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Après l'opération Barbarossa, les forces de l'Axe contraignent l'URSS au repli.
Après une série de succès, l'Allemagne s'enlisera progressivement puis cédera à Stalingrad et à Koursk.
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Nouveau message Post Numéro: 11  Nouveau message de tietie007  Nouveau message 08 Oct 2008, 10:09

carlo a écrit:
tietie007 a écrit:Sur le cas des principales victimes de ces purges, à commencer par le Maréchal Toukhatchevski, il adoptait une position analogue :
"Le moment venu, de quel côté aurait-il été ? demandait-il. C'était un homme plutôt dangereux. Je doute qu'il ait été totalement de notre côté quand la situation est devenue grave, car c'était un homme de droite. Le danger de droite était celui qui était le plus grave à l'époque. Et beaucoup d'hommes de droite ne se rendaient même pas compte qu'ils l'étaient; ils l'étaient malgré eux."
(Propos tiré du livre d'Albert Resis, Molotov Remembers : Inside Kremlin Politics, Chicago, Ivan R.Dee, 1993)

L'expression de Molotov colle assez bien avec la notion des purges conçues par Staline. Fonction pédagogique ou d'exemplarité dans le cadre des procès publics, fonction de renouvellement des élites et de mise au pas des ennemis potentiels au régime, dans le cas de l'élimination de Toukhatchevski, puisque le procès fut à huis-clos. Innocent ou coupable, là n'était pas la question, l'objectif était de consacrer le primat du politique sur l'armée rouge, et notamment éliminer un Maréchal qui était d'une origine non prolétarienne, qui avait eu de nombreux contacts à l'étranger et qui avait une indépendance d'esprit qui ne correspondait pas à la servilité qu'attendait Staline. C'est ce que dit d'ailleurs Pavel Soudoplatov, un hiérarque du NKVD, à propos du militaire. Le Maréchal, en remettant en cause la compétence de Vorochilov, alors Commissaire à la Défense, créature de Staline, et incompétent notoire, avait commis un crime de lèse-majesté ...puisque dans un régime totalitaire la fidélité au Chef est bien plus importante que la compétence !


Ce passage est dans l'édition française (p.45),dans une traduction un peu différente. Ceci dit je ne vois pas très bien comment cette citation vous fait dire que Molotov "pense le Maréchal était coupable sans le savoir"? C'est vraiment une interprétation assez large de ses propos et qui me semble avoir pour seul qualité de "coller" avec votre argumentaire!
La citation de Molotov se poursuit ainsi: "Il y avait chez nous dans les années 20 une couche extrêmement mince de dirigeants du parti, et même cette couche se fissurait constamment: tantôt les droitiers, tantôt les nationalistes, tantôt l'opposition ouvrière... On peut s'étonner que Lénine ait pu résister à tout ça. Lénine est mort, eux sont tous restés et ont donné du fil à retordre à Staline. Khrouchtchev en est la preuve. Il est issu des droitiers, mais il jouait les léninistes: "Papa Staline! Nous sommes prêts à donner notre vie pour toi, on les exterminera tous!" Mais dès que l'étau s'est desseré, le vieux fond, en lui, a repris le dessus." (op.cit. p.46)
Le propos de Molotov est donc très général, il prend Toukh. comme un exemple de "droitier". A-t-il tort? Les officiers français, dont De Gaulle, qui le rencontrent à Ingolstadt, le décrivent comme un bon camarade, nationaliste russe un peu exalté. Mais je ne vais pas relancé un débat sur Toukh.
Je vous suis un peu dans ce que vous dites sur les procès, mais dites-moi, l'armée rouge n'était-elle qu'un nid d'incompétents? D'autres pays ont-ils mieux réussit à offrir dès le début des hostilités un corps d'officiers irréprochables?


Je n'ai pas dit que l'armée rouge était un nid d'incompétents, mais que Vorochilov, lui, l'était. D'ailleurs, je pense plutôt que l'armée rouge, dans les années 20 et 30, avait des théoriciens remarquables, comme Toukha, mais aussi Frounzé. Les prodromes de la Blitzkrieg existait déjà dans l'armée rouge avant qu'Hitler n'arrive au pouvoir, et certaines armes, comme les paras, ont été inventées par les officiers soviétiques.

"Et beaucoup d'hommes de droite ne se rendaient même pas compte qu'ils l'étaient; ils l'étaient malgré eux."

C'est par rapport à cette incise de Molotov que j'ai souligné que la culpabilité ou l'innocence n'était guère importante pour décider de l'élimination d'un suspect. D'un point de vue stalinien, la culpabilité n'a pas le même sens que nous l'entendons aujourd'hui. En soi, un homme issu de la petite-bourgeoisie, comme Toukha, était déjà coupable, car il ne pouvait, un jour, que reprendre la logique petite-bourgeoise de sa classe. Lénine et surtout Staline ont essentialisé les caractères de classe, qui, comme les gênes, font partie, nécessairement, de la fiche d'identité d'un homme. Le lyssenkisme ne sera que l'avatar biologique absurde de cette approche essentialiste, qui fixait à jamais les déterminismes de classe !


