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Le Haltbefehl

Cette rubrique renferme tout ce qui concerne le front ouest du conflit, y compris la bataille des Ardennes ainsi que les sujets communs à tous les fronts tels, les enfants et les femmes dans la guerre, les services secrets, espionnage...
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Re: Le Haltbefehl

Nouveau message Post Numéro: 3381  Nouveau message de François Delpla  Nouveau message 28 Fév 2017, 12:01

Que lis-je ?

norodom a écrit:

Je n’ai rien lu qui aille dans le sens de ma demande…
Rappel du point de départ = entrevue Göering – Dahlerus du 11 mai 1940…

Nicolas Bernard a écrit:En toute hypothèse, il utilise deux émissaires suédois par l'intermédiaire de Göring, Dahlerus, porteur d'un message de paix aux Anglais (que ces derniers effaceront de leurs archives pour éviter le scandale) et Nordling, porteur d'un message de paix aux Français. Sur ce dernier point, ne subsistera étrangement que la note d'un haut-fonctionnaire du Quai d'Orsay rédigée le 20 mai 1940, ce qui suggère que Paul Reynaud a, comme les Britanniques, cherché à effacer les traces de cette tentative nazie de rapprochement: une telle pièce, cependant, atteste d'un jeu diplomatique d'envergure, dans lequel se comprend pleinement l'ordre d'arrêt du 24 mai.

NB pour nos lecteurs : Le Français Nordling était consul de Suède alors que Dalherus était suédois, diplomate et homme d’affaires dont l’épouse était de nationalité allemande.

Pour ce texte (votre citation) je reste dubitatif sur la destruction des documents, compte tenu que certains écrits restent, tels que les mémoires de Churchill et la déposition de Reynaud au procès du Maréchal Pétain.
Je connais deux intervenants sur ce fil dont un seul est encore et toujours là, qui n’ont pas été avares de précisions.
Discutables, certes, mais des précisions.


Ainsi, l'un des plus vigoureux adversaires de l'explication du Htbf
par la stratégie générale de Hitler
et son besoin éperdu d'une alliance, ou au moins d'une neutralité, britannique lors de sa marche vers l'est,
n'a pas lu un texte dont j'ai donné le lien dix fois http://www.delpla.org/article.php3?id_article=377

texte où je corrige une des erreurs de Costello (l'entrevue n'est pas du 11 mais du 6 mai)

et n'a pas lu non plus la Ruse nazie (1997). Sans doute s'est-il contenté du Miracle à Dunkerque de Vanwelkenhuyzen (1994), tombant ainsi dans l'un des plus redoutables pièges qui menacent les chercheurs : l'ignorance du dernier état de la recherche.

Ce que le livre de 1997 apporte sur le point concerné par ces lignes de Norodom, c'est la découverte de quelques lignes dans le guide imprimé des archives britanniques (Cantwell John D,
The Second World War / A guide to documents in the Public Record Office
, Londres, Crown, 1993). J'ai reproduit cette mention à plusieurs reprises dans mes articles, notamment http://www.delpla.org/article.php3?id_article=377 . Apparemment une énième reproduction n'est pas superflue (étonnez-vous après cela qu'un fil traîne en longueur !) :

une partie de la correspondance
avec la Suède a été détruite en 1940, devant la
menace d’une invasion


Bien entendu, découvrant cette stupéfiante mention,
unique en son genre comme si, devant la menace d'une invasion en 1940, il n'y avait eu que des documents relatifs à la Suède qui méritassent destruction
-et comme si la moindre destruction s'imposait, plutôt qu'un transfert au Canada par exemple,

je suis allé dans les cartons voir les pièces restantes, et ai constaté que les mentions de Dahlerus avaient fait l'objet d'une razzia presque totale (un oubli, un seul, confirmant de façon éclatante la règle).
Mais j'ai déjà raconté souvent cela par le menu, y compris sur ce fil.

::Merci::

(merci au sens médiéval du terme : pitié, stop !)

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Re: Le Haltbefehl

Nouveau message Post Numéro: 3382  Nouveau message de Nicolas Bernard  Nouveau message 28 Fév 2017, 12:14

norodom a écrit:
Nicolas Bernard a écrit:En l'occurrence, je n'ai pas cité les analyses de Frieser, mais... les documents qu'il cite lui-même.

Soit… mais comme vous l’écrivez << les documents qu'il cite lui-même >>

Nicolas Bernard a écrit:L'ordre d'arrêt du 24 mai s'applique non seulement aux blindés de Von Kleist, mais également à ceux, sur leur droite, de Hoth, et, plus généralement, interdit à tout type de formation (blindés ou infanterie) de franchir la ligne Lens-Béthune-Aire-Saint-Omer-Gravelines (qui correspond à la ligne des canaux).

Là, vous me prenez sans doute pour un nouveau venu… un débutant en quelque sorte !
Ne pas connaître le contenu de ce qui a été interprété comme un ordre d’arrêt alors qu’il s’agit d’un ordre d’attaque dispenserait tout ignorant de la chose d’émettre le moindre commentaire sur le sujet…

Depuis le 14 juillet 2010 sur le forum de BRH, depuis le 31 mars 2013 ( post n° 200 page 20 sur ce fil ) en passant par ATF40, j’ai assez fulminé sur l’interprétation qui a été faite de cet ordre !

Il n’y a pas eu arrêt mais non franchissement du canal (l’Aa) pour les chars qui se sont présentés au soir du 23 mai sur la rive ouest. Ce sont ces chars là que l’on a désignés comme étant stoppés ce qui a été à l’origine du Haltbefehl.

A cette date, les blindés de Hoth (4ème Armée) étaient toujours en mouvement dans le secteur sud de Bethune et n’avaient pas atteint la ligne des canaux.
C’est pourquoi j’ai écrit que le groupe de blindés de Kleist (GA–A de Rundstedt) était principalement concerné.

Nicolas Bernard a écrit:Je note au demeurant avec plaisir que vous avez abandonné votre affirmation - inexacte - selon laquelle Hitler, le 24 mai, aurait confirmé un ordre émis la veille par Von Rundstedt.

Pas du tout ! ne jouons pas avec les mots… car en réalité l’ordre d’Hitler du 24 mai appuyait la décision prise la veille par Rundstedt.

