Bonjour,
J'essaye de rassembler les souvenirs de mon grand père prisonnier à Rawa Ruska. Il est aujourd'hui agé de 95 ans. Il s'appelle Albert Oreste Dominique Quaglio né à Turin en Italie en 1915. Il est venu en France avec son père. Il part faire son service à Strasbourg, de 1935-1939, il est clarinettiste et saxophoniste. En 1939 il est libéré mais rappelé aussitôt car la guerre est déclarée. Il rejoint son bataillon à Strasbourg est fait parti des premiers prisonniers de guerre. Il est alors envoyé en camps de travail, de son périple j'ai quelques noms Bad Nauheim, Dessau-Roßlau, Teplice, Berlin, Luckenwalde, Kostrzyn, Wroclaw, Auschwitz-Birkenau, Kielce, cernobyle, Nesterov, Rawa Ruska. Il a fait de multiples tentatives d'évasion dont une qui a duré 430 kms pour se terminer sur Berlin. Rawa Ruska reste bien évidemment la pire de ses expériences. Il raconte qu'à son arrivée un officier a demandé quelque chose en allemand il a répondu. Alors il a braqué son pistolet sur lui en demandant comment se fait il qu'il parle allemand. Mon grand père a répondu qu'il avait appris comme ça. Il lui a demandé ce qu'il faisait dans la vie. Mon grand père a répondu peintre. Il lui a dit qu'il était un artiste alors. Mon grand père a simplement répondu non je suis peintre en bâtiment et vitrier. Alors il a été envoyé dans des usines immenses dans les carpates où il a apprit aux personnes qui travaillaient là bas comment vitrer des vasistas. Il raconte l'horreur de Rawa Ruska . D'immenses silos à pomme de terre, de la nourriture avariée, il raconte des - 50° ou la peau reste accrochée aux métal qu'ils manipulent. Il raconte les blocs de glace qu'ils cassent pour les mettre sous la terre pour les conserver pour l'été, l'eau des marais qu'ils vont chercher avec une perche pour boire un petit peu, le froid, des semblants de sabots (des planches de 30 cm qu'ils font tenir aux pieds avec des sortes de tissus je pense, le peu de papier qu'ils arrivent à mettre sous la chemise pour s'isoler. Il raconte aussi des fosses de cadavres et ses journées au trou un sol et rien d'autre. La nourriture que les allemands fabriquaient avec la sciure de bois, il parle beauoup de chimie, de leurs connaissances dans ce domaine. Les allemands qui maintiennent les baraquements ouverts la journée. Les traductions qu'il fait entre les prisonniers et les allemands tout en sachant que certains allemands comprennent parfaitement le français. Les ordres donnés d'un coup aux miradors pour tirer dans le tas sans autre raison que de tuer. Il raconte aussi qu'il a été emmené comme PanzerJäger et où il a reçu un éclat d'obus dans le pied puis à la tête lors d'un bombardement à Berlin.
J'aimerais pouvoir rassembler tous ces souvenirs avec un peu de cohérence alors merci d'avance à toutes les personnes qui d'une part sauront me donner des indications chronologiques et historiques (Il me parle pafois des fosses de Kathyn mais je n'arrive pas à savoir si il y était où si il s'agit d'une histoire qu'il a entendu, d'une information qu'il a eu après ou d'un vécu), et un merci aux personnes qui sauront me donner des clefs pour arriver à parler avec lui. Je ne suis certaine que d'une chose c'est qu'il a une très bonne mémoire, même si sur le plan chronologique ce n'est pas toujours clair, et qu'il ne regarde aucun livre, ni aucun documentaire sur cette période, qu'il ne fait parti d'aucun groupe d'anciens combattants donc a priori ces souvenirs ne se sont pas brouillés, mais il est évident que ce n'est pas aisé de le faire parler, bien qu'en vieillissant il demande à en parler, il essaye avec ses mots mais il y a beaucoup de non dits qu'il aimerait faire sortir...
J'ai passé 35 ans à entendre ses récits, souvent toujours un peu les mêmes, sans réaliser qu'ils étaient uniques et précieux, il repète toujours faites la paix, quel que soit son prix, vous ne savez pas ce que c'est la guerre. Je crois qu'il sait mieux que personne et j'ai perdu beaucoup de temps avant de comprendre, et je voudrais lui offrir cette trace pour ses petits enfants...