Quelques précisions s'imposent :
dans le Reich, c'est le Décret du Président du Reich pour la Protection du Peuple et de l'Etat qui suspend les garanties relatives à la liberté individuelle et qui rend ainsi possible, sans la légaliser, la détention hors du cadre judiciaire. Ainsi, n'importe qui pouvait à n'importe quel moment être détenu dans un camp sans aucune justification légale = mesure anonyme.
En France, l'internement adminsitratif dans un camp était une mesure d'exception qui autorisait la détention dans le cadre judiciaire. On ne pouvait pas détenir n'importe qui à n'importe quel moment = mesure nominative.
Dans le Reich, les camps avaient pour vocation d'anéantir l'opposition politique, d'isoler les marginaux et de terroriser la population. Les internés politiques étaient mélangés à des prisonniers de droit commun et la "rééducation" passait par les mauvais traitements et l'humiliation systématique, de façon à briser toute résistance, en détruisant toute personnalité.
Daniel Bovy in Dictionnaire de la Barbarie nazie et de la Shoah a écrit:Deux singularités distinguent les camps de concentration [nazis] de toute autre forme de système pénitentiaire connu, puisqu'on leur assigne délibérément un double but original : a) déshumaniser les détenus en les anéantissant moralement et intellectuellement, b) les exterminer physiquement à plus ou moins brève échéance.
Sur les 1 650 000 détenus répertoriés dans les camps nazis (ne sont pas pris en compte ici les Juifs qui étaient exterminés dans les centres de mise à mort mais uniquement les détenus internés dans les camps de concentration), 1 100 000 environ moururent, soit les deux tiers.
En France, les camps, qui rassemblaient des personnes jugées comme "suspectes" ou "indésirables" avec pour conséquence leur mise en détention, ont accueilli environ 600 000 personnes (Républicains espagnols, réfugiés allemands, italiens, autrichiens..., communistes, résistants, juifs...) de février 1939 à mai 1946. La catégorie qui a connu le taux de mortalité le plus élevé sur tout la durée d'existence des camps est celle des civils allemands internés en 1944-45 dont le taux de décès s'élève à 30 %.
A Gurs, par exemple, du 15 mars 1939 au 1er novembre 1943, sur les 22 000 détenus, toutes nationalités et toutes confessions confondues, 3 907 Juifs furent déportés à Auschwitz via Drancy et environ 1 100 personnes moururent dans le camp des suites des épidémies et de la faim.
D'une façon comme d'une autre, et sans vouloir épargner mon pays plus qu'un autre, je pense qu'il est difficile de comparer les camps nazis et les camps français, même si ces derniers peuvent à juste titre être appelés la honte de la France....
Pour revenir à la question initiale de Major 123, on dénombre 9 camps d'internement principaux en France : Beaune-la-Rolande, Compiègne, Drancy, Gurs, Les Milles, Pithiviers, Rieucros, Rivesaltes et Le Vernet.