Nicolas Bernard a écrit:J'ai publié plusieurs dizaines de messages sur ce fil qui étayent mon argumentation..

Je n’ai rien lu qui aille dans le sens de ma demande…
Rappel du point de départ = entrevue Göering – Dahlerus du 11 mai 1940…

Nicolas Bernard a écrit:En toute hypothèse, il utilise deux émissaires suédois par l'intermédiaire de Göring, Dahlerus, porteur d'un message de paix aux Anglais (que ces derniers effaceront de leurs archives pour éviter le scandale) et Nordling, porteur d'un message de paix aux Français. Sur ce dernier point, ne subsistera étrangement que la note d'un haut-fonctionnaire du Quai d'Orsay rédigée le 20 mai 1940, ce qui suggère que Paul Reynaud a, comme les Britanniques, cherché à effacer les traces de cette tentative nazie de rapprochement: une telle pièce, cependant, atteste d'un jeu diplomatique d'envergure, dans lequel se comprend pleinement l'ordre d'arrêt du 24 mai.

NB pour nos lecteurs : Le Français Nordling était consul de Suède alors que Dalherus était suédois, diplomate et homme d’affaires dont l’épouse était de nationalité allemande.

Pour ce texte (votre citation) je reste dubitatif sur la destruction des documents, compte tenu que certains écrits restent, tels que les mémoires de Churchill et la déposition de Reynaud au procès du Maréchal Pétain.
Je connais deux intervenants sur ce fil dont un seul est encore et toujours là, qui n’ont pas été avares de précisions.
Discutables, certes, mais des précisions.

Nicolas Bernard a écrit:Rappelons, en toute hypothèse, que Hitler parle en des termes élogieux de l'Empire britannique le 24 mai 1940, en présence de l'état-major de Von Rundstedt (voir le témoignage du colonel Blumentritt dans Basil Liddell Hart, The other side of the hill, Londres, Cassell, 1948, p. 141-142).

A ma connaissance ce ne serait pas le 24 mai 1940, mais après la guerre, que le général Blumentritt, chef des opérations de Rundstedt, avait rapporté l'étonnement de lui-même et de son entourage lorsque Hitler fit part de "son admiration de l'Empire britannique, de la nécessité de son existence et de la civilisation que l'Angleterre avait donnée au monde."
J'ignore encore quand et dans quelles circonstances a eu lieu cette "déclaration d'amour"

Allez… il se fait tard… la nuit est faite pour dormir…Morphée me tend ses bras… je vais de ce pas m’y blottir…

Bonne nuit !

Roger


Je vous prie vraiment - vraiment - de m'excuser, mais ce que vous écrivez m'apparaît incompréhensible. Je ne vois plus très bien à quoi vous répondez, ni ce que vous critiquez, ni à quels intervenants vous faites allusion. Je vous remercie de bien vouloir clarifier votre réponse, notamment à ce message (rien à dire sur Mein Kampf? sur les Suédois? sur l'extrait du journal de Jodl? sur l'intervention de Himmler du 25 mai 1940? sur l'extrait du journal de Halder?).

Vos allégations sont d'autant moins claires que vous me donnez l'impression de démontrer le contraire de ce que vous soutenez.

Si je vous suis bien, vous considérez que ce qui stoppe les Allemands le 23-24 mai, c'est l'armée franco-britannique. Von Rundstedt prend la décision d'interrompre l'avance le 23, et Hitler, à vous lire, se borne à confirmer cet ordre ("l’ordre d’Hitler du 24 mai appuyait la décision prise la veille par Rundstedt"). Dans cette logique, vous faites grand cas de la mésaventure des Allemands sur un secteur très localisé de la ligne de front, à Gravelines.

Ce faisant, vous ne tenez aucun compte de la situation générale, désastreuse pour les Alliés, ni des avis contemporains des officiers allemands - ce qui ne vous a nullement empêché d'alléguer que lesdits officiers allemands se seraient plaints de l'ordre d'arrêt... après la guerre, en bons gros menteurs teutons qu'ils sont. Sans parler du fait qu'il est absolument, manifestement, évidemment, totalement inexact d'alléguer que "l’ordre d’Hitler du 24 mai appuyait la décision prise la veille par Rundstedt", puisque Von Rundstedt prévoyait, lui, une pause des blindés de 24 heures, tandis que Hitler, lui, interdit catégoriquement de franchir la ligne des canaux indéfiniment. Mais peu importe en l'occurrence.

Or donc, vous écrivez que Von Rundstedt stoppe le mouvement le 23, et que cet ordre, Hitler le confirme le lendemain. Dont acte. Mais vous écrivez également qu'"à cette date [le 23 mai, donc], les blindés de Hoth (4ème Armée) étaient toujours en mouvement dans le secteur sud de Bethune et n’avaient pas atteint la ligne des canaux", et qu'en conséquence "le groupe de blindés de Kleist (GA–A de Rundstedt) était principalement concerné". Je n'ai plus l'emplacement des unités hyper-précisément en tête pour la soirée du 23, mais mettons que vous ayez raison.

Le problème est qu'il y a comme qui dirait un gros bogue logique dans votre raisonnement: l'ordre de Von Rundstedt de la veille s'applique à Kleist et Hoth. Or, si l'on admet, comme vous, que ledit groupe Hoth n'avait pas atteint la ligne des canaux au soir du 23 mai, au moment donc où Von Rundstedt émet l'ordre d'arrêt que, nous écrivez-vous, Hitler se borne prétendument à confirmer le lendemain, alors ce simple fait pulvérise votre assertion selon laquelle c'est l'armée franco-britannique qui a, d'elle-même, stoppé les Allemands.

Je m'explique: puisque Hoth, au moment où Von Rundstedt dit "stop" n'a pas encore atteint la ligne des canaux, sachant que le lendemain Hitler interdira catégoriquement de franchir ladite ligne, c'est donc que la résistance des forces alliées n'a joué aucun rôle à ce titre. Les Franco-Britanniques, en effet, ne peuvent nullement physiquement stopper des Panzer sur une ligne... qu'ils n'ont pas encore atteinte.

Vous en êtes d'ailleurs, bien conscient, puisque vous tentez d'établir que l'ordre d'arrêt intéresse "principalement" les blindés de Von Kleist... En oubliant au passage que "principalement" ne signifie nullement "exclusivement".

