Post Numéro: 10 de carcajou 18 Mar 2013, 14:56
Journal de Montréal
17 mars 2013
Karine Vilder
Les origines du mal
`` Depuis une bonne vingtaine d'années, l'historien britannique Laurence Rees essaie de comprendre comment un individu aussi associal qu'Adolf Hitler a pu soulever les masses. S'appuyant sur des documents totalement inédits, il nous offre aujourd'hui Adolf Hitler- La séduction du diable, un ouvrage qui démystifie brillament les heures les plus sombres de son règne.
En 1913, rien ne laissait supposer qu'Adolf Hitler deviendrait un jour chef d'État ou qu'il serait adulé par des millions d'Allemands. À 24 ans, après avoir été recalé pour la deuxième fois à l'examen d'entrée de l'Académie des Beaux-Arts de Vienne, Hitler tirait en effet le diable par la queue en essayant de vendre ses piètres aquarelles à des touristes de passage à Munich. Avec sa mine patibulaire, sa drôle de petite moustache, ses dents jaunes et ses vêtements miteux, il devait en fait surtout leur faire peur ! Mais si son aspect extérieur était indéniablement rebutant, son étrange caractère l'était tout autant. À la fois intolérant et renfermé, Hitler manquait carrément d'entregent. Il était foncièrement antipathique et les quelques colocataires qui ont eu le malheur de partager son quotidien ajoutent qu'il .tait également mortellement ennuyeux, chaque conversation débouchant systématiquement sur d'interminables monologues souvent haineux.
Reste à savoir comment un homme aussi moche, bizarre et désagréable a pu réussir, au cours des années suivantes, à charmer tout un peuple et parvenir à lui faire faire à peu près n'importe quoi...
Des témoignages choquants
Soixante-huit ans après le suicide de ce despote sanguinaire qui a entre autre déclenché la Seconde Guerre mondiale et décimé près de deux tiers de la population juive européenne, l'ancien directeur de la chaine Histoire de la BBC répond enfin à cette question dans Adolf Hitler-La séduction du diable.
Ayant produit de nombreux documentaires télé portant sur les nazis, Laurence Rees a effectivement la chance de pouvoir interviewer des centaines de personnes qui ont jadis côtoyer Hitler de près ou de loin. ``En 1989, après la chute du mur de Berlin, j'ai été l'un des premiers journalistes à parler de nazisme avec des gens qui ont vécu de l'autre côté du Rideau de fer, nous a-t-il confié au début de la semaine lors d'une longue entrevue téléphonique. On pouvait difficilement imaginer mieux côté timing, car la plupart d'entre eux étaient alors dans la soixantaine, un âge intéressant surtout pour les hommes. Étant à la retraite, ils se montraient plus disposés à regarder en arrière et à donner un sens à leur passé, chose qu'ils auraient hésité à faire dix ans plus tôt de peur de perdre leur travail. J'aurais cependant pensé qu'ils refuseraient d'être interrogés par la BBC, la voix de leur ennemi... Curieusement, ils n'y ont vu aucun inconvénient, leurs ennemis étant essentiellement les communistes...``
Pendant près d'une vingtaine d'année, laurence Rees en a ainsi entendu des vertes et des pas mûres.`Mais ce qui m'a surpris le plus, c'est de constater que même ceux qui avaient activement pris part à l'holocauste n'étaient que très rarement désolés ou tourmentés par les remords. Ils se sentaient plutôt incompris et ils avaient endance à dire:`` Je l'ai fait parce que j'estimais que c'était la bonne chose à faire.`` ``D'ailleurs, à Auschwitz, pas un seul SS n'a été sanctionné parce qu'il refusait d'obéir aux ordres...``
En fait, Hitler n'avait qu'à demander pour obtenir. Et non, jamais ses sujets n'ont agi sous hypnose ! La clé de son pouvoir ? Un surprenant ``charisme``, une machine de propagande extrêmement bien rodée et un climat de défiance hélas propice à l'élection d'un chef affichant une confiance en soi absolue.
Un Fuhrer qui fait fureur
Mais avant d'aller plus loin, il faut se remettre dans le contexte. Car au lendemain de la Première Guerre mondiale, la population allemande n'en menait vraiment pas large. En plus de subir l'humiliation de sa cuisante défaite militaire, elle a tour à tour assisté au renversement du Kaiser Guillaume II et à la naissance de la République de Weimar- ce qui a soulevé bien des révoltes-, elle a été contrainte de verser aux vainqueurs plus de 220 milliards de marks or, elle a été touchée par l'hyperinflation- pour acheter un pain, il fallait allonger plusieurs miliards de marks !- et, comme si ce n'était pas assez, elle vivait constamment dans la crainte d'une révolution communiste.
C'est là qu'entre en scène Adol Hitler, dont les surprenants talents d'orateur ne tarderont pas à enflammer les foules. En proposant à tous ces gens désespérés de fonder une nouvelle Allemagne et en accusant les Juifs d'être à l'origine de leurs misérables conditions de vie, Hitler sera en effet rapidement percu comme un véritable sauveur.``La plus grande qualité d'Hitler était d'être sur de tout, explique Laurence Rees. Alors que la majorité des Allemands vivaient dans le doute et la peur, Hitler n'hésitait pas à leur seriner sur tous les tons:``Je sais exactement quoi faire pour vous sortir de ce marasme et je sais exactement qui blâmer pour toutes ces complications. Si vous faites ce que je dis, tout se passera bien.`` Et ce qui est le plus effrayant dans cette histoire, c'est que les gens l'ont cru au lieu de résister...``
Faute d'espace, on est obligé de s'arrêter là. Mais pour en s'avoir plus, on recommande vivement la lecture de Adolf Hitler- La séduction du diable, qui explique en détail la montée du nazisme et la facon dont Hitler a pu se hisser à la tête du IIIe Reich.``
Le Journal de Montréal. livres. dimanche 17 mars 2013. p.50.
``Aucun ``fils de p...``n'a jamais gagné une guerre en mourrant pour son pays. On gagne une guerre en faisant ce qu'il faut pour que ``le fils de p...`` d'en face meure pour son pays``. ( No son of a bitch ever won a war by dying for his country, you win a war by making what it needs so that the son of a bitch in front of you die for his country).- G.Patton.