Bonjour
Dans ce livre
http://www.flickr.com/photos/mlq/3383942511/sur Basly, il y a ceci:
Dans la matinée du 6 juin, le doyen des maires du Calvados, M. Boitard, premier magistrat de Thaon, que les bombardements de la nuit n'avaient pas ému outre mesure, décida de se rendre à la perception de Courseulles pour les besoins de son administration communale.
Lorsqu'il traversa le village de Basly, des habitants, mieux informés que lui, se firent un devoir de l'instruire de la présence d'une force canadienne stationnée au lieudit «Saint-Ursin », à l'emplacement d'un ancien village gallo-romain qui s’élevait à cette époque lointaine en un lieu situé entre Bény-sur-Mer et Courseulles.
A cette nouvelle, le maire de Thaon bondit de joie et poursuivit prestement son chemin, sans accorder la moindre attention aux conseils de prudence qu'on lui prodiguait, n’ayant qu'un désir: aller au-devant des libérateurs!
Quelques instants après le passage de M. Boitard, un sous-officier allemand se présente au domicile du maire de Basly, M. Leboucher, et, sur un ton autoritaire, lui dit:
- Monsieur le Maire, donnez-moi la clé de votre église.
- Je ne l'ai pas en ma possession, répond M. Leboucher.
- Alors où est-elle ?
- Chez le sacristain.
- Fort bien, conduisez-moi près de lui. Je veux cette clé dès maintenant.
Mis en possession de l'objet convoité, le feldwebel oblige le maire à ouvrir la porte de l'église et à faire avec lui l'ascension du campanile. Deux soldats suivent leur chef, porteurs d'un matériel volumineux et paraissant très lourd.
Parvenu dans le clocher, le sous-officier cherche vainement à voir Bény. M. Leboucher, qui avait deviné son intention, lui fait remarquer, non sans une certaine ironie, qu'il ne peut observer de cet endroit le lieu qui semble l'intéresser, celui-ci se trouvant dans l'axe des murs formant l'un des angles de la tour.
Sans trop extérioriser son dépit, l'Allemand donne l'ordre à ses subordonnés de disposer, selon ses instructions, le matériel qu'ils détiennent. Le maire supposera qu'il s'agissait d'un appareil de radio car il ne le vit pas, ayant mis à profit le déballage des objets pour s'esquiver discrètement.
Au début de l'après-midi, les éléments avancés de l'armée canadienne firent leur apparition dans le village; les Allemands s'enfuirent à leur approche, d'autres furent contraints de se retirer peu après leur arrivée.
Le lendemain, à midi, le 14e régiment de campagne, appuyait la 9e brigade, commençait à quitter l'emplacement qu'il occupait depuis la veille, au nord de Bény-sur-Mer, pour s'établir sur un nouveau point, au sud-est de Basly, les batteries avançant «par bonds >, les unes après les autres, afin d'assurer un soutien ininterrompu.
Ce fut également près de Basly que l'on installa le quartier général de la 9e brigade.
L'église de Basly
Le 8 juin, le lieutenant qui commandait la troupe canadienne cantonnée à Basly engagea avec le maire le dialogue suivant:
- Vos habitants tirent sur mes hommes, écoutez plutôt ...
- Mon lieutenant, vous faites erreur, rétorqua M. Leboucher, je réponds des sentiments de mes administrés, pas un seul ne tirerait sur ses libérateurs et, qui plus est, tous les fusils de chasse de ma commune ont été confisqués par l'ennemi, dès les premiers jours de l'occupation. Les coups de feu que vous entendez sont ceux que vos propres soldats tirent, au hasard ...
L'officier insiste:
- Il Y a certainement des Allemands cachés dans l'église. Je vais la faire sauter!
- Je suis certain qu'il n'y a aucun Allemand dans l'église, tous ont évacué ma commune, et si vous détruisiez notre vieille église paroissiale, vous commettriez une faute extrêmement grave que la population de Basly ne vous pardonnerait jamais. Avant d'en venir à une telle extrémité, prenez au moins la peine de venir la visiter: je suis prêt à vous accompagner et même à y pénétrer le premier.
Pendant que le lieutenant et le maire soutenaient cette discussion fort animée, les Canadiens perquisitionnaient dans toutes les maisons et, bien entendu, n'y découvraient aucune trace des Allemands.
Ainsi qu'il l'avait proposé, le maire entraîna vers son église l'officier suivi de quelques soldats. Le monument ne recelait âme qui vive. Tout à coup, alors qu'ils se trouvaient à l'extrémité de la nef, les soldats, sans motif apparent ouvrirent le feu !
Un conducteur de char, qui passait à ce moment précis sur la place du village, entendant le mitraillage, crut à une salve tirée par des Allemands, du haut du clocher. Il fit alors stopper son tank et pivoter sa tourelle, puis il envoya cinq obus de 105 mm dans le beau campanile qui s'effondra ...
Rendus nerveux par cet incident, et voulant à tout prix découvrir des adversaires dans la population - qui ne demandait qu'à leur témoigner sa gratitude et son amitié -, les soldats se saisissent de quelques jeunes gens, déclarant qu'ils étaient pour eux des otages et qu'ils allaient être internés en Angleterre. Sous bonne escorte, les «captifs» furent conduits à Bernières-sur-Mer, où ils furent libérés peu après leur arrivée.
C'est alors que se répandit un bruit selon lequel les Canadiens avaient bel et bien essuyé des coups de feu .après avoir libéré Basly, mais que ceux-ci auraient été tirés /non pas par les villageois, mais par des Allemands revêtus d’habits féminins. A notre connaissance, aucune preuve de ce travestissement n'a été apportée.
Nouvelle prise d'otages
Le 6 juin, quelques instants après la délivrance de sa commune, M. Leboucher accomplit une reconnaissance en direction de Fontaine-Henry. En cours de route, il rencontra des Allemands qu'il avait connus lorsqu'ils occupaient sa commune. Il entra en conversation avec eux et apprit que, de leur côté, ils gardaient en otages quelques jeunes hommes du pays. Dissimulant l'émotion qu'il éprouvait, le maire de Basly parla des événements de la journée, puis, après de longues circonlocutions, aborda benoîtement, en bon Normand, la question des otages. Il se porta garant de leur caractère inoffensif et fut assez habile pour obtenir leur élargissement immédiat. Poursuivant l'entretien, il dit aux soldats d'Hitler:
- Savez-vous que les Canadiens ont conquis toute la région? Vous êtes maintenant encerclés et votre intérêt vous commande de vous rendre à eux lorsqu'ils arriveront à Fontaine-Henry, plutôt que de vous faire massacrer inutilement.
Ces Allemands suivirent le conseil de M. Leboucher et, lorsque les premiers Canadiens furent en vue, ils se laissèrent capturer sans combat.
Quelques semaines plus tard, le maire de Basly reçut la visite d'un Canadien qu'il ne reconnut pas tout d'abord, tellement son visage était amaigri.
Le soldat lui déclara: - Je suis l'un de ceux qui ont ouvert le feu dans l'église, à vos côtés.
Et il ajouta:
- Le lieutenant qui nous commandait, lorsque nous avons effectué cette perquisition, est tombé aux environs de Caen.