Bref, vous paraissez, vous-même, avoir démoli votre thèse.

D'où ma demande de clarification, pour dissiper tout malentendu.
« Choisir la victime, préparer soigneusement le coup, assouvir une vengeance implacable, puis aller dormir… Il n'y a rien de plus doux au monde » (Staline).

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Re: Le Haltbefehl

Nouveau message Post Numéro: 3383  Nouveau message de Nicolas Bernard  Nouveau message 28 Fév 2017, 12:17

Loïc Charpentier a écrit:A propos des échanges verbaux ou téléphoniques entre hauts gradés, un historien anglo-saxon, citait, il y a quelques années, une réplique prémonitoire, qu'aurait adressé le Général Ducrot, commandant du Ier Corps, au Maréchal Mac-Mahon, lors d'une réunion d'état-major, à Sedan, au soir du 31 août 1870, veille de la déculottée mémorable infligée à l'armée française... "Mais, ici, Monsieur le Maréchal, nous sommes dans un pot de chambre, prêts à nous faire chier dessus!" Bien entendu, rien de tel n'a été transcrit dans le rapport écrit y afférant. :D


Merci pour l'anecdote. ::mortderire::



En ce qui concerne les citations extraites des KTB, je m'amuserai à les vérifier, à l'occasion, à partir des documents officiels, car, malheureusement, je ne les ai pas tous "en stock" - il s'en faut de beaucoup, car les archives allemandes, à l'US NARA, représente plus de 10 000 rolls à 1500 feuillets, pour chacun d'eux ::mortderire:: -.


Ca roll... (pardon pour l'humour foireux)
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Re: Le Haltbefehl

Nouveau message Post Numéro: 3384  Nouveau message de Nicolas Bernard  Nouveau message 28 Fév 2017, 12:42

alias marduk a écrit:Manstein veut percer « au-delà de la Meuse sud de Namur, en direction Arras-Boulogne pour couper de la Somme tout ce que l’ennemi aura ou jettera en Belgique » ce qui correspond à la mission de la 4ième armée car la mission de la 12ième armée est décrite ainsi « l’ultime décision appartiendrait à la 12ième armée poussant en direction de la basse Somme »
Quant à l’objectif de la manœuvre : "la destruction de la totalité des forces ennemies combattant en Belgique et au nord de la Somme et non de leur refoulement frontal"

PS : je précise que je n’attribue pas à Manstein ( ni à Hitler ni à Halder ) le plan jaune, c’est un travail collectif qui associé l'EM du HGr A, l’OKH et l’OKW ( Hitler ) mais dans une atmosphère dysfonctionnelle qui explique bien des déboires à venir dans la suite de la guerre


J'avions compris (pour rappel, on a lu les mêmes livres).

Mais Von Manstein, à l'évidence, ne soutient pas de foncer vers les ports pour prendre à revers les forces alliées. Il est beaucoup plus vague. Du reste, ça se comprend: lorsqu'il émet ses différents mémoires, l'invasion du Bénélux n'a pas encore eu lieu, non plus que la percée de Sedan, si bien qu'il est difficile, à cette phase, de déterminer précisément l'objectif géographique final des Panzer. Tout dépendra de la suite des événements. Du reste, Von Manstein est un grand stratège en ce qu'il sait élaborer des schémas opérationnels... et improviser dans le feu de l'action, sans nécessairement s'en tenir rigidement à la lettre des plans.



Nicolas Bernard a écrit:Je suis curieux que vous citiez le document où Hitler a prescrit une telle manœuvre parce que :
- Je ne connais aucun document où Hitler cite Dunkerque comme objectif ( ou une remontée vers le ports à partir de la Basse-Somme )
- Hitler a surtout promulgué le 14 mai ( 5 exemplaires ) la directive n° 11 qui indique « le forcement rapide des passages sur la Meuse ont créé les premières conditions pour parvenir à un grand succès dans le sens de la directive n°10, grâce à une poussée au nord de l’Aisne en direction du Nord-Ouest, exécuté par la réunion de forces importantes »
Le nord de L’Aisne c’est la Thiérache ( Hirson, Guise etc ) et le Vermandois ( Saint-Quentin ) et une attaque en direction du Nord-Ouest c’est la direction de arras et non de Amiens…..


Effectivement, le nom de Dunkerque n'apparaît pas sur les documents allemands. D'ailleurs, la suite de votre message le prouve: après la percée de Sedan, les objectifs ne sont pas gravés dans le marbre. D'où les tiraillements entre Hitler et l'O.K.H., sans parler des autres généraux sur le terrain.

Ces silences des textes devraient vous mettre la puce à l'oreille. En effet, une telle absence de fixation rigide d'objectif donne dès lors toute latitude à Hitler d'imposer sa conception des choses sans avoir à le préciser en amont: aussi dessine-t-il le coup de faux en cours d'exécution.




Halder a surtout écrit ceci :
Entrée du 14 mai :
La 4ième armée poussera en direction de l’ouest le long d’une ligne Charleroi-Mons-Peruwelz-Tournai des 2 côtés de la frontière franco-belge ( française dans le texte )
La seconde armée avancera au sud de la ligne Cambrai-Arras en direction de Amiens
La 12ième armée poussera vers la ligne La Fère-Rethel
Le groupe Kleist avancera en formation massive en direction de la mer en passant par Saint-Omer ( ce qui fait qu’il vise un objectif entre Calais et Dunkerque ) en restant sur la ligne de séparation entre les 4iè et 2iè armée
Durant l'après midi, les ordres pour la suite de l'offensive des groupes d'armées A et B rédigés par moi sont transmis"

PS : Il y aura des problèmes de choix de déploiement entre les 2ième armée et la 12ième armée ce qui aboutira à des échanges « musclés » ( si on peut dire ) entre Halder et Rundstedt


Votre extrait me semble entaché d'une erreur de traduction à son passage décisif: Halder n'écrit pas que "le groupe Kleist avancera en formation massive en direction de la mer en passant par Saint-Omer" (ce qui vous fait écrire: "ce qui fait qu’il vise un objectif entre Calais et Dunkerque") mais que "le groupe Kleist, en formation massive, doit attaquer en direction de la mer vers Saint-Omer" (voyez la version en anglais et en français, je n'ai malheureusement pas la version teutonne sous les yeux - et donc je suis preneur). "Saint-Omer", ce n'est qu'une direction générale alors que le front français crève à Sedan, pas un objectif en soi. A dire vrai, les ordres donnés par Halder ne témoignent nullement, de sa part, qu'il prépare un coup de faux vers les ports de la Manche, mais qu'il cherche à créer, au 14 mai, des occasions d'exploitation de la percée, et qu'on avisera précisément ensuite. D'ailleurs, il ne tardera pas à cristalliser ses intentions, comme il le ressort de vos extraits ultérieurs.



