Pfui... Il y a du boulot sur la planche!
De nos jours, il y a un paquet "d'images d'Epinal" véhiculées sur le Sturmgeschutz et son emploi ! L'une des principales raisons est que la production et l'emploi de "canons d'assaut" se sont, quasiment, interrompus, à l'Ouest, après 1945, hormis le Stridsvagn (S) 103 suédois, mis en service en 1966, qui était officiellement classé "char de combat", alors que l'Armée Rouge continuera à en faire fabriquer - ASU 85, mis en service en 1961 -.
A l'Ouest, la conséquence directe est que son emploi a, totalement, disparu des manuels d'instruction, au profit du seul char à tourelle. De nos jours, tout chef de char expérimenté , exclusivement élevé au culte de la tourelle, considère le canon d'assaut ou le chasseur de char, sans tourelle, comme une incongruité ou, au mieux, comme une pièce antichar "mobile".
Il convient, en premier lieu, d'analyser leur emploi, en conditions de combat, dans le contexte 1939-1945.
Commençons par l'avantage qu'apporterait la tourelle rotative, comparée à une pièce à débattement "limité" sous casemate. On se gargarise, à l'envie, avec les vitesses de rotation de tourelle ; c'est très sympa, certes, mais, au combat, durant la Seconde Guerre Mondiale, le secteur de débattement d'une tourelle de Panzer (Pz. III, Pz.IV, Panther, Tiger) était limité aux bords extérieurs des deux garde-boue avant, soit, à la louche, 50°, afin de, toujours, présenter la partie la mieux blindée du char à l'adversaire. De fait, au combat, le secteur "battu" dépasse rarement 30°, de manière à présenter le minimum de point faible à l'adversaire. La position de tourelle à 6 heures était, surtout, utilisée, quand le char avait entrepris , par exemple, de défoncer un mur ou une facade de maison, çà évitait de fausser le tube; ; dans certaines configurations de chargement ou de déchargement, avec un wagon-plateau, elle avait, également, son utilité. Il ne faut jamais oublié que les flancs (y compris ceux de la tourelle) et l'arrière de la caisse étaient construits avec des plaques de blindage de moindre épaisseur (par rapport au glacis avant et au bouclier de canon). Donc, c'est bien joli d'avoir une superbe tourelle rotative, pour pouvoir tirer sur son AR, mais si c'est pour se prendre un pélot à 1500 m dans le "cul", çà ne sert pas à grand-chose!
Maintenant, passons au canon d'assaut... la pièce de 7,5 cm StuK 40 L/43 ou L/48, du StuG. III, Ausf.G, avait un débattement de -10°/+10°, soit, dans le pire des cas, un déficit de 5° par côté, comparé au débattement "de combat " (30°) d'une tourelle de Panzer, sachant que le conducteur d'un Panzer ou d'un StuG faisait "ripper" le véhicule sur ses chenilles pour engager, si nécessaire, un autre adversaire se présentant sous un angle supérieur aux 30° de débattement. De toute manière, au combat, un Panzer ou un StuG évitait, au maximum, de constituer une cible "fixe" - au passage, là, on touche au rôle de l'infanterie d'accompagnement, qui a, également, en charge, la protection du ou des blindés, en lui signalant les risques potentiels (blindés ou canon antichar ennemi ; tactique de combat largement exploitée par la Sturmartillerie, que reprendra, ultérieurement, à son compte, la Panzerwaffe). -. Début 1944, la qualité de l'infanterie ayant chuté, la Sturmartillerie créera sa propre infanterie d'accompagnement, en constituant la (4éme) Begleit-Batterie (batterie d'accompagnement, forte de 200 fantassins "spécialisés", placée sous l'autorité exclusive du Kommandeur de la Sturmartillerie-Brigade. Pour mémoire, les StuG-Abtelungen seront renommées, StuG.-Brigaden, en février 1944, pour les distinguer des (Panzer)-StuG-Abteilungen des Panzertruppen ( au sein des Panzer-Grenadier-Divisionen, notamment) mais çà ne changera rien à leur organisation (31 ou, parfois, 45 StuGe, en dotation théorique, répartis en trois batteries). Les Sturmartillerie-Brigaden, elles, alignaient quatre batteries (3 de StuGe, comme les copines, plus la Begleit-Batterie (4ème batterie, constituée de fantassins)....de mémoire, seules, 5 ou 6 unités de ce type seront constituées avant la fin du conflit).
