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Mers el Kebir

Histoire et recherches portant sur les Marines de guerre de tous les belligérants, incluant les grandes batailles comme celles de l'Atlantique, de la mer corail, Mers el Kébir, la destruction du Bismark etc.
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Re: Mers el Kebir

Nouveau message Post Numéro: 241  Nouveau message de François Delpla  Nouveau message 31 Mar 2009, 21:18

Je ne suis pas au courant de ces tractations du jour même avec Londres, pouvez-vous préciser ? La solution du sabotage pour un an est acceptée d'avance, simplement Somerville est censé ne pas la présenter et attendre que Gensoul le fasse, ce qui lui offre toute possibilité de la suggérer, et il le fait (par Holland). La balle sur ce sujet est entièrement dans le camp de Gensoul, qui la dédaigne.

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Re: Mers el Kebir

Nouveau message Post Numéro: 242  Nouveau message de Pierre.S  Nouveau message 31 Mar 2009, 21:23

Bonjour,

Vraiment difficile de se faire une opinion tranchée, trop de zones d'ombre ou une immense manipulation de Churchill qui, à l'instar de Hitler, trompe encore son monde aujourd'hui.
Juste une précision et une question:
-la précision: la référence horaire, les Anglais sont en GMT et il me semble que les Français étaient à l'heure de Paris, GMT +1. Il est peut être important de le préciser lorsque l'on décrit la chrono des évènements.
-la question: les mines mouillées devant MEK et Oran pendant les négociations étaient-elles "bidon", comme semblent le penser certains témoins, ou opérationnelles et constituent alors un acte de guerre propre à influancer gravement l'évolution des négociations??
Cdt,
Pierre


 

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Re: Mers el Kebir

Nouveau message Post Numéro: 243  Nouveau message de François Delpla  Nouveau message 03 Avr 2009, 10:03

PIERRE.S a écrit:Bonjour,

Vraiment difficile de se faire une opinion tranchée, trop de zones d'ombre ou une immense manipulation de Churchill qui, à l'instar de Hitler, trompe encore son monde aujourd'hui.
(...)
-la question: les mines mouillées devant MEK et Oran pendant les négociations étaient-elles "bidon", comme semblent le penser certains témoins, ou opérationnelles et constituent alors un acte de guerre propre à influencer gravement l'évolution des négociations??


Je n'ai pas entendu dire qu'elles le fussent : qui le dit ?

Il me semble que Gensoul considère déjà l'arrivée même d'une flotte menaçante comme un acte de guerre ! Les mines lui servent d'argument d'appoint.

Je lis en ce moment le livre de Raphaël-Leygues et Flohic sur Darlan. Un monument d'"histoire" militante, gaulliste en l'occurrence, avec des passages entiers ineptes et quelques sommets d'inventivité, comme la présence de Darlan à Nérac le 3 juillet, ou Hitler répondant poliment à une demande d'audience de Pétain qu'il le recevra à Montoire les 22 et 24 octobre. Cependant je relève que Coutau-Bégarie et Huan, d'un bord opposé, ne le démolissent pas comme il se devrait, mais s'appuient plutôt sur lui pour faire valoir leurs thèses.

L'une des questions les plus fondamentales concerne la "conversion" de Darlan à l'armistice. J'ai dans l'idée que sur ce point on peut faire confiance aux mémoires de quelqu'un dont par ailleurs je me méfie beaucoup, Paul Bouthillier : il voit Darlan en direct se convertir, le 15 juin. Il convient de se demander pourquoi et là-dessus j'ai ma petite idée, qui n'est évidemment pas celle de Bouthillier (un Darlan pesant le pour et le contre entre une aventure individuelle risquée de rebelle à la tête d'une flotte, et l'intérêt général). Pétain et Weygand, ainsi d'ailleurs que Reynaud, entendent parler depuis des semaines de conditions allemandes "généreuses". Il y a là tout un iceberg, dont la partie aujourd'hui visible s'arrête encore, en gros, aux déclarations de Göring à Dahlerus le 6 mai http://www.delpla.org/article.php3?id_article=377. Connaissant mon Hitler comme je le connais, et lui-même connaissant le chaos qu'il a mis en France, il m'étonnerait fort qu'il laisse aller les choses sans faire de nouveau savoir aux principaux dirigeants français qu'il envisage de leur laisser la flotte, une zone non occupée et l'intégralité de l'empire (d'après Dahlerus il laissait même l'Alsace-Lorraine !).

La logique de l'attitude de Darlan me semble être :

1) il perd tout moral quant à l'issue de la bataille en cours, et à la capacité de l'Angleterre de la poursuivre seule;

2) il entend parler de l'éventualité de conditions allemandes clémentes, ne touchant pas à la flotte;

3) il décide de jouer le jeu de la demande d'armistice, et ce en grand, comme tout ce qu'il fait : c'est-à-dire en étant ministre, pour avoir son mot à dire sur les conditions d'armistice et reprendre ses billes si elles ne lui conviennent pas.

Ce que je reproche à Coutau-Bégarie, c'est de ne pas approcher de près ni de loin une telle analyse, et de se contenter de taper sur la thèse effectivement ultra-simpliste de Raphaël-Leygues, pour qui Darlan n'écoute que son ambition lorsque, le 12, Pétain lui fait miroiter un ministère !

