Dog Red a écrit:Sac et baril étaient embarqués d'office à bord de tous les chasseurs (ou Spitfire uniquement ?) et pouvaient être largués au moment du crash par les équipiers du pilote en perdition ou bien le largage de l'aide était une mission spécifique une fois le naufragé repéré en mer ??
Bonsoir, Les sacs et barils ne faisaient pas partie de l'équipement de bord et ne dotaient pas d'office les avions. Ils étaient uniquement largués par un autre aéronef après le crash lorsque l'équipage était à bord d'un canot de sauvetage. Cette opération était effectuée par un avion ou hydravion dédié dans le cadre d'une mission spécifique de recherche/sauvetage. Le Spitfire que l'on voit sur le cliché embarquer des sacs Thornaby le fait dans le cadre d'une mission de sauvetage. De même concernant le Lindholme Gear mais dans ce cas, le canot gonflable, qui faisait partie du pack de survie, était aussi largué et se gonflait automatiquement au contact de l'eau pour permettre d'y accueillir les naufragés. C'était d'autant plus important car les pilotes de chasse n'ont été doté d'un canot gonflable de sauvetage qu'au début de 1942 seulement.
Le capitaine de groupe Waring, initiateur du Lindholme Gear décrit précédemment, suggéra qu’un canot de sauvetage aéroporté puisse être transporté sous un aéronef et qu’il soit largué en mer pour aider les équipages à secourir. L’embarcation de sauvetage aéroportée devait fournir aux aviateurs en difficultés un navire plus navigable, en matériau dur, et susceptible de se déplacer sur des distances plus importantes que le canot pneumatique gonflable. Toutefois, les exigences relatives d'un tel bateau devaient être très rigoureuses. Il devait être léger et aérodynamique afin qu’il puisse être transporté sous un avion, mais assez robuste pour être largué en mer. Il devait aussi être sûr par mauvaise mer, donc pratiquement insubmersible et auto-redresser. Il devait également posséder des moteurs faciles à démarrer, des voiles très simples et transporter suffisamment de carburant pour naviguer 500 miles. Et bien entendu, dans une économie en temps de guerre, il devait être rapide et peu coûteux à construire.
La conception et le développement, furent motivés aussi par les amerrissages à proximité d'un territoire ennemi au cours desquels, malgré les efforts des équipages pour s'en éloigner dans le canot pneumatique, vents et/ou marées poussaient fréquemment l'embarcation sur la rive et favorisaient ainsi leur capture.
Ces embarcations aéroportées, nées d'un besoin urgent durant les hostilités, évoluèrent peu et disparurent près d'une décennie après le conflit avec l'apparition des hélicoptères de sauvetage équipés de treuils permettant de secourir rapidement les survivants en mer.
Le canot de sauvetage largable Uffa Fox
L’expert en construction de bateaux, le lieutenant Robb, élabora les plans initiaux et le célèbre concepteur de yachts, Uffa Fox, les développa. Après une longue période de gestation, la première chute réussie de l'embarcation de sauvetage aéroportée Uffa Fox eut lieu le 5 mai 1943. Confectionnée en bois, elle avait la forme d'un canot d'une longueur de 7,20 m pour 1,70 m de large pour un poids de 740 kg.
La coque était constituée de deux épaisseurs d’acajou séparées entre elles par un tissu imperméable. Huit compartiments étanches étaient prévus pour contenir les équipements. L’embarcation Mk I/Mk II était conçue pour 10 personnes et était équipée de deux moteurs à essence 2 temps de 4 CV permettant de naviguer jusqu'à une vitesse de 6 nœuds. On pouvait aussi utiliser le mat et la voile présents à bord de l'embarcation. La navigation était possible dés 30 cm d'eau.
Un vaste auvent apportait une bonne protection et pouvait être déployé pour protéger totalement l'embarcation.
On trouvait à l'intérieur, disposés dans les compartiments étanches, du matériel de survie, des vêtements chauds, des combinaisons imperméables, des rations alimentaires, de l'eau, une radio de détresse et des fournitures médicales pour les premiers soins.
Ce canot de sauvetage, fut transporté au début par des Lockheed Hudson puis plus tard par des Vickers Warwick et Vickers Wellington.
Plus tard, d’autres aéronefs, comme des bombardiers modifiés, furent également utilisés pour transporter et larguer ces embarcations. Parmi les aéronefs britanniques, on utilisa le bombardier lourd Avro Lancaster.
