Skoufski écrit :
Là est ma question (même si elle ne porte pas directement sur la ww2): que s'est-il passé en 1917 au niveau de la conscription? Il n'y avait pas assez de francophone conscrit par rapport aux anglophones? ou vice versa? De plus, l'article nous dit que la moitié des anglophones ont été mobilisé pour la défense du front intérieur (LMRN) contre 1/4 des canadiens français. Ce résultat est-il alors lié à la présence d'une politique différente entre Quebec et canada anglophone?
Quoiqu'ayant la citoyenneté canadienne et vécu seize ans au Canada (dont dix au Québec), je suis tout de même né en France de nationalité française et je ne veux pas ôter la réponse des plumes (d'oies) canadiennes de souche.
Néanmoins, pour répondre à brûle-pourpoint à ta question, je dirai qu'effectivement, au début de la guerre de 14, il apparaît bien vite que les Canadiens français s'enrôlent beaucoup moins que les Canadiens anglais. Dès 1914, un régiment de francophones, le 22e Royal Canadien français, est créé pour encourager les premiers, mais cette initiative demeure insuffisante aux yeux des autorités britanniques (rappelons que le Canada est encore un dominion dans l'Empire britannique et que le Royaume-Uni a déclaré la guerre en son nom sans le consulter).
Bref, si, en matière de recrutement, l'objectif du Canada est fixé à 25 000 hommes en 1914, il est multiplié par dix en 1915 et par vingt en 1916. Ainsi, cette année-là, on devrait enrôler cinq cent mille hommes et, pourtant, on en compte que 385 000 sous les drapeaux. De plus, la moyenne mensuelle des engagements est tombée de trente à six mille ! Cette situation critique provoque une étude officielle sur la question.
On établit bien vite une corrélation entre le niveau de participation et le degré de patriotisme. Ainsi, pour cette étude, entre autres, les anglophones s'avèrent-ils plus "patriotes" que les francophones...
En tout cas, le taux d'enrôlement relativement faible des francophones leur vaut une mauvaise réputation et leur attire même des invectives. Cependant, on peut dégager plusieurs facteurs d'explication.
1)
En fait, la participation volontaire à la guerre est inversement proportionnelle à l'attachement au Canada par rapport à la France ou à l'Angleterre. Implantés depuis trois siècles au Canada, séparés depuis plus d'un siècle et demi de la France et pas assimilés par la Grande-Bretagne, les Canadiens français, qui se sont sentis abandonnés par la mère patrie, ont fondé une société originale qui constitue même une nation à part entière pour certains. Ceux-ci ne sont donc ni attachés à l'Angleterre ni très attachés à la France, d'autant que la Troisième République française, par sa politique anticléricale, s'est donnée fort mauvaise presse au Québec.
2) La société canadienne française est en outre d'autant moins encline à s'intéresser à une guerre européenne qu'elle est particulièrement repliée sur elle-même : la longue résistance à l'assimilation anglaise et aussi une population essentiellement agricole ont forgé cette attitude. De surcroît, il y a le vieux réflexe d'indépendance de l'"habitant" canadien que gardent encore même les citadins, à vrai dire récents.
3) Le peuple canadien français, auquel la France n'a jamais demandé de traverser l'océan pour venir la défendre, serait, aux dires de nombreux auteurs, un peuple pacifique, étranger au militarisme et à l'impérialisme....
4) Les Canadiens français sont dissuadés de s'engager dans l'armée par suite de la mauvaise situation qui leur est faite ! En effet, excepté le 22e régiment, il n'y a pas d'unités francophones ; la langue de commandement est exclusivement l'anglais ; les Canadiens français sont dispersés et souvent méprisés par les anglophones qui ne leur ménagent pas les avanies, brimades et autres vexations... Le ministre de la Milice, lui-même, très antifrançais, ne leur accorde aucune promotion importante...
5) Une propagande souvent inepte et dépassant parfois la mesure, un recrutement dirigé par un anglophone protestant (au Québec !), le rôle de troupes de choc aux pertes très élevées réservé aux forces canadiennes par les Britanniques ne viennent pas faciliter la participation volontaire...
6) Tout cela se trouve exacerbé par la "question des écoles" qui rebondit en Ontario...
En 1917, ce sera la crise bien connue de la conscription...
De plus (je ne m'y connaît pas vraiment sur la politique du Canada), apparement, à l'époque (je ne sais pas s'il en est encore ainsi de nos jours), il y avait un premier ministre au Quebec. Cela veut dire qu'il y avait 2 premiers ministres? Les décisions étaient alors prisent séparément du côté du Quebec ou du côté anglophone?
Depuis 1867 (lorsque l'Acte de l'Amérique du Nord britannique a créé la Confédération canadienne), le Canada est un Etat fédéral : il y a donc un gouvernement canadien et des gouvernements provinciaux...