Borovic a écrit:Re,
La politique ! ... bien sûr, elle était d'actualité en mars 36 ( on sait pourquoi ) : combien de rencontres, de dépêches, de rapport secrets Beck, Noël, Flandin, Kennard, Paternotte ect, ect ; mais il est plus parlant d'exposer des plans d'action préparés par les militaires (SR concerné). Et pour la France, il n'est pas simple d'admettre son manque de réactivité devant le "casus foederis" présenté par Beck (agression des français en Rhénanie).
Bien avant Munich, la première capitulation française !
Cordialement
A lire les notes de Gauché :
.... "Le Deuxième Bureau au travail (1935-1940) Paris 1953
Article rédigé par Alexandra Wiatteau,
Date de la mise en ligne: juin 2005 sur le site de l'auteur :
http://www.diploweb.com/forum/pilsduski.htmIl s'agirait d'un projet de 1933.
Source :
http://www.diploweb.com/forum/pilsduski.htm (Extrait)
IV. La quatrième initiative du Maréchal Pilsudski se heurta au refus français de destituer Hitler en 1933
Précurseur du « droit d’ingérence » et de la « guerre préventive », Pilsudski aurait-il pu prévenir l’expansion nazie et la guerre avec ses génocides?
Assistant à la montée de deux totalitarismes criminels, soviétique, puis nazi en Europe, Pilsudski a tenté dès 1933 de prévenir la catastrophe qu’il percevait clairement. Pragmatique, préoccupé par son pays et par l’Europe, l’homme d’Etat polonais avait essayé, dès Rapallo, Locarno, la montée en puissance de la Russie et de l’Allemagne, de prévenir les dirigeants des démocraties occidentales, ses alliés, et de les faire réagir. Ce fut sa quatrième grande idée, qui ne put être réalisée, de « guerre préventive » contre Hitler et le parti nazi à leur avènement au pouvoir à Berlin. Si Paris avait suivi Varsovie, cela aurait-il épargné la tragédie de la guerre, et donc de la Shoah.
Lorsque Paris et Londres firent la sourde oreille, alors seulement Pilsudski décida de mettre la Pologne à l’abri en concluant des accords de non-agression avec l’URSS et l’Allemagne. A l’époque, Pilsudski était déchiré, car il ne voyait pour la Pologne de bonne alliance qu’avec la France. Mais, celle-ci avait refusé l’action préventive et s’affaiblissait dans l’arène internationale, dominée par la diplomatie allemande de la force et celle de la SDN, toute tournée vers la « conciliation ». Une conciliation impossible avec l’idéologue du « Mein Kampf » aux visées agressives, destructrices et criminogènes.
Cela générait des incohérences : « Il faut que les Etats soient substantiellement désarmés pour que les sentences arbitrales s’imposent, pour que les sanctions politiques contraignent… », dira Léon Blum à la SDN en juillet 1935, mais Yvon Delbos avait dit en juin que les sanctions militaires en cas d’agression ne seraient obligatoires « que pour les Etats directement intéressés au conflit en vertu de leur situation politique, ou géographique, les autres Etats sociétaires n’étant tenus qu’aux sanctions d’ordre économique ou financier ». (cf. Pierre Brossolette, « Conception française du « règlement général » de la paix en Europe » in Politique étrangère, n°1, février 1937, Paris). Belle assurance pour les pays agressés, au préalable désarmés ! Belle assurance pour la Pologne ! Les Français, dans des entretiens officieux, expliquaient aux Polonais que leurs armées ne se battraient pas pour « je ne sais quel couloir polonais », avis partagé par plusieurs éminents politiques et hommes d’Etat de la France. (Cf. Piotr Wandycz, « Trzy dokumenty » (Trois documents), in Zeszyty Historyczne, Paris, 1963)
Voilà pourquoi Pilsudski craignait tant , avant sa mort, le 12 mai 1935, l’inaction de la France. Il craignait, non seulement pour la Pologne, mais aussi pour la France une guerre avec l’Allemagne. Car, disait-il, « la France ne gagnera pas cette guerre », puisqu’elle avait permis la montée d’un régime fou qui réarma l’Allemagne et, déjà après la mort de Pilsudski, occupa la zone démilitarisée de la Rhénanie, sans que la France ne bougeât, en dépit, une fois de plus, de l’assurance officielle de l’appui polonais. (cf. Alexandra Viatteau, « L’Apport de la Pologne aux 20 ans de paix entre les deux guerres, 1919-1939 » , op. cit.).
Léon Blum donne raison à Pilsudski après la guerreOn juge les grands esprits politiques sur leur capacité de prévision et de décision au moment opportun. Pilsudski avait sans doute eu raison de proposer en 1933 la « guerre préventive » contre Hitler. Après la Seconde Guerre mondiale des Français lui donnèrent raison : « Il semble qu’il (Pilsudski) ait compris qu’il fallait étouffer ce danger (nazi), l’écraser dans l’œuf avant qu’il ne devînt trop redoutable, et qu’il ait voulu , en créant de toutes pièces un incident (le 13 mars 1933 à Gdansk - AV) éprouver l’esprit politique et la résolution des alliés » ( Cf. Ibidem et A. François-Poncet, « Souvenirs d’une ambassade à Berlin, septembre 1931-octobre 1938 », Paris, 1946).