17 mai 1940 :
Halder commence à envisager une offensive simultanée vers l’ouest ( HGr B renforcé ) et vers Compiègne ( je résume mais c’est l’idée du texte )

18 mai 1940 :
Prise de Cambrai et St-Quentin dans la matinée

Toujours dans la matinée, Halder reporte qu’il faudrait continuer l’offensive vers le sud-ouest ( voir ci-dessus )
Mais Le QG du Fuehrer voit ca différemment : le fuehrer continue à être inquiet à propos du flanc sud. Il crie que nous sommes entrain de ruinner la campagne et que nous allons droit à une défaite.
Il ne veut absolument pas que nous poursuivions vers l’ouest
( vers Amiens donc ) et encore moins vers le sud-ouest ( de la Somme ) et continue de s’accrocher à l’idée d’une offensive au nord-ouest ( donc vers Arras et Lille )

Hitler a donc mis un véto à la fois à l’idée développée par Halder de finir la campagne en une fois mais aussi à l’idée de continuer l’offensive vers Amiens et la Basse-Somme

18h00, rapport au fuehrer : Je souligne la situation et requiert la permission de commencer l’avancée qui est accordée. De cette manière on fait enfin ce qui doit être fait mais dans une atmosphère acrimonieuse et dans une forme destinée à faire croire que le plan a été conçu par l’OKW


à signaler aussi, journal du HGr A du 17 mai :
"il estime ( le fuehrer ) qu'à l'heure qu'il est la décision ne se fera pas tant grâce à une progression rapide vers les côtes de la Manche que grâce à l'établissement le plus rapide possible d'une organisation défensive absolument fiable au bord de l'Aisne, dans le secteur de Laon, et ensuite au bord de la Somme"

Bref si on résume :
Le 14 Halder et Hitler planifie chacun de leur côté l’exploitation de la percée qui se dessiné le long de la Meuse :
Halder veut pousser en direction de St.Omer vers la mer ( donc entre Calais et Dunkerque ) là où Hitler veut pousser en direction du Nord-Ouest à partir du nord de l’Aisne ( donc direction de Arras et Lille ).
Le 17 Halder songe à brûler les étapes et à renoncer aux opérations successives Jaune et Rouge pour un plan B destiné à tout faire en une seule opération
Le 18 Halder a une entrevue avec Hitler ( ca n’est pas explicite mais ça ressort des détails style il crie, il rage etc ) dans laquelle il lui propose ce plan qui est rejeté.
Hitler rejette aussi à cette occasion le plan A d’une poussée vers l’ouest au profit d’une poussée vers le Nord-Ouest ( donc Arras et Lille puisqu’à ce moment les panzers sont à Cambrai et St-Quentin )
C’est le soir du 18 mai que Halder obtient l’autorisation de poursuivre vers l’ouest conformément à son premier plan en date du 14 mai

En gras ce qui est cité des textes originaux

Citations tirées de :
- Halder ( journal )
- KH Frieser "Le mythe de la guerre éclair"
- Koeltz "comment s'est joué notre destin"
- Trevor Ruppert "Directives de guerre"


C'est bien ce que j'écris:

1/ Les plans d'opérations allemands restent relativement dans le vague après la percée de Sedan.

2/ Halder exploite la situation au jour le jour, et réhabilite très rapidement une idée de Von Manstein, à savoir prendre à revers les Alliés bousculés en Belgique et démolir d'autres formations alliées au sud-ouest de Sedan, dans la région de la Somme, pour accélérer la déconfiture ennemie.

3/ C'est Hitler qui, en s'opposant à cette dernière option au profit d'une avance vers le nord-ouest, dessine le coup de faux.
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Re: Le Haltbefehl

Nouveau message Post Numéro: 3385  Nouveau message de Nicolas Bernard  Nouveau message 28 Fév 2017, 13:08

alias marduk a écrit:Sinon en ce qui concerne la démarche diplomatique fantôme, citons François Delpla « La Ruse nazie » page 247 ( note 30 ) qui décrit une réunion le 26 mai entre Churchill et Reynaud :
- Churchill : avez-vous reçu des propositions de paix ?

- Reynaud : Non, mais nous savons que nous pouvons obtenir une offre si nous le voulons.

Donc on peut clairement affirmer que Hitler n'a pas fait d'offres de paix


Vous ne retenez que le "non" de Paul Reynaud à Churchill, pas la suite, pourtant importante: "mais nous savons que nous pouvons obtenir une offre si nous le voulons".

Il en ressort, à tout le moins, deux choses:

1/ L'allusion de Reynaud fait référence à l'information délivrée par Hitler via Göring à Nordling, et communiquée au Président du Conseil français le 20 mai, à savoir que la France peut espérer obtenir une paix généreuse.

2/ Reynaud, toutefois, se garde bien d'aller plus loin. Il tait à Churchill qu'il a été effectivement approché par Nordling, et que les informations délivrées par ce dernier apparaissent assez précises. Bref, il ne lui dit pas toute la vérité. Signe que les informations délivrées par Nordling lui travaillent sérieusement le cerveau, au point qu'il commet déjà des entorses au principe de coopération franche avec l'allié britannique.

Du reste, le 25 mai, le Président du Sénat s'entretient avec Reynaud. Lequel lui indique: "Si les Allemands devenaient maîtres de la côte, il n'est pas exclu qu'ils fassent des offres de paix, directes ou indirectes" (cité dans Delpla, La Ruse nazie, op. cit., p. 246).

Le jour même, lors de la réunion du Comité de Guerre, le Président de la République, Albert Lebrun, y va carrément: "Certes, nous avons signé des engagements qui nous interdisent de signer une paix séparée. Nous devons toutefois, si l'Allemagne nous offrait des conditions relativement avantageuses, les examiner de près et délibérer à tête reposée. (ibid., p. 247).

