La hantise des sabotages : entre légende et réalité
L’interdiction du parti communiste après la signature du pacte germano-soviétique d’août 1939 touchera également l’industrie aéronautique, même si les sabotages ont été en définitive peu nombreux, contrairement à une croyance très répandue dans ce contexte et sur le moment. Dans l’armée de l’Air, toutes les malfaçons, déficiences et pannes sont mises assez systématiquement et de manière récurrente sur le compte des « sabotages » communistes, mais on sait aujourd’hui qu’ils ont été extrêmement peu nombreux et n’ont eu qu’un effet tout à fait marginal sur la production d’armements et d’équipements militaires, comparés aux problèmes économiques et industriels d’équipement et de coordination (relations entre métallurgistes généralistes et fabricants spécialisés, entre ceux-ci et leurs nombreux sous-traitants, sans même parler du perfectionnisme des services techniques de l’armée, etc.).
Dans le contexte social de l’époque, la peur de la « subversion communiste » a constitué une véritable hantise, voire une psychose. Mais, en définitive, d’une part, il n’est pas établi avec certitude que la direction du parti ait même véritablement donné des consignes en ce sens et, d’autre part, si l’abrogation très large des 40 heures dans les industries travaillant pour la défense nationale a alimenté un mécontentement ouvrier indéniable et engendré des pratiques de freinage volontaire de la production (et ce d’autant plus que les heures supplémentaires étaient lourdement taxées), la surveillance a été étroite et la répression constante. Aussi on ne relève que des actions isolées, de faible ampleur et n’ayant eu pratiquement aucun effet sur la production de guerre20.
En ce domaine, nul n’est besoin de faire nécessairement appel à des considérations ou des arrière-pensées politiques pour prétendre expliquer la fréquence relative des malfaçons observées. Le réarmement massif et précipité de 1938-1940 s’est heurté à des contraintes structurelles dans le domaine de la production en masse et de la main-d’œuvre : qualité parfois médiocre des aciers spéciaux français qui ne constituent pour les métallurgistes qu’un marché relativement marginal et faiblement rentable, nécessité d’embaucher une main-d’œuvre non spécialisée et sans formation professionnelle (jeunes, femmes, travailleurs étrangers maîtrisant mal le français) pour faire face à l’accroissement des commandes, sous-encadrement des ateliers, faiblesse des contrôles de production pour ces mêmes raisons, augmentation importante des horaires quotidiens de travail (jusqu’à 12 heures par jour en 1940, temps de transport non compris) qui n’entraîne pas une croissance mécanique de la productivité et de la production, précipitation croissante des livraisons sans que toutes les vérifications nécessaires soient effectuées, etc.
Même s’il est impossible d’en mesurer très précisément les effets, l’augmentation quantitative énorme de la production en un temps très limité (de quelques petites centaines d’avions par an à plusieurs centaines d’avions par mois) est le résultat d’une transformation radicale des conditions de production et de travail, et elle s’est parfois accompagnée de problèmes qualitatifs qui n’en sont que la conséquence.
François Delpla a écrit:
Ce que je connais de moins mauvais reste le chapitre de Crémieux-Brilhac (1990) montrant qu'en tout état de cause les sabotages ont été rares et localisés.
Ce qui exclut une consigne centrale et générale de la direction française et, à plus forte raison, soviétique !
Darlan a écrit:Nous sommes en train de nager dans le politiquement correct.
Darlan a écrit: Il y a une grande différence entre un pacte de non agression et un traité d'alliance. Si Staline a préféré le 1er c'est qu'il a toujours voulu envahir l'Allemagne mais que son armée n'était pas prête (purges, mauvaise organisation des forces armées depuis la disgrâce de Trotski, équipement obsolète ). Les soviétiques n'étaient pas "neutralisés" par Berlin. Ils appliquaient seulement une stratégie conforme à leur idéologie. Ils considérait la France comme une grande puissance et ne pouvait pas imaginer qu'elle serait balayée en 6 semaines. Pour eux la France pouvait vaincre l'Allemagne et après être au coeur d'une coalition pour attaquer l'URSS. C'est surtout pour éviter cela qu'il y eut des consignes de sabotage. Il faut prendre du recul et avoir une vision géopolitique
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