Bonsoir. Concernant Napoléon, je n'entrerais pas dans les détails, HS sur ce forum. Disons simplement qu'un personnage peut être vu différemment selon les pays. Par exemple les Polonais ont beaucoup de respect pour l'Empereur, alors que les Espagnols le considèrent comme un tyran... Question de point de vue.
Pour en revenir à Staline, un peu d'Histoire ne fait pas de mal. en fait la réminiscence d'un culte de la personnalité et la nostalgie du communisme s'expliquent de plusieurs façons.
D'abord, le communisme soviétique a représenté pour la population terreur, arrestations, manque de libertés; mais aussi modernisation du pays, électrification, eau courante, accès aux soins, éducation... N'oublions pas que la Russie des tsars est en grande partie rurale et que les paysans y vivent dans le dénuement voire dans la misère et l'arriération. La période stalinienne, et aussi khrouchtévienne, brejnévienne était un temps ou chacun avait un toit pour un loyer dérisoire, un travail garanti, même si en général deux ouvriers travaillaient et trois autres regardaient, des transports publics quasiment gratuits de même que les soins. Lors de l'effondrement du système et la privatisation, la parole s'est libérée, mais aussi les prix, mais pas les salaires et encore moins les retraites. Les années 90 furent terribles, avec une baisse de près de 20% du PIB, des vagues de licenciements et on a vu des milliers, voire des millions de petits vieux vendre leurs décorations obtenues suite à la guerre, ou brader leurs souvenirs pour simplement manger. L'accroissement des inégalités aggrava encore les choses. C'est ainsi que se développa une nostalgie des temps d'avant, en ex URSS et dans les Républiques Populaires, qui toucha une partie minoritaire mais non négligeable de la population, les perdants de la transition économique et politique. Ostalgie des Ossies en ex RDA (accompagnée de rancoeurs vis à vis des Wessis de RFA), Yougonostalgie en ex Yougoslavie au temps ou les Croates, Serbes, Macédoniens, Bosniaques s'entendaient (à peu près) bien...
Autre explication, concernant Staline plus précisément cette fois. Certes c'était un tyran, mais le tyran d'un pays puissant. Il avait amené l'URSS au rang de superpuissance, capable de rivaliser avec les Etats-Unis. Car, et les plus anciens sur le forum pourront le confirmer, l'URSS était parfois détestée, parfois adulée, souvent respectée, crainte toujours. Et la chute puis le démantèlement du pays s'accompagna d'une perte de puissance, on peut même parler d'humiliation dans les années 90 avec les pitreries de Boris Eltsine. A tel point que les économistes et géographes hésitèrent un instant à classer la Russie au sein des Etats du Nord. D'ailleurs aujourd'hui elle fait partie d'un ensemble nommé les BRICS (Brésil Russie Inde Chine Afrique du Sud), ou elle est la seule puissance non émergente, par conséquent encore assez loin de la Triade.
On peut ajouter le gout, ou l'attirance des Russes pour les hommes forts, personnages charismatiques, énergiques et réformateurs de la Russie et de l'Etat. Citons un devancier de Staline en matière de sauvagerie et de massacres, Ivan IV dit Ivan le Terrible, qui massacra allègrement paysans et boyards mais mit en place un Etat fort et structuré et fit sortir son pays de l'arriération. Autre exemple avec Pierre I le Grand, réformateur, modernisateur de la Russie, il la fit entrer dans les temps modernes; et en même temps réprima avec une épouvantable férocité la révolte des Strelitz. Et inutile de présenter Staline. Les sentiments nationalistes s'expriment ainsi par la bienveillance vis à vis d'un "Grand Homme" quitte à oublier les crimes qu'il a commis. Est ce à dire que seuls des hommes forts, des tyrans, sont capables de réformer le pays? C'est une hypothèse avancée par les spécialistes de la Russie. Je me rappelle de l'ouvrage d'Hélène Carrère d'Encausse intitulé "Le malheur russe"... On retrouve quelques réminiscences de cet attrait pour le dirigeant autoritaire et réformateur, rendant sa puissance et sa fierté au peuple russe avec l'actuel président Poutine.
Enfin, en Géorgie, pourrait-on discerner des relents de nationalisme, faisant de Staline le plus craint et le plus puissant des Géorgiens. Argument non négligeable quand on connait les relations tumultueuses entre les deux pays, voir la guerre de 2008. Ainsi, un petit géorgiens en apparence insignifiant a pu mettre à genoux la grande Russie, et les autres peuples pendant des années.
Voilà quelques éléments d'explication, en espérant n'être pas trop HS...