Il en ressort qu'au 25 mai

- soit Hitler n'a pas directement formulé d'offre de paix à la France et il attend un premier pas de sa part, hypothèse en l'état la plus probable;

- soit il l'a formulée, mais Reynaud, dans l'attente de ses sondages des différents décideurs français et britanniques, la garde encore pour lui, hypothèse qui me convainc moins mais qu'il est impossible, en l'état d'exclure catégoriquement.

L'essentiel, c'est ce que Reynaud déduit de son entrevue avec Nordling intervenue le 20 mai: Hitler lui fait miroiter une paix généreuse, et rien n'interdit à la France de la solliciter, d'elle-même. "Nous savons que nous pouvons obtenir une offre si nous le voulons". Or, avec la débâcle qui devient chaque jour plus évidente, il apparaît que Reynaud aimerait bien "obtenir une offre", et qu'il sonde Churchill en conséquence...

Bref, de tels éléments attestent que Hitler prévoit bel et bien de mettre un terme rapide à la guerre, en proposant à la France une paix généreuse, et que Reynaud prend cette intention au sérieux. En conséquence, qu'aucune offre de négociations expresse émanant de l'Allemagne n'ait été à ce jour retrouvée ne vous autorise absolument pas à parler de "démarche diplomatique fantôme".
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Re: Le Haltbefehl

Nouveau message Post Numéro: 3386  Nouveau message de Chef Chaudart  Nouveau message 28 Fév 2017, 13:25

Nicolas Bernard a écrit:
Cependant, comme il le ressort du livre de Koeltz (qui ne donne toutefois pas l'impression de s'en rendre compte), et comme le relateront Karl-Heinz Frieser et François Delpla, Manstein n'a nullement en tête le fameux "coup de faux" qui s'accomplira à la suite de la percée de Sedan. Il envisage vaguement de tomber sur le dos des Alliés repoussés en Belgique par le Groupe d'Armées B, tout en détruisant les forces françaises localisées au sud-ouest de Sedan: s'il vise la Somme, il n'est pas question d'une remontée vers les ports de Calais et de Dunkerque. C'est le Führer qui, au cours du développement de l'offensive, à partir du 10 mai 1940, va prescrire une telle manoeuvre.

Je suis curieux que vous citiez le document où Hitler a prescrit une telle manœuvre parce que :
- Je ne connais aucun document où Hitler cite Dunkerque comme objectif ( ou une remontée vers le ports à partir de la Basse-Somme )
- Hitler a surtout promulgué le 14 mai ( 5 exemplaires ) la directive n° 11 qui indique « le forcement rapide des passages sur la Meuse ont créé les premières conditions pour parvenir à un grand succès dans le sens de la directive n°10, grâce à une poussée au nord de l’Aisne en direction du Nord-Ouest, exécuté par la réunion de forces importantes »
Le nord de L’Aisne c’est la Thiérache ( Hirson, Guise etc ) et le Vermandois ( Saint-Quentin ) et une attaque en direction du Nord-Ouest c’est la direction de arras et non de Amiens…..

A ma connaissance, la remontée vers le Nord-Est vient de Halder, qui veut en profiter, après avoir la atteint la mer, pour attaquer à front renversé. Et encore: l'objectif "Dunkerque" n'est pas donné comme étant la prise de la ville, simplement l'axe de remontée vers Ostende. Le but est clairement d'attaquer les Alliés sur leurs arrières et les couper de la mer, dernier cordon ombilical qui les relie encore à leurs arrières.

On a là une exploitation typique après une percée (qu'il y ait encerclement ou pas), rôle traditionnel de la cavalerie, les divisions Panzer dans notre cas. Le risque, dans le cas qui nous occupe, c'est que cette pointe qui remonte ne se fasse couper elle-même par une contre-attaque. Elle se retrouverait bloquée dos à la mer, encerclée à son tour. L'autre, c'est que plus on approche du "noyau" des forces ennemies, moins elles ont de distance à parcourir pour déplacer leurs troupes sur le front. Cela leur facilite la mise en place de défenses en catastrophe, ou la mise sur pied de la contre-offensive, qui suivra inévitablement.

Les Panzer risquent donc de subir une contre-attaque alors que leur dispositif défensif est faible, ou, en l'absence de celle-ci, de se heurter à terme à des défenses solides, perdant ainsi l'initiative.

Ce qui m'amène à la seconde partie:
Cependant, ce qui compte parfois, c'est moins la situation réelle que l'image que l'on s'en fait. Or, dans cette logique, il est tout aussi constant que les généraux de l'O.K.H. et ceux sur le terrain, y compris Von Rundstedt, n'étaient pas favorables, mais alors pas du tout, à un ordre d'arrêt sine die. J'admets que Hitler a eu souvent raison contre ses généraux, sur le Front de l'Est entre autres, mais sur le strict plan militaire, il n'avait aucune raison de remettre en cause un jugement aussi unanime. Pour rappel, il ne prescrit pas de pause limitée à 24 heures pour les blindés, lui: il interdit tout franchissement de la ligne des canaux, indéfiniment.

D'une part, l'ordre d'arrêt de 24h suffit déjà aux Alliés pour rameuter quelques troupes en défense. La défense du 25 est déjà autre que celle du 23/24. Ce qui n'échappe pas à Halder, von Rundstedt payant pour cette erreur. Tout est en effet dans la vitesse: la perte de l'initiative condamnerait le mouvement vers Ostende et mettrait en danger les forces mobiles aventurées. L'ordre d'arrêt sine die peut donc signifier simplement l'abandon d'une option qui comporte sa part de risque en cas de diminution du "momentum"et qui n'aurait comme unique avantage que de réduire la durée du siège (dixit Halder), Risque qui augmente avec le temps.

Comme tu le dis "j'admets que Hitler a eu souvent raison contre ses généraux, sur le Front de l'Est entre autre..."Hitler a une pensée originale, n'ayant pas reçu de formation "académique", et il est le seul à maitriser la "grande stratégie" (définition des buts de guerre, etc...).
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Re: Le Haltbefehl

Nouveau message Post Numéro: 3387  Nouveau message de Nicolas Bernard  Nouveau message 28 Fév 2017, 15:17

Chef Chaudart a écrit:A ma connaissance, la remontée vers le Nord-Est vient de Halder, qui veut en profiter, après avoir la atteint la mer, pour attaquer à front renversé. Et encore: l'objectif "Dunkerque" n'est pas donné comme étant la prise de la ville, simplement l'axe de remontée vers Ostende. Le but est clairement d'attaquer les Alliés sur leurs arrières et les couper de la mer, dernier cordon ombilical qui les relie encore à leurs arrières.