Certains B-17 américains furent aussi modifiés pour transporter sous leur fuselage ces embarcations qui pouvaient être larguées aux aviateurs en détresse. Ce type de B-17 fut baptisé SB-17. Ce fut le tout premier avion américain modifié et utilisé spécifiquement pour le sauvetage. Cependant sa première mission opérationnelle eut lieu tardivement au moment où la guerre en Europe était sur le point de terminer.
Largué d'une altitude de 200 m, sa chute était ralentie par trois parachutes qui se détachaient automatiquement au contact de l'eau. De plus, l'embarcation se redressait automatiquement si elle se renversait à l'impact. De lignes de vie d'une longueur de 100 m environ étaient projetées par des fusées et se déployaient automatiquement de part et d'autre du bateau.
Plus de 400 embarcations de sauvetage aéroportées de ce type furent construites par des petites chantiers navals dans tout le Royaume-Uni. On leur avait remis les plans détaillés de chaque composant et les normes étaient rigoureuses afin que tous les bateaux soient strictement identiques.
Cependant, bien que plus sophistiqué que les canots pneumatiques gonflables, leur utilisation et leur efficacité s'avérèrent limitées. Les chiffres des sauvetages connus à ce jour révèlent que, pour les avions basés en Grande Bretagne, pour 112 embarcations de ce type larguées pour secourir des naufragés, seulement 61 permirent d'embarquer au moins un homme. Dans 22 cas, aucune information n'est connue. Pour les 39 autres, le sauvetage n'a pu être effectué, essentiellement parce que l’embarcation de sauvetage avait été larguée trop loin des survivants.
Outre les aviateurs naufragés en mer, une d'entre elles permit de sauver l'équipage et les combattants d'un planeur tombé dans une zone inondée pendant l'opération Market-Garden en septembre 1944.
Le canot de sauvetage largable A-1 Higgins
Higgins Industries, constructeur de bateaux à la Nouvelle Orléans, était déjà connu pour avoir construit de nombreux navires de débarquement LCVP et des bateaux torpilleurs de patrouille PT pour l'US Navy. Aux États-Unis, Andrew Higgins évalua et testa l'embarcation britannique Uffa Fox qu'il estima trop fragile pour résister à un accident dans les interventions d’urgence. En novembre 1943, Andrew Higgins confia aux ingénieurs de son entreprise l'étude et le développement d'une version plus robuste équipée de deux moteurs. Il en résulta l’embarcation de sauvetage aéroportée Higgins A-1, d'un poids de 1400 kg et de 8 m de long.
Ce canot de sauvetage largable motorisé comportait des compartiments étanches, était insubmersible et autoredressable afin qu’il ne coule pas s'il était submergé ou retourné.
Le largage pouvait se faire à partir d'un SB-17 à une vitesse de 190 km/h et à une altitude de 500 m.
Comme l’embarcation britannique de sauvetage aéroportée Fox, trois parachutes étaient déployés pour freiner sa descente, puis au contact de l’eau de mer, des lignes de vie étaient projetées par des fusées automatiques qui les envoyaient à environ 200 m de chaque côté pour faciliter l’accès des survivants à l’embarcation. Les parachutes se positionnaient ensuite en tant qu'ancre flottante, empêchant ainsi à l'embarcation de dériver pendant que les survivants tentaient de l'atteindre. À l’intérieur du bateau, l’équipage de l’avion qui venait de procéder au largage de l'embarcation, avait placé auparavant une carte indiquant la position approximative du bateau ainsi que le cap à suivre à la boussole pour se rapprocher des secours et faciliter le sauvetage. L'équipement de survie était sensiblement similaire à celui rencontré dans le modèle Fox britannique. Il fut prêt pour entrer en production début 1944 et la première mission opérationnelle en Europe du canot aéroporté Higgins A-1 eut lieu en mars 1945. Il fut aussi utilisé durant les opérations de sauvetage dans le Pacifique.
Higgins produisit aussi une version plus petite de l’A-1 destinée à être utilisée par la Garde Côtière américaine et qui pouvait être transporté par le PBY Catalina. Cette version réduite mesurait 5,50 m et ne pesait que la moitié du poids de l’A-1. Il ne pouvait transporter que seulement huit personnes.