Malgré tout, les équipages de la Sturmartillerie avaient, parfaitement, conscience, que l'absence de tourelle pouvait constituer leur faiblesse et, dès sa création, cette branche de l'Artillerie avait établi des tactiques spécifiques de combat, telle que, notamment, le travail "en meute", qui impliquait d'opérer, au minimum, à trois ou, de préférence, quatre canons d'assaut, les deux véhicules, à l'avant, engageant (souvent) la même cible - d'où la difficulté d'attribuer la victoire à l'un d'entre eux! - les deux autres assurant leur couverture ; en principe, les "cibles" étaient traitées successivement, en fonction de l'urgence de leurs positions, selon les ordres du chef de groupe. Le travail en meute permettra aux équipages de la Sturmartillerie de venir à bout d'adversaires particulièrement coriaces, comme les JS-2, à partir de 1944.
Les Heeres-StuG-Abteilungen ou Brigaden) - le "préfixe" "Heeres-" précise qu'elles étaient des unités indépendantes, mises à disposition par l'OKH et, toujours, subordonnées provisoirement , soit à un Heeresgruppe (Groupe d'Armée), soit a une Armee, qui les affectaient, selon les besoins, à un Armeekorps (corps d'armée), une division ou un Kampfgruppe (groupe de combat), en tant que "casseur de char", ont démoli entre 25 000 et 30 000 blindés de tout type, au cours du conflit, néanmoins, les analyses d'engagement, qui étaient régulièrement effectuées, révèlent, au printemps 1944, que 80% de leur rôle étaient constituées par la destruction de cibles "non motorisées"... blockhaus, nid de mitrailleuses, position de mortiers ou de canons antichars, cibles "molles", etc.
Ci-après, en guise d'exemple, répartition Panzer-StuGe, pour l'ensemble des fronts, au 15 juin 1944, peu avant le déclenchement de Bagration. Les StuGe sont majoritairement déployés sur le Front Est (1319) mais si on affine la recherche, on constate, notamment, qu'ils étaient, globalement, plus nombreux, à l'Est, que les Panzer, et majoritaires, dans les secteurs Heeresgruppe Mitte & Heeresgruppe Nord. Dans un tel contexte, ils opéraient (même dépourvus de tourelle!), bien évidemment, comme des Panzer !
A un moment, dans vos divers échanges, est venu se poser la question de la distinction entre les StuGe et Panzerjäger, plus celle afférant à certains automoteurs à casemate, ainsi que la désignation des châssis...
1) Le Panzerjäger, à canon sous casemate, n'était rien d'autre qu'un Sturmgeschutz... au sein des unités de PanzerJâger, branche des Panzertruppen.
2) A l'origine, le Ferdinand, le Jagdpanther, le Jagdtiger étaient, tous, répertoriés Sturmgeschutz et n'étaient devenus des Panzerjäger qu'après leur versement dans les unités de Panzerjäger. Au départ, les personnels chargés de mettre en œuvre les Ferdinands étaient, tous, issus de la Sturmartillerie, avant que Guderian ne fasse des pieds et des mains pour se les faire attribuer ; les "artilleurs" seront, alors, versés, avec armes et bagages, dans la s.Heeres-Panzer-Jäger-Abteilung 653... la même unité s'en allant, à l'été 1944, prendre en main un autre (nouveau) StuG, le Jagdtiger!
Le Jagdpanther avait été, initialement, conçu pour succéder au StuG.III, au sein des Heeres- StuG-Abteilungen... mais, là, aussi, Guderian passera par là! ...Alors que, en 1939, le lascar était l'opposant le plus virulent au StuG, qu'il considérait comme de l'argent foutu en l'air, au détriment des Panzer!
3) A dater de la mise en fabrication de la première série de StuG.III Ausf.A, en janvier 1940 et jusqu'à celle des StuG.III Ausf.F (armés du 7,5 cm lang), en mars 1942, tous les modèles successifs seront, très officiellement, désignés 1./s.Pak, 2. /s.Pak, etc. ,
s.Pak pour
schwere Panzerabwehrkanone, canon antichar lourd, au cas où vous auriez, encore, un doute sur le rôle antichar , confié au StuG, dès sa conception.