Plus précisément encore, Halder n'a rien fixé de manière intangible lors de l'élaboration des plans de guerre. Le 12 mars 1940, il écrivait encore au général Sodenstern, chef d'état-major de Von Rundstedt (cité dans Frieser, Le mythe de la guerre-éclair, op. cit., p. 209):

Des forces blindées, qui portent le premier coup sur la Meuse, nous n'attendons pas un effet opérationnel immédiat [...]. Ce n'est que quand une quantité suffisante des unités d'infanterie auront pris la zone de mouvement nécessaire à l'ouest de la Meuse et l'auront bien en main qu'on abordera la question de réunir les forces blindées encore utilisables pour décider d'un objectif opérationnel.


Il a tout de même son idée, mise à l'écrit: pousser en force et le plus vite possible en direction de l'ouest vers la Somme inférieure, pour prendre à revers les Alliés aventurés en Belgique. Ce qui reste encore relativement vague. Normal: de même que Von Manstein, Halder préfère attendre et voir venir les résultats de la percée avant de décider fermement quoi que ce soit.

Or, c'est pourtant Hitler qui, dès le 14 mai, formule expressément la première étape du coup de faux: "une poussée la plus puissante possible au nord de l'Aisne et dans la direction du nord-ouest". Ce que Halder, le jour même, traduit comme suit:

La masse de rupture du Groupe d'Armées A doit avoir les objectifs suivants :

- La 4. Armee : progressera vers l'ouest le long de la frontière par Charleroi, Mons, Peruwetz, Tournai, de chaque côté de la ligne de fortifications de la frontière française, qui sera laminée.

- La 2. Armée avancera au sud de la ligne Cambrai-Arras en direction générale d'Amiens.

- La 12. Armee, passant par Signy-le-Petit, Signy-l'Abbaye, gagnera la ligne La Fère-Rethel.

- La 16. Armee doit lancer son aile droite sur la ligne Montmédy-Rethel.

- Le groupe Kleist en même temps, en formation massive, doit attaquer en direction de la mer vers Saint-Omer.


Il faut attendre le 17 mai pour que Halder, au vu de la situation, jugée "tout à fait en notre faveur" le 16, concocte le projet suivant:

La poursuite de notre attaque en direction du sud-ouest demande que le Groupe d'Armées A ne perde rien de sa puissance sur le flanc sud, mais continue à progresser vers l'ouest en formations échelonnées. Cela ne comporte aucun risque, puisque l'ennemi est trop faible ici pour attaquer en ce moment. L'effort principal de l'attaque sud-ouest serait en direction de Compiègne, avec possibilité de faire par la suite une conversion de l'aile droite en direction du sud-est, dépassant Paris laissé à découvert. Une grande décision à prendre maintenant!


Bref, on attaque au nord-ouest... et au sud-ouest. Pas de coup de faux, en l'occurrence. C'est Hitler qui, le jour même, sous prétexte de se préoccuper pour le flanc méridional de l'offensive qui se développe à partir de Sedan, s'oppose à cette idée:

Apparemment peu de compréhension mutuelle, note Halder. Le Führer insiste sur le fait que la principale menace vient du sud (je ne vois actuellement pas de menace du tout!) Aussi des divisions d'infanterie devraient être amenées le plus vite possible pour protéger le flanc sud; les divisions blindées suffiraient par elles-mêmes à élargir la percée en direction du nord-ouest.


Aussi Hitler autorise-t-il de faire pivoter pour faire pivoter quatre corps d'armées en direction du sud-ouest. Mais les blindés poursuivent, eux, nord-ouest.

De sorte que, le 18, Halder fulmine, mais Hitler s'accroche:

La situation du mati: montre l'ennemi opérant une retraite méthodique au nord de la Sambre; en même temps il semble transporter sur le front ouest de notre percée la majeure partie de ses troupes de Belgique. Sur l'Aisne, il édifie un front défensif avec des troupes provenant de la région de Paris, et, pour le secteur entre l'Aisne et la Meuse, de son Groupe d'Armée B.

Aucune concentration annonçant une contre-attaque. Celle-ci d'ailleurs serait impossible actuellement et ne disposerait pas d'une capacité de transport par fer suffisante. Les réserves du Grand Quartier Général français n'ont jusqu'ici été engagées que sur une petite échelle.

Les Alliés évacuent progressivement la Belgique (le drapeau allemand flotte sur l'Hôtel de Ville d'Anvers) et font des efforts frénétiques pour improviser un front destiné à bloquer notre avance : ceci prouve que j'avais raison de conclure hier qu'il fallait continuer l'opération sans le moindre délai en direction du sud-ouest (avec l'effort principal au sud de la Somme). Chaque heure est précieuse.

L'état-major du Führer voit, les choses différemment. Le Führer se tourmente d'une façon inexplicable pour le flanc sud. il est furieux et clame que nous prenons le meilleur chemin pour faire échouer toute la campagne et mener l'armée à sa défaite.Iil ne veut avoir aucune part dans la continuation des opérations vers l'ouest, laisse faire au sud-ouest et se cramponne au plan d'une offensive nord-ouest.

C'est le sujet d'une très désagréable discussion au Quartier Général du Führer entre le Führer d'un côté, Von Brauchitsch et moi de l'autre (10 heures).


Bref, là où Halder se laisse parfois aller à l'improvisation, Hitler ne fléchit pas: c'est lui qui prescrit aux Panzer de rouler au nord-ouest après la percée de Sedan. Quitte à exagérer devant l'O.K.H. la menace sur le flanc sur de la poussée allemande. La suite du Journal de Halder montre que ce dernier, pour autant, ne renonce pas à son idée de frapper sur la Somme dans les meilleurs délais (voir l'entrée du 19 mai).



