impérativement si l'on prétend discuter des thèses diplomatiques, notamment celle de François Delpla.
Alors je te souhaite bonne lecture :
Cette pièce figure dans un petit dossier "Paul Reynaud" aux archives du quai d'Orsay, alors que le gros des archives de l'ancien président du conseil est vierge de toute allusion à Nordling, à Dahlerus ou à des offres quelconques de paix pendant son ministère. C'est ce qu'on appelle un document miraculeusement échappé à une razzia destructrice.
En Angleterre, de même, la correspondance diplomatique avec la Suède a été passée au peigne fin et le nom de Dahlerus systématiquement gommé.
On sait cependant que le cabinet de guerre discute à trois reprises (les 19, 21 et 23 mai) d'un "plan Dahlerus" de neutralisation du nord de la Norvège, évoqué, tout comme les conditions de paix, dans le bureau de Göring le 6 mai. En la matière, qui peut le moins peut le plus : si Dahlerus a pu faire connaître à Londres un projet local, à plus forte raison un projet général a dû arriver sur les bords de la Tamise... mais à quel endroit au juste ? De longues stations dans les archives de Kew m'ont amené à supposer que Halifax n'avait pas communiqué l'information à Churchill, craignant sans doute de se faire rembarrer. Mais qu'il l'avait en tête lorsqu'il s'efforçait d'ouvrir une voie italienne vers la négociation, ce qu'il fait sans relâche du 25 au 28 mai.
Parmi les défauts les plus impardonnables du livre de Frieser figure l'ignorance totale du document Reynaud, alors que le livre de Costello est de 1991 et celui de Frieser de 1995. Pire, revenant sur le sujet dans un article en 2000, puis dans une interview en 2013, il ne le mentionne pas davantage.
En résumé, nous avons malgré la censure la preuve irréfutable que le Reich opère conjointement une offensive blindée et une manoeuvre diplomatique, et que celle-ci pèse fortement sur les discussions de Paris et de Londres (la censure elle-même prouve d'ailleurs qu'il ne s'agit pas d'une affaire secondaire, et que des gens ont eu honte des positions prises par certains à cette époque, à la lumière du résultat de la guerre et de la mesure prise alors, par les plus myopes, de la barbarie nazie).
Paris est alors un moulin, et Hitler peut compter pour le renseigner sur l'ambassadeur italien Guariglia, le nonce Valeri, l'ambassadeur espagnol Lequerica et bien d'autres. Il a peut-être moins d'informateurs à Londres et surtout la situation y est plus complexe et mystérieuse : la solidité du gouvernement Churchill fait problème puisque le premier ministre, certes résolu à se battre et le montrant, est cerné d'appeasers que les désastres militaires amènent vraisemblablement à réfléchir. La capture du BEF, certaine le 24 à midi sauf Haltbefehl, ne risque-t-elle pas de renforcer Churchill au lieu de l'affaiblir ? Car ce dont il s'agit, c'est de rappeler aux "raisonnables de Londres" que le nazisme n'est pas antibritannique, que du contraire.
Donc Hitler, certes, ne freine pas pour favoriser un embarquement (encore que je retienne l'hypothèse "piston-seringue" apportée par ce débat) mais s'abstient, en tout cas, de coffrer l'armée de terre anglaise, en espérant que la menace fasse plus d'effet que sa mise à exécution -un procédé nazi au demeurant basique.