Le succès des résultats obtenus par la Luftwaffe avec la bouée de survie Rettungboje allemande présente en Manche et Mer du Nord, décrite ici https://www.39-45.org/viewtopic.php?p=759030#p759030, incita les autorités britanniques à étudier puis à développer un équipement équivalent, qu'on nomma officiellement Cuckoos mais que la presse surnomma Ocean Hostels.
Ces engins flottants statiques fabriquées en acier, sans moteur ni gréement étaient destinés à servir de refuges temporaires pour fournir un abri d'urgence aux pilotes et aux équipages qui se retrouvaient en mer à la suite d'une action ennemie ou d'un dysfonctionnement de l'avion.
D'une longueur de 9,90 m environ et de 3 m de large, ce curieux engin avait approximativement la forme d'un bateau. Confectionné à partir de feuilles de 6 mm d'épaisseur de métal soudées entre elles, toutes les parties qui le composaient étaient planes.
La hauteur utile était de l'ordre de 1,80 m et son tirant d'eau de 1 m environ. La poupe de l'embarcation possédait un plan incliné pour permettre à un homme de se hisser à bord facilement. Ce plan incliné était équipé d'une grille et d'une main courante s'étendant jusqu'en au-dessous de la ligne de flottaison de telle sorte à agir comme un une rampe d'accès. Les côtés surélevés de l'engin permettait d'y accéder en toute sécurité. Des échelles, s'étendant sous la ligne de flottaison, étaient disposées de chaque côté de la proue et de solides mains courantes étaient accessibles tout autour de la coque au dessous de la ligne de flottaison pour permettre d'accéder facilement à l'arrière de l'embarcation.
L'engin pouvait accueillir au moins six personnes.
L'aménagement de l'intérieur fut confié et aménagé par des sous-traitants spécialisés dans le mobilier. À l'intérieur on y trouvait des équipements de survie et des fournitures vitales, notamment de la nourriture, de l'eau potable, un poêle de cuisson, des vêtements propres et secs, des couchettes confortables pour six personnes, des couvertures, des sacs de couchage, des serviettes, du matériel de lavage, une trousse de premier secours, une émetteur-récepteur radio, des équipements de signalisation et des fusées, des drapeaux, une lampe, un sifflet, des cigarettes, des allumettes, des livres, des jeux et des cartes à jouer.
La coque de l'ASR était peinte dans les couleurs rouge et orange pour s'assurer qu'elle était aussi visible que possible pour les aviateurs abattus. Il était prévu que les rescapés nageraient jusqu'à l'embarcation et grimperaient à l'intérieur où ils trouveraient un refuge sûr et tout ce qui pouvait être nécessaire pour leur survie : radio, lits superposés, rations alimentaires d'urgence, matériel de signalisation, etc. jusqu'à ce qu'ils soient secourus.
Un drapeau était hissé sur le mâtereau pour indiquer que l'engin était occupé.
Le Ministère de l'Air britannique lança une commande de 16 unités qui furent construites vraisemblablement en 1943/1944 par Carrier Engineering Ltd de Wembley. Elles furent identifiées ASR-01 à ASR-015. Mouillées sur un emplacement fixe, amarrées sur des corps morts au moyen de chaines, elles furent déployées à intervalles fixes sur les principales routes stratégiques des bombardiers à destination ou en provenance de l'Europe occupée.
Entretenus par l'Air Sea Rescue Service, ces engins de survie ne se révélèrent pas particulièrement efficaces car ils devaient être amarrées près du rivage et les observateurs côtiers, qui les surveillaient, pouvaient, quoi qu'il en soit, facilement repérer un aéronef en détresse à partir de la même position. Leur utilisation est très peu documentée mais il ne semble pas que de nombreux aviateurs alliés se soient réfugiés dans ces embarcations. Cependant, au moins un équipage de la Luftwaffe l'a fait après avoir été abattu dans la Manche. Les vedettes de sauvetage rapides de la Marine Branch de la RAF furent en pratique beaucoup plus efficaces pour sauver les aviateurs.
Il n'existe qu'un seul exemplaire qui a survécu jusqu'à nos jours, l'ASR-10, et qui, après restauration, est toujours exposé au Scottish Maritime Museum à Irvine et dont on connait peu son parcours : https://www.scottishmaritimemuseum.org
Fin ...-.-
En vrac : quelques unes des sources utilisées après le post 11 :