Chef Chaudart a écrit:On a là une exploitation typique après une percée (qu'il y ait encerclement ou pas), rôle traditionnel de la cavalerie, les divisions Panzer dans notre cas. Le risque, dans le cas qui nous occupe, c'est que cette pointe qui remonte ne se fasse couper elle-même par une contre-attaque. Elle se retrouverait bloquée dos à la mer, encerclée à son tour. L'autre, c'est que plus on approche du "noyau" des forces ennemies, moins elles ont de distance à parcourir pour déplacer leurs troupes sur le front. Cela leur facilite la mise en place de défenses en catastrophe, ou la mise sur pied de la contre-offensive, qui suivra inévitablement. Les Panzer risquent donc de subir une contre-attaque alors que leur dispositif défensif est faible, ou, en l'absence de celle-ci, de se heurter à terme à des défenses solides, perdant ainsi l'initiative.


Toujours est-il qu'au 24 mai, la situation ne présentait aucun danger de cet ordre pour les Allemands, puisqu'ils jugeaient que les défenses alliées étaient trop faibles pour tenir le coup... Comme le dit F.D.: quand l'ennemi est à ce point laminé, le bon sens commande d'aller de l'avant, peu importe la fatigue.



Chef Chaudart a écrit:Ce qui m'amène à la seconde partie: [...]

D'une part, l'ordre d'arrêt de 24h suffit déjà aux Alliés pour rameuter quelques troupes en défense. La défense du 25 est déjà autre que celle du 23/24.


Relativisons: dans la mesure où des formations allemandes (cf. Guderian) s'emparent déjà de têtes de pont sur la ligne des canaux le 24, la pause de 24 heures prescrite par Von Rundstedt apparaît peu ou mal appliquée. C'est bel et bien l'ordre d'arrêt du 24 qui conduit finalement, de gré ou de force, à une véritable interruption de l'avance.



Ce qui n'échappe pas à Halder, von Rundstedt payant pour cette erreur.


Halder n'est pas le seul à constater l'erreur. Brauchitsch aussi s'en aperçoit, et compte ôter à Von Rundstedt ses forces blindées pour les confier à un esprit plus pugnace, Von Bock. Ce que Hitler, le 24 mai, mettra en échec.



Tout est en effet dans la vitesse: la perte de l'initiative condamnerait le mouvement vers Ostende et mettrait en danger les forces mobiles aventurées. L'ordre d'arrêt sine die peut donc signifier simplement l'abandon d'une option qui comporte sa part de risque en cas de diminution du "momentum"et qui n'aurait comme unique avantage que de réduire la durée du siège (dixit Halder), Risque qui augmente avec le temps.


Mais vu que les Allemands constatent que les Franco-Britanniques n'ont pas aménagé de positions solides en défense (et pour cause, ils sont en continuelle débâcle) les 23 et 24 mai, où est le risque à poursuivre? Hitler aurait donc en main, le 24 mai, des informations différentes de celles qui fondent les estimations de ses propres généraux? Au point de prendre une directive radicalement différente de celle de Von Rundstedt, qui prescrivait simplement une pause de 24 heures à ses blindés alors que Hitler, lui, interdit indéfiniment tout franchissement de la ligne des canaux à toute formation allemande?

D'ailleurs, l'"option qui comporte sa part de risque en cas de diminution du "momentum"et qui n'aurait comme unique avantage que de réduire la durée du siège" me semble passablement incomplète: ne pas interrompre l'avance (et malgré l'ordre de Von Rundstedt de la veille, cette avance n'a guère été interrompue), au vu de l'absence de défense conséquente tel que le fait est constaté par les Allemands, permet d'éliminer la poche alliée, de faire main basse sur plusieurs centaines de milliers de prisonniers, dont le corps expéditionnaire britannique et l'armée belge, et de reprendre au plus vite l'invasion du territoire français - bref, de mettre un terme, rapidement, à la bataille de France. Stopper, en revanche, c'est renoncer, ne serait-ce que provisoirement, à un tel triomphe, c'est laisser les Alliés fortifier leurs positions autour de Dunkerque et sur la Somme, c'est ouvrir la voie à une évacuation (que Hitler n'exclut pas, vu sa directive n°13 du 24 mai), bref c'est retarder la fin de la bataille de France et risquer de faire verser davantage de sang allemand.

Enfin, Hitler est l'homme des décisions hardies, de la remilitarisation de la Rhénanie à la percée de Sedan et du coup de faux qu'il impose à ses généraux, sans parler de la suite, et en l'occurrence, il se mettrait soudain à douter... de sa propre stratégie?



Chef Chaudart a écrit:Comme tu le dis "j'admets que Hitler a eu souvent raison contre ses généraux, sur le Front de l'Est entre autre..."Hitler a une pensée originale, n'ayant pas reçu de formation "académique", et il est le seul à maitriser la "grande stratégie" (définition des buts de guerre, etc...).


Yeap. Il est le seul à maîtriser la "grande stratégie". Et c'est bel et bien lui qui mène, parallèlement à l'offensive militaire du 10 mai, une "offensive de paix" via des émissaires suédois, aux fins d'amener la France et la Grande-Bretagne à conclure une paix "généreuse", donc... à bref délai. Quitte à stopper ses troupes alors qu'elles sont à un cheveu d'anéantir les forces alliées dans la poche de Dunkerque, pour faire état de sa bonne foi, et laisser aux Alliés le temps de digérer les informations communiquées par Dahlerus et Nordling sur la possibilité de conclure à bref délai un accord avantageux... et donc éviter le pire.
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Re: Le Haltbefehl

Nouveau message Post Numéro: 3388  Nouveau message de Chef Chaudart  Nouveau message 28 Fév 2017, 16:45

Une précision pour la compréhension générale: l'encerclement des forces alliées aventurées en Belgique est expressément prévu dans le plan d'attaque général "Fall Gelb". L'endroit n'est pas fixé :

"...La 2eme armée avait l'ordre de suivre d'abord l'offensive en restant à l'arrière, échelonnée en profondeur, puis de reprendre la section du front qui se libérerait après que les 4ème et 12eme armée auraient bifurqué en direction des côtes de la Manche..."

