Post Numéro: 13 de Barbu 03 Juin 2010, 22:07
Bonsoir. C'est parti! Le texte que je recopie est un article de Christian Mouly parut dans la revue Résistance R4 N° 7 de mars 1979.
Un buste de pierre blanche des Charentes, érigé un dimanche d'automne dans la cours d'honneur d'un établissement scolaire, un groupe d'amis fleurissant régulièrement une tombe grise au cimetière de Terre-Clabade, à Toulouse, ou une plaque scellée sur sa maison natale à Cahors, autant de symboles qui, en perpétuant encore le souvenir d'une héroïnede la Résistance, laisseraient penser que tout a été dit, et définitivement, sur la vie de Marie-Louise Dissard.
Pour cette héroïne, aujourd'hui consacrée, il semble que, comme pour bien d'autres plus obscures ou plus glorienses, le temps se soit chargé d'en pétrifier le souvenir.
Et si peu de personnes peuvent encore, à ceux qui veulent modestement rassembler des instants de sa vie, fournir des documents ou des témoignages, est-ce le signeque la mémoire disparaitra des hommes sous l'effet de je ne sais quelle érosion inulectable?
Aujourd'hui, où les anciens bourreauxet leurs complices sont curieusement amnésiques, il est réconfortant de constater que ceux qui ont combattus le nazisme n'ont pas de trou de mémoire. Nous avons pu ainsi recueillir l'essentiel de sa vie, en puisant dans les archives des "Amis de Françoise" et en écoutant le témoignage de quelques amis qui l'ont approchée.
Son enfance et sa vie à Toulouse
Après la naissance de Marie-Louise, le 6 novembre 1881, à Cahors, la famille Dissart s'installe quelque années plus tard à Toulouse. Nous ne savons rien de l'enfance de la petite fille, si ce n'est qu'elle poursuit une scolarité normale. Adolescente, elle manifeste des dons pour la couture, la broderie et la dentelle et, sur les conseils d'un oncle, professeur aux Beau-Arts, décide de s'initier au dessin et à la peinture.
Les moeurs de ce début de siècle n'accordent pas encore à la femme l'indépendance et la liberté qui marqueront la période d'entre deux guerres. Ce n'est donc qu'en 1913 qu'elle décide d'occuper un poste de secrétaire à la mairie de Toulouse et, en 1917, choisit l'enseignement où elle exerce dans une école de la rue des Chalets. Il nous reste de son passage à la mairie de Toulouse ou à l'école de la rue des Chaletsdiverse anecdotes qui illustrent déjà sa fascinante personnalité. Par sa gaieté, son exubérance et sa grande bonté, elle gagne l'estimede ses collègues et de toutes ses élèves.
Mais l'enseignement et bientôt la charge d'inpectrice de couture dans les écoles de la ville deviennent des occupations astreignante. Désirant un peu plus d'indépendance, elle ouvre un commerce que l'on dénommait à l'époque" "magasin de frivolités femminines", rue de la Pomme, à l'enseigne de "A la poupée moderne". En quelques mois, cela devint le lieu de rendez-vous des élégantes bourgeoises ou artistes dont elle réalisait les costumes de scène, dessinant, coupant et confectionnant elle-même des modèles exclusifs. Ses anciennes élèves lui restent fidèles. Le Théatre du Capitole lui passe des commandes. Cest la période où elle rencontre Gerber alors qu'il triomphait sur scène dans les rôles de ténor.
Peu de témoignages nous sont parvenus de son existance durant ces années-là. Il ne fait aucun doute qu'elle a dû rester diponible et dévouée à ses amis, mettant plus d'acharnement à rendre service qu'à réaliser des bénéfices.
Nous la retrouvons quelques années plustard, alors qu'elle partage son logement avec son neveu, le commandant Bouttin, officier d'état-major. A la déclaration de guerre, il doit rejoindre son unité engagée sur le front. Il est fait prisonnier en 1940.
Marie-Louise se retrouve seule. Comme tous les Français, elle apprend la défaite, l'avance des troupes allemandes, l'armistice. De Gaulle lance, de Londres, l'appel historique...
En fêtant, le 5 novembre 1940, ses 59 ans, Marie-Louise Dissart sait déjà qu'elle a choisi de refuser l'humiliation et de prendre une part active à la Résistance(1).