Bonjour Marguerite,
Ton approche est intéressante, parce qu'elle fait un parallèle entre la photographie de guerre durant la Seconde Guerre et aujourdhui.
Tu as un problème sur le début de ton plan et c'est normal : tu commences avec la Seconde Guerre, alors que la photographie ne tombe pas de nulle part à ce moment là !
Je te propose donc de faire une première partie sur la photographie avant 1939 : commence par l'invention et l'évolution des outils (l'invention du 24x36 permettra aux Allemands d'avoir une avance technique forte sur ce plan, permettant à chacun d'emmener avec lui un appareil photo au front), puis étudie l'utilisation de la photographie de guerre avant la guerre, tu verras ça remonte loin : les premières c'est durant la guerre de Crimée (1853-56).
Ensuite, ne reste pas dans le manichéisme bons-méchants. Il est bon de montrer que la photographie peut être utilisée pour la propagande comme pour le témoignage, mais il ne faut pas monter ton plan là-dessus, sous peine de te bloquer un tas d'entrées intéressantes. Propagande et dénonciation ne sont qu'une partie du problème. Du fait de l'utilisation de plus en plus massive d'appareils photos légers et faciles d'utilisation, chacun peut alors faire des photos. La photographie devient alors personnelle, et n'a pas destination à être vue par d'autres que le photographe et ses proches (voir l'album d'Auschwitz, plus bas : c'est un excellent exemple).
Accroche-toi à montrer, à travers quelques exemples, qu'une photographie peut être vue de plusieurs manières, selon la façon dont elle est présentée.
Par exemple :
Utilisée dans la propagande allemande, on pourrait donner comme légende à cette photo quelque chose comme "sur le front de l'Est : le soldat allemand combat pour le Salut de l'Europe".
Aujourd'hui, on donnera plutôt à cette photo une légende du type "Soldat allemand en Russie en 1941. La Wehrmacht n'hésitait pas à brûler les villages dans lesquels se cachaient les soldats ennemis".
Comme on le voit, la photographie est liée au regard que l'on a sur elle, et peut être utilisée dans un but comme dans un autre. Il faut que tu mettes l'accent là dessus. Ce ne sont en aucun cas des reflets de la réalité, elles ne sont que le reflet du regard de celui qui prend la photographie !
Par ailleurs la photographie ne montre pas tout : le photographe fait un choix de ses sujets selon ses intérêts, ses goûts, ses objectifs. Il faut que tu fasses ressortir cet aspect : que voit-on, mais surtout que ne voit-on pas ? Par exemple, si tu prends
l'album d'Auschwitz :
http://www1.yadvashem.org/exhibitions/album_auschwitz/page01.html (si tu ne sais pas de quoi il retourne, va voir là :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Album_d%27Auschwitz, tu auras l'arrivée des déportés, le tri, l'attente avant la chambre à gaz (à l'extérieur des bâtiments, l'habillage des déportés "aptes au travail", mais pas d'images des opérations d'extermination. En l'absence d'explications complémentaires, tu ne peux donc pas comprendre quel sort est réservé aux personnes représentées. On voit donc que le non montré est aussi important, voir plus encore, que le montré.
Ce qui nous amène à ta troisième partie : si je comprends bien tu parles du regard que nous portons aujourd'hui sur les photographies de la Seconde Guerre ? C'est très intéressant mais il faudrait à mon sens modifier ton approche.
Comme je l'ai dit, la photographie ne nous informe pas directement sur les conditions de la guerre, elle ne donne que des éclairages imparfaits puisque subjectifs et fragmentaires. Elle ne peut à elle toute seule expliquer, elle ne peut qu'illustrer et permettre de comprendre des informations extérieures. Un regard critique sur elle est fondamental, comme je l'expliquais ici :
http://www.39-45.org/viewtopic.php?f=51&t=21868.
Et surtout ne pars pas sur l'idée de mémoire, tu fais de l'Histoire donc tu dois rester la plus neutre possible. D'autant que comme moyen de ne pas oublier, la photographie n'est pas ce qu'il y a de mieux, comme tu l'auras compris en lisant tout ce qui précède, puisqu'elle ne fait que montrer des bribes d'une réalité, en fonction du photographe.
Fais des ouvertures sur aujourd'hui : depuis la guerre du Vietnam, la photographie et l'image en général sont devenus parties intégrante des guerres. Le contrôle de l'image par un camp ou l'autre peut décider de sa victoire ou de sa défaite. Avec l'apparition d'internet, couplé aux téléphones portables munis d'appareils photo/vidéo, l'image envahit notre quotidien, et chacun peut mettre en ligne ce qu'il veut. D'où les photographies de prisonniers irakiens humiliés à la prison d'Abou Ghraib, en Irak, en 2004 (par pudeur je ne mets aucun lien à ce sujet, fais une recherche google-image à ce nom... Attention images choquantes !).
Pour finir, le traditionnel conseil : les bibliothèques sont tes amies !!! Les documentalistes sont là pour ça, presse-les comme des citrons elles sont payées pour ça.
Quelques orientations bibliographiques :
bibliographie sélective sur les propagandes au XXe siècleVoir/ne pas voir la guerre, catalogue d'exposition, éditions Somogy, Editons D'art, 2001, 351 pages, plein d'illustrations.
Une référence, un tas d'articles qui t'aideront beaucoup !
L'Humanité en guerre, de Caroline Moorehead, éditions Lieux Dits, 2009, 247 pages. Un tas de photos !
Images de la guerre, de Paul Brewer, éditions Gründ, 2005, 399 pages.
Excellent livre, je le recommande à tout le monde !
Voila ! Avec tout ça je pense que tu as quelques pistes pour travailler.
Bonne journée,
Seb.