Ordre de marche (Aufmarschanweisung) n°4 "Fall Gelb" du 24 février, Frieser, "Le mythe de la guerre éclair", p.85

Pour le reste, je ne suis toujours pas convaincu, désolé. Je pense que les choses peuvent s'expliquer d'une manière diffrente.
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Re: Le Haltbefehl

Nouveau message Post Numéro: 3389  Nouveau message de Loïc Charpentier  Nouveau message 28 Fév 2017, 16:47

Siouplait, arrêtez de considérer Halder comme un "décisionnaire"; il n'avait ni le poste, ni le rang nécessaires, en mai 1940. A son niveau, il se contentait d'établir des plans prévisionnels, qu'il proposait à ses supérieurs hiérarchiques.
Cà ne remet, nullement, en cause ses compétences mais limite, sérieusement, son niveau effectif de responsabilités. C'est bien, d'ailleurs, ce qui l'amènera à "râler" dans son "carnet de route" personnel, genre "je pisserai dans un violon, ce serait du kif-kif bourricot"... ce qui n'est pas faux (à sa grande déconvenue!). :D Halder a, souvent, eu tendance à se pousser du col, en raison de sa fonction, au sein de l'OKH, mais, hiérarchiquement, il n'était pas dans "l'échappée" mais, au mieux, dans le "peloton de poursuite". L'homme, imbu (ou conscient) de ses compétences, se serait bien vu calife à la place du calife (au moins, au sein de l'OKH... quoiqu'il y avait beaucoup de califes!). Même s'il ne pouvait pas piffrer Dodolf, la prise en compte de ses "prospectives" par ce dernier renforçait sa position (sous-entendu... sans moi, ce sont, tous, d'aimable burnes !. Or, l'ordre d'arrêt temporaire, prolongé ou la réorganisation de l'offensive - bref, comme vous la considérez - , décidée le 24 mai, lui avait, clairement, cassé son coup! Ses "projections", aussi avisées qu'elles avaient, jusqu’alors, pu paraitre, étaient "enterrées"... lui, rappelant, ainsi, douloureusement, qu'il n'était, en rien, décisionnaire! Il fera, certes, parti de la distribution de médailles et de promotions, après le Westfelzug, mais ses "compétences", elles, avaient été jugées à son juste niveau "décisionnaire".

Manstein, d'une certaine manière, avait été confronté à une situation similaire, mais, soit par intelligence, soit par expérience, voire les deux, une fois, promu à la tête du XXXVIII Korps - ce qui était, au passage, une belle promotion -, il la jouera discrète, en se consacrant à son seul rôle d'Oberbefehlshaber.

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Re: Le Haltbefehl

Nouveau message Post Numéro: 3390  Nouveau message de Nicolas Bernard  Nouveau message 28 Fév 2017, 17:11

Loïc Charpentier a écrit:Siouplait, arrêtez de considérer Halder comme un "décisionnaire"; il n'avait ni le poste, ni le rang nécessaires, en mai 1940. A son niveau, il se contentait d'établir des plans prévisionnels, qu'il proposait à ses supérieurs hiérarchiques.
Cà ne remet, nullement, en cause ses compétences mais limite, sérieusement, son niveau effectif de responsabilités. C'est bien, d'ailleurs, ce qui l'amènera à "râler" dans son "carnet de route" personnel, genre "je pisserai dans un violon, ce serait du kif-kif bourricot"... ce qui n'est pas faux (à sa grande déconvenue!). :D Halder a, souvent, eu tendance à se pousser du col, en raison de sa fonction, au sein de l'OKH, mais, hiérarchiquement, il n'était pas dans "l'échappée" mais, au mieux, dans le "peloton de poursuite". L'homme, imbu (ou conscient) de ses compétences, se serait bien vu calife à la place du calife (au moins, au sein de l'OKH... quoiqu'il y avait beaucoup de califes!). Même s'il ne pouvait pas piffrer Dodolf, la prise en compte de ses "prospectives" par ce dernier renforçait sa position (sous-entendu... sans moi, ce sont, tous, d'aimable burnes !. Or, l'ordre d'arrêt temporaire, prolongé ou la réorganisation de l'offensive - bref, comme vous la considérez - , décidée le 24 mai, lui avait, clairement, cassé son coup! Ses "projections", aussi avisées qu'elles avaient, jusqu’alors, pu paraitre, étaient "enterrées"... lui, rappelant, ainsi, douloureusement, qu'il n'était, en rien, décisionnaire! Il fera, certes, parti de la distribution de médailles et de promotions, après le Westfelzug, mais ses "compétences", elles, avaient été jugées à son juste niveau "décisionnaire".


Halder n'est pas décisionnaire sur le plan statutaire, certes: mais il n'en doit pas moins traduire en actes les ordres de Hitler, chef des armées, et de Brauchitsch, chef de l'armée de terre. De par sa position hiérarchique, il n'est pas non plus un nobody. Bref, Hitler a bien compris que s'il peut lui imposer ses vues, il ne saurait pour autant lui faire part de toute sa stratégie... ni s'y heurter de front si des frictions se font sentir.

Sur le reste, il faut relativiser l'hostilité que Halder porterait à Hitler. Comme le montre Christian Hartmann dans Halder. Generalstabschef Hitlers 1938-1942, Paderborn, Schöningh, 2009, elle se pique également d'une véritable estime pour les talents du personnage, et leurs résultats: Munich, pacte germano-soviétique, Varsovie, Sedan, etc. S'est donc dessiné un rapprochement progressif, depuis la fin des années trente (époque où il conspire on-ne-peut-plus mollement) et 1940-1941, à l'issue du triomphe sur la France, qui l'amène à épouser grosso modo les vues géostratégiques du dictateur, voire certains aspects de son idéologie (le 26 septembre 1941, il considère que tuer les "faibles d'esprit" apparaît "nécessaire").

Halder, malgré ses désaccords avec Hitler sur certains objectifs (durant la course vers la mer en mai 1940; durant l'élaboration du plan Barbarossa, où il pense "destruction des forces ennemies" là où Hitler met la priorité sur des éléments économiques; durant le déroulement du Fall Blau), ne désespérait pas, jusqu'à l'été 1942, de devenir son conseiller militaire n°1, de manière à asseoir son propre pouvoir et corriger les errements de celui en qui il persistait à voir un amateur - doué certes, mais un amateur. Errements qui, à ses yeux, n'étaient nullement susceptibles de conduire à la défaite du Reich (car Halder affichait une confiance absolue dans la force des armées allemandes), mais ne pouvaient que retarder la victoire.
Dernière édition par Nicolas Bernard le 28 Fév 2017, 17:39, édité 1 fois.
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