 

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Nouveau message Post Numéro: 12  Nouveau message de carlo  Nouveau message 08 Oct 2008, 10:55

tietie007 a écrit:
"Et beaucoup d'hommes de droite ne se rendaient même pas compte qu'ils l'étaient; ils l'étaient malgré eux."

C'est par rapport à cette incise de Molotov que j'ai souligné que la culpabilité ou l'innocence n'était guère importante pour décider de l'élimination d'un suspect. D'un point de vue stalinien, la culpabilité n'a pas le même sens que nous l'entendons aujourd'hui. En soi, un homme issu de la petite-bourgeoisie, comme Toukha, était déjà coupable, car il ne pouvait, un jour, que reprendre la logique petite-bourgeoise de sa classe. Lénine et surtout Staline ont essentialisé les caractères de classe, qui, comme les gênes, font partie, nécessairement, de la fiche d'identité d'un homme. Le lyssenkisme ne sera que l'avatar biologique absurde de cette approche essentialiste, qui fixait à jamais les déterminismes de classe !


Pourtant si Molotov commence par parler de Toukha., il finit avec Krouchtchev dont l'origine de classe est inattaquable, contrairement à celle de Molotov... Dans son esprit le problème n'est pas "génétique", mais bien politique. Quand vous dites "Lénine et surtout Staline ont essentialisé les caractères de classe, qui, comme les gênes, font partie, nécessairement, de la fiche d'identité d'un homme.", vous vous référez à une source ou citation précise?
A propos de Lyssenko, je vous conseille la lecture de l'article d'Alexei Kojevnikov, Games of Stalinist democracy, Ideological discussions in Soviet sciences 1947-52, in Sheila Fitzpatrick, Stalinism, New directions, London & New-York, 2000. Il démontre que le cas Lyssenko n'est pas aussi exemplaire qu'on l'a souvent affirmé.

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Nouveau message Post Numéro: 13  Nouveau message de tietie007  Nouveau message 09 Oct 2008, 15:16

carlo a écrit:
tietie007 a écrit:
"Et beaucoup d'hommes de droite ne se rendaient même pas compte qu'ils l'étaient; ils l'étaient malgré eux."

C'est par rapport à cette incise de Molotov que j'ai souligné que la culpabilité ou l'innocence n'était guère importante pour décider de l'élimination d'un suspect. D'un point de vue stalinien, la culpabilité n'a pas le même sens que nous l'entendons aujourd'hui. En soi, un homme issu de la petite-bourgeoisie, comme Toukha, était déjà coupable, car il ne pouvait, un jour, que reprendre la logique petite-bourgeoise de sa classe. Lénine et surtout Staline ont essentialisé les caractères de classe, qui, comme les gênes, font partie, nécessairement, de la fiche d'identité d'un homme. Le lyssenkisme ne sera que l'avatar biologique absurde de cette approche essentialiste, qui fixait à jamais les déterminismes de classe !


Pourtant si Molotov commence par parler de Toukha., il finit avec Krouchtchev dont l'origine de classe est inattaquable, contrairement à celle de Molotov... Dans son esprit le problème n'est pas "génétique", mais bien politique. Quand vous dites "Lénine et surtout Staline ont essentialisé les caractères de classe, qui, comme les gênes, font partie, nécessairement, de la fiche d'identité d'un homme.", vous vous référez à une source ou citation précise?
A propos de Lyssenko, je vous conseille la lecture de l'article d'Alexei Kojevnikov, Games of Stalinist democracy, Ideological discussions in Soviet sciences 1947-52, in Sheila Fitzpatrick, Stalinism, New directions, London & New-York, 2000. Il démontre que le cas Lyssenko n'est pas aussi exemplaire qu'on l'a souvent affirmé.


Essentialisé dans la mesure où, par définition, les anciennes classes dirigeantes sont potentiellement coupables et contre-révolutionnaires... et qu'on recherche à mettre en valeur les hommes issus de la classe ouvrière, même si c'est plus fantasmé que réel !
Sous Lénine et durant la guerre civile, on a accepté les techniciens issus de l'ancienne classe privilégiée pour des raisons pratiques, lorsque Staline prend le pouvoir, ces techniciens sont menacés, car issus de cette même classe privilégiée, sous le tsarisme. Ils font concurrence à cette nouvelle bureaucratie rouge, indéfectiblement lié à Staline, comme les Brejnev ou les Gromyko.
Le procès de Chakhty, en 1928, est une menace directe contre cette couche de techniciens qui avait, des positions privilégiées sous le tsarisme, puis, ce sera la chasse au fameux Koulak, dont la définition est à géométrie variable, et qui sera l'icône centrale de l'ennemi de classe.
Une analyse intéressante sur l'évolution de l'ennemi de classe en URSS :
http://www.conflits.org/index868.html


 

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Nouveau message Post Numéro: 14  Nouveau message de carlo  Nouveau message 10 Oct 2008, 14:05