On retrouve le même hommage dans la déposition de Léon Blum : « A mon avis, il existait un moyen peut-être unique de prévenir la guerre de 1939. Ce moyen consistait à pratiquer, dès la prise de pouvoir par Hitler, une opération préventive… Je pense aujourd’hui, en mon âme et conscience, que l’Angleterre et la France, la Pologne se joignant à elles, auraient pu et dû pratiquer une opération dès 1933… Si nous avions, à cette époque, les autres partis socialistes et nous, que l’on traitait chaque jour comme des pacifistes bêlants et parfois comme les avocats de l’Allemagne, si nous avions proposé d’interdire par la force l’installation en Allemagne du gouvernement nazi, je crois que nous aurions pu entraîner avec nous l’opinion publique de la majorité des Parlements » (Cf. A. Viatteau, ibidem et « la déposition de Léon Blum devant la Commission sur les événements de 1933 à 1945 », « Le Figaro », 27.12.1951, Paris) .
La proposition d’une opération préventive franco-polonaise avait été faite secrètement par plusieurs canaux officieux et officiels à la fois. La réponse de la France fut que la convention franco-polonaise était défensive et non offensive, et que la société française ne tolérerait pas d’action franco-polonaise contre Monsieur Hitler. En quoi devait consister l’action ? Pilsudski prend trois initiatives simultanées :
. 1) il concentre des troupes polonaises en Poméranie et autour de la Prusse orientale ;
2) . 2) il demande qu’une commission internationale examine l’état des armements secrets allemands, réalisés en infraction au Traité de Versailles ;
3) . 3) il suggère qu’en cas de refus de l’Allemagne d’autoriser l’examen de son potentiel militaire, l’armée française occupe la Rhénanie et l’armée polonaise la Prusse orientale et la Silésie.
C’est cela que l’on appelle la « guerre préventive ». (cf. Alexandra Viatteau, « 1933 – 2003 : La « guerre préventive selon Varsovie et Washington », 7.12.2003, www. diploweb.com Classiques de Science politique (rubrique de A.Viatteau) ; cf. aussi Waclaw Jedrzejewicz, « The Polish Plan for a « Preventive War » against Germany in 1933 », New York , éd. The Polish Review, 1966).
Les raisons françaises du refus de l’action préventive contre Hitler et les raisons polonaises de sécurité nationale
C’est lorsque le gouvernement français ne donna même pas de réponse à la proposition polonaise de former une commission de contrôle des armements allemands, et qu’il ignora le danger potentiel d’agression de la part d’une Allemagne dirigée par un psychopathe, que Pilsudski fit volte-face. Il ordonna que l’on sonde les possibilités de détente avec l’Allemagne pour reculer le « court-circuit » jusqu’au jour où le conflit germano-polonais prendrait une signification internationale concernant « politiquement et géographiquement » des alliés , qui respecteraient alors leur alliance et leurs engagements pour leur propre sécurité. Jusque-là, une analyse du Quai d’Orsay de 1930, mais toujours suivie par Paris au moment de la signature de l’accord germano-polonais du 26 janvier 1934, fixait la marche à suivre : une note confidentielle française établissait que: « Tant que la notion de l’agression n’aura pas été exactement définie en droit international, et pour peu que les conditions dans lesquelles le conflit armé se sera déclaré, prêtent à discussion, il faut s’attendre à ce que certains Etats se dérobent aux obligations assumées par eux en vertu de l’article 16 du pacte de la Société des Nations, ou en profitent même pour intervenir dans le conflit au mieux de leur intérêt politique.
L’Allemagne elle-même ne manquerait pas, si la France se portait au secours de la Pologne et si la majorité du Conseil s’était prononcée, ou se prononçait après coup, en sa faveur, d’invoquer à son profit le pacte de Locarno, en accusant à son tour la France d’agression, et en demandant contre elle l’intervention des puissances garantes du pacte. La France pourrait alors se trouver dans une situation délicate, dont la perspective est de nature à influer sur les décisions de son gouvernement lorsqu’il aura à INTERPRETER (souligné dans le texte - AV) et à exécuter les engagements contractés vis à vis de la Pologne » (cf. Note intitulée à la main « EMA 2 » du 9.10.1930, annotée à la main : « de l’éventualité d’un conflit armé germano-polonais in A. Viatteau, « L’apport de la Pologne aux 20 ans de paix… » , op. cit.).
Miné par tout cela, Pilsudski parlait jusque sur son lit de mort de la France qui le décevait. Il craignait pour la Pologne, pour l’épreuve qui attendait ses successeurs dans une conjoncture politique et diplomatique défavorable. Il craignait pour la déconsidération de la Pologne que finiraient par provoquer ses adversaires, de droite et de gauche, à force de le haïr et de le déconsidérer, lui, notamment à Paris. Mais, déconsidération que provoqueraient aussi ses partisans, s’ils n’étaient pas à la hauteur d’une situation impossible.