De même que la dimension militaire englobe plusieurs thèses, et non pas une seule, la dimension diplomatique englobe plusieurs variantes (la thèse de Schiffers ; la thèse de Delpla ; la thèse de Nicolas B).
[1072] François Delpla a écrit:Un exposé, même succinct, des différences me siérait.
Pendant les six ou sept derniers mois j'ai souligné plusieurs fois le contraste Schiffers—Delpla et Nicolas—Delpla.
Un rappel riche en détail serait le bienvenu. Mais il faudra patienter quelques jours. Aujourd'hui tu devras te contenter d'un exposé succinct :
Cher françois, tu te démarques de NB et BRH en clamant que les membres du "war cabinet" à Londres, à l'exception de lord Halifax, ne sont pas informés d'une offre explicite. Dans le post n°556 tu exposes un aspect capital de ta théorie :
Halifax ne semble pas avoir parlé à Churchill du message de Dahlerus, c'est ce qui l'amène à un fatal détour par l'Italie pour connaître les conditions de paix, au moment même où Hitler se décide à entraîner Mussolini dans la guerre.
Le message numéro 600 est un rappel utile à ceux qui auraient mal compris ta théorie :
Hitler stoppe dans l'éventualité où l'offre faite le 6 mai via Dahlerus aurait besoin de quelques jours supplémentaires pour faire son effet sur une Angleterre cornaquée depuis le 10 par le "Juif" Churchill. [...] Un tel positionnement est évidemment incompatible avec le fait de mettre les pieds dans le plat et de les agiter, en rappelant l'offre de paix et en disant explicitement qu'on suspend l'offensive pour laisser un temps de réflexion. Ce serait offrir à Churchill une trop belle occasion de clamer que l'Allemagne a peur et que ce n'est pas le moment de lui céder.
Sur ce point Schiffers est d'accord avec toi. Mais il est en désaccord sur un des aspects de ta théorie. Il considère que la décision de terminer le haltbefehl résulte de l'échec de la manoeuvre diplomatique. Schiffers affirme qu'AH, persuadé que la manoeuvre a échoué, doit logiquement relancer l'offensive militaire le 26 mai. Schiffers considère qu'AH est omniscient. Ton analyse, cher François est plus subtile. Tu considères qu'AH est dans le brouillard. Ta théorie est donc moins naïve que celle de Schiffers. Mais la théorie de Schiffers a l'avantage d'être cohérente. En effet j'ai exprimé des doutes sur la cohérence d'une manoeuvre diplomatique lancée par un chef qui est dans le brouillard.
Dans le post numéro 600 tu affirmais, une fois de plus, que le haltbefehl était principalement une volonté d'offrir un délais supplémentaire aux Anglais :
Hitler stoppe dans l'éventualité où l'offre faite le 6 mai via Dahlerus aurait besoin de quelques jours supplémentaires pour faire son effet sur une Angleterre cornaquée depuis le 10 par le "Juif" Churchill. Les raisonnables lui ont confié inconsidérément le gouvernail, ils peuvent se reprendre et le lui reprendre. Ou Churchill lui-même peut avoir un accès de réalisme. Mais cela peut ne pas marcher, donc l'arrêt est bref, furtif, habillé de raisons militaires de bric et de broc
Contrairement à Schiffers tu penses, tout comme je le pense moi même, qu'AH ne connait pas l'avancement de la discussion dans le "war cabinet" à Londres lorsque les panzers repartent en avant après deux jours d'immobilisation. Cela signifie que Hitler a pris le risque de saboter la manœuvre diplomatique qu'il a lui même conçu. Car il n'a pas la certitude que lord Halifax a échoué à convaincre Chamberlain, Attlee et Greenwood. D'ailleurs, nous savons aujourd'hui que l'échec de lord Halifax n'est pas encore consommé lorsque qu'AH donne l'ordre de terminer le haltbefehl. Les discussions dans le cabinet se poursuivant jusqu'au 28 mai.
Dans le post numéro 233 je réponds au post numéro 168 de Schiffers :
[168] SCHIFFERS a écrit:Mais, si les Britanniques s'obstinent malgré tout, alors "tant pis pour eux"...
"Quels sont les moyens dont dispose Hitler pour vérifier que la GB s'obstine ? Après deux journées à attendre (du 24 au 26 mai) comment être certain que l'Angleterre n'est pas sur le point d'envisager des pourparlers ?"
Telle fut ma réponse à Schiffers. Une réponse en forme de question.
Le post n° 168 dévoile la vision de Schiffers. La fin du haltbefehl vise à punir les Anglais qui ont eu l'outrecuidance de refuser la paix.
Il est facile de deviner pourquoi BRH et NB refusent ton hypothèse d'un Führer qui n'est pas EXPLICITE dans sa manoeuvre diplomatique. Si Hitler n'est pas explicite, le risque est grand que Churchill rétorque à lord Halifax : "croyez-vous qu'AH soit un homme désireux d'offrir une paix généreuse à la Grande-Bretagne ?" Si Halifax veut convaincre Chamberlain et Attlee que le moment est venu d'envisager des pourparlers avec l'Allemagne, il doit impérativement les persuader que les conditions imposées par l'Allemagne seront généreuses.
Je suis l'auteur du post n° 381 dans lequel je constate le gouffre qui sépare Schiffers et Nicolas B. En effet ce dernier tire a boulets rouges contre la thèse de Schiffers :
En résumé: Hitler a sans aucun doute anticipé une évacuation du corps expéditionnaire britannique lorsqu'il a formulé le Haltbefehl;
Contrairment à Nicolas Bernard, Schiffers considère qu'AH est pris au dépourvu le 26 mai lorsqu'il constate un rembarquement tout à fait inattendu :
[258] SCHIFFERS a écrit:En pratique, la riposte churchilienne (le rembarquement), inattendue et préoccupante pour Hitler, le prive de l'initiative qu'il croyait encore être le seul à avoir : elle l'oblige à réagir et elle précipite (tout en suffisant par elle-même en tant que justification de) l'ordre de mettre fin à la "pause"...