En novembre 1936 se réfugiait à Paris une républicaine espagnole de centre gauche, ayant rempli des fonctions importantes dans le régime, en un sens très opposé aux traditions de la droite catholique, notamment par l'établissement du divorce. Elle publiait alors un jugement sur les événements d'Espagne, bien oublié aujourd'hui.
Ayant fuit Madrid où sa vie, comme celle de beaucoup de républicains non collectivistes, était en danger, elle écrivait :
"On a qualifié le soulèvement, dès le début, de "coup d'Etat Fasciste". il convient cependant de ne pas se laisser tromper par des idées fausses qui simplifient par trop ce problème compliqué [...] fascisme contre démocratie ? Non, la question n'est pas si simple. Ce ne sont ni le fascisme pur, ni la démocratie pure qui constituent la flamme animatrice des deux combattants. La confusion qui règne dans l'opinion de tous les pays penchés avec intérêt ou avec angoisse sur notre effroyable drame national, confusion qui risque de tromper tout le monde, vient de cette sommaire stylisation des mobiles de la lutte"
Cette républicaine espagnole s'appelait Clara Campoamor. Député radical aux Cortes constituantes de 1931, elle avait été nommée en 1933 directrice générale de l'Assistance Publique, puis déléguée de la République Espagnole à la SDN et à l'union interparlementaire. Sa dénonciation de la "sommaire stylisation de mobiles de la lutte" est donc d'un grand poids .
Dans son livre "La Révolution espagnole vue par une républicaine" (Plon, Paris 1937) où parut ce témoignage, elle rappelle d'ailleurs que le "Gouvernement républicain, par l'organe de son interprète qualifié, M. Indalecio Prieto, avait lui-même appelé à rejeter les idées simplistes sur le soulèvement qui venait de se produire". Dans le troisième de ses discours prononcé à la radio et reproduit dans un article de fond du "Madrid Informaciones", le chef socialiste Prieto avait parlé en effet "du mouvement insurrectionnel étendu et complexe, dont le but et la portée nous sont totalement inconnus".