Bonjour Tietie,

J'ai peur que nous ne nous éloignions considérablement du sujet, j'ai peur aussi que les choses ne soient beaucoup plus complexe que la manière dont vous les présentez. Ainsi la notion d'ennemi varie considérablement entre 1917 et 1940 en URSS, où l'"ennemi de classe" cède peu à peu le pas à l'"ennemi du peuple", c'est-à-dire des personnes issues de catégories ayant participé au développement de l'URSS, mais qui, pour des raisons économiques, politiques ou autres, ont été écartées (nepmens, koulaks, mais aussi des gens comme l'assassin de Kirov...).
Le texte que vous mettez en lien explique un peu le phénomène même s'il sème la confusion en parlant du statut de classe chinois qui n'a rien à voir avec ce qui existe en URSS et s'il parle un peu facilement de fantasmes concernant les éventuels ennemis intérieurs. S'il y a, indéniablement instrumentalisation de la menace (démarche au demeurant pas spécifiquement totalitaire), il y a lieu aussi, sous peine d'y rien comprendre, de discuter de la réalité de celle-ci. Réalité qui prendra sa forme définitive un jour de juin 1941.

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Re: Livres

Nouveau message Post Numéro: 15  Nouveau message de Mikoyan  Nouveau message 27 Oct 2008, 21:05

En passant il y a un livre à éviter, au sujet de la bataille de Stalingrad, c’est celui de Craig. Craig fait plus que raconter une histoire, il romance, il brode, il invente.
Il à beau nous expliquer qu’il a passé plusieurs années à décortiquer et à étudier les archives, il nous explique, un exemple parmi bien d‘autres, que la 37e GvSD était une unité d’infanterie de marine…
C’est du Schroter mais états-uniens, c’est un pur produit de la guerre froide. Et dire qu’il est encore édité !


 

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Re: Livres

Nouveau message Post Numéro: 16  Nouveau message de Borovic  Nouveau message 27 Oct 2008, 23:33

Bonsoir,

..... dommage que tu ne pratiques pas le polonais !

Sinon ... "Bond sur l'Oder" de E. Kazakevich, Prix Staline 1949
Cette nouvelle (549 pages) raconte la vie d'un Major de la Garde appartenant à une unité de reconnaissance sur le chemin victorieux "Pila-Berlin" en février/mars 1945. On y trouve tous les ingrédients de la propagande soviétique mais également "la vie de tous les jours" sur le front : amour, gloire et combats sur la musique des orgues de Staline
En France, ça doit se trouver au "rayon" vélo d'un certain postier

Bonne lecture


 

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Re:

Nouveau message Post Numéro: 17  Nouveau message de tietie007  Nouveau message 14 Nov 2008, 08:51

carlo a écrit:Bonjour Tietie,

J'ai peur que nous ne nous éloignions considérablement du sujet, j'ai peur aussi que les choses ne soient beaucoup plus complexe que la manière dont vous les présentez. Ainsi la notion d'ennemi varie considérablement entre 1917 et 1940 en URSS, où l'"ennemi de classe" cède peu à peu le pas à l'"ennemi du peuple", c'est-à-dire des personnes issues de catégories ayant participé au développement de l'URSS, mais qui, pour des raisons économiques, politiques ou autres, ont été écartées (nepmens, koulaks, mais aussi des gens comme l'assassin de Kirov...).
Le texte que vous mettez en lien explique un peu le phénomène même s'il sème la confusion en parlant du statut de classe chinois qui n'a rien à voir avec ce qui existe en URSS et s'il parle un peu facilement de fantasmes concernant les éventuels ennemis intérieurs. S'il y a, indéniablement instrumentalisation de la menace (démarche au demeurant pas spécifiquement totalitaire), il y a lieu aussi, sous peine d'y rien comprendre, de discuter de la réalité de celle-ci. Réalité qui prendra sa forme définitive un jour de juin 1941.


Certes, mais le concept d'"ennemi" est centrale dans le régime bolchevique. Il va certes varier au gré des circonstances, passant du Blanc au Koulak pour finir au trostkyste, mais la figure de cet ennemi est récurrente et aiguillonne les discours durant plus de 30 ans ! D'ailleurs, cette réplique de Lapsis, ponte de la Tcheka à un de ses subordonnés, cité dans un article de Michel Winock, "Au nom du bien !", pages 34-37, paru dans L'Histoire n°234, Octobre 2007, est assez emblématique :
"Ne cherchez pas de preuves pour établir que votre prisonnier s'est opposé au pouvoir soviétique, en paroles ou en actes. Votre premier devoir est de lui demander à quelle classe il appartient, quelles sont ses origines, quel est son degré d'insctruction et quel est son métier. Ce sont ces questions qui doivent décider de son sort. Voilà la signification et l'essence de la terreur rouge." (cité par M.Liebman, Le Léninisme sous Lénine, Le Seuil, 1973; Tome 2, p.159)

C'est en cela que je parlais d'"essentialisation" de l'ennemi, sous le régime léniniste, qui est coupable non par ses faits, mais par son appartenance à une classe ou une mouvance.


 

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