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Re: Mers el Kebir

Nouveau message Post Numéro: 244  Nouveau message de Pierre.S  Nouveau message 03 Avr 2009, 12:54

hilarion a écrit:Personne n'évoque le livre d'Yves Rochas Verités interdites Mers el Kebir paru aux editions de l'officine. C'est pourtant l'un des meilleurs livre qu'on a écrit sur le sujet et qui aborde pleinement le sujet aspect politique forces en présences.
Pour François delpla je prépare une réponse plus argumenté que celle que je vous aies donné sur votre site en fin de week end dernier.

Bonjour,
Je reçois à l'instant le bouquin de ROCHAS, je lis la note préliminaire et j'y trouve que déjà 2 livres ont été écrit sur le sujet: "Pour en savoir plus sur MEK" en 93 et "1940, Churchill....et les Français" en 98...déjà vu quelquechose d'approchant....."C'est 3 livres sur le Drame de MEK donnèrent une analyse innovante non encore imprimée jusque-là" (sic)
J'ouvre au hasard et je trouve pages 120-121: "La destruction de la flotte française, va ainsi servir de "faire-valoir" à:
-Cette quête désespérée de l'aide américaine pour la poursuite du conflit.
-Ce combat au "finish" avec Hitler.
-La défaite des appeasers-Halifax, son secrétaire d'état Butler-qui cherchent un compromis, ne voyant aucune issue à cette guerre désastreusement commencée.(sic)

A partir de là je suis curieux de savoir ce que recouvre cette petite phrase de F.DELPLA.

Cdt,
Pierre


 

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Re: Mers el Kebir

Nouveau message Post Numéro: 245  Nouveau message de François Delpla  Nouveau message 03 Avr 2009, 17:42

@ Pierre : je préférerais discuter sur les affirmations de Rochas concernant la journée du 3 (ou ses antécédents) plutôt que sur son livre lui-même, encombré toutes les deux pages de propos passionnés sur les livres antérieurs et toutes les deux lignes d'un tic que je ne supporte pas, la dénonciation du "politiquement correct" ou de l'histoire "officielle" : le genre de chose qu'on ne perd pas une seconde à dire quand on a mieux à dire. Et c'est un pourfendeur de dogmes qui vous le dit ! Mais l'officiel c'est toujours l'autre, il est donc divers et varié et l'expression n'a aucun sens, aucune utilité.

Cela précisé, au bout de son troisième livre sur le sujet, Rochas devient plus conscient des enjeux planétaires, de la puissance des appeasers et du risque de guerre franco-anglaise. Le quatrième risque, pour peu justement qu'il renonce à ses tics, d'être excellent !

Quant à moi, je viens de relire la comparution de Gensoul devant la commission parlementaire d'enquête, le 28 juin 1949, et de la trouver passionnante.

Elle est entièrement motivée par le fait que lors de la dernière réunion (le 23), c'est Weygand qui était à sa place et il avait déclaré que l'amiral n'avait pas fait part au gouvernement de la troisième solution offerte par les Anglais, celle d'un départ pour les Antilles. Cet aréopage formé de parlementaires, d'anciens ministres, de représentants des organisations de résistance n'en est pas revenu. Ils veulent comprendre comment un fonctionnaire, militaire de surcroît, a pu agir avec une telle désinvolture vis-à-vis de son gouvernement et c'est pour cela seul qu'ils interrompent les auditions de Weygand pour en intercaler une avec Gensoul. Leur but n'est donc pas d'éclairer Mers el-Kébir en soi, mais de comprendre comment un amiral local a pu prendre toute la responsabilité de la réponse.

Eh bien sa première justification est minable, ils sont encore plus estomaqués et ils le poussent dans ses retranchements !

On lui avait déjà fait cette remarque, il en avait été étonné car il avait eu "l'impression de dire ce qu'il fallait, c'est-à-dire l'essentiel". Ayant relu la documentation, il a reconnu -déjà précédemment, lors de son témoignage au procès Baudouin- "que certainement j'aurais pu à ce moment-là et j'aurais dû probablement rédiger un télégramme plus explicite (...)." S'il ne l'a pas fait, c'est parce qu'il savait que les communications étaient difficiles et qu'il se disait que plus un texte était court plus il avait de chances d'arriver. Il poursuit en disant que ce qui importait vraiment, c'étaient les "quatre dernières lignes" suivant lesquelles il fallait soit se couler soit être coulé ! Puis il essaye de faire dévier le débat sur une question entièrement différente : pourquoi il estimait, lui, qu'aucune condition n'était acceptable.

Le président, Louis Marin (l'un des derniers adversaires de l'armistice à Bordeaux), le suit un instant sur ce terrain en lui faisant reconnaître que la solution "Antilles" différait radicalement des autres... puis il revient à la charge en lui disant que Jacques Bardoux (parlementaire de droite anglophile, grand-père de Giscard d'Estaing) avait appris la troisième condition à Pétain, l'ayant lui-même apprise par un journal anglais, et que c'était quand même un comble, alors que le responsable français sur place n'en avait encore rien dit ! Là Gensoul dit une chose qui le trahit... mais que personne ne relève : après avoir indiqué que l'amirauté française avait eu le texte intégral "au moins par la TSF anglaise", il précise que celle-ci "avait tout intérêt à donner l'ensemble de cet ultimatum".

C'est donc que Gensoul pensait que la diffusion dans le public de la condition n° 3 n'était pas "patriotiquement correcte" !! Ainsi que sa connaissance par sa propre hiérarchie !!!

Il se fait alors remonter les bretelles par Michel Clemenceau, fils du Tigre : "Amiral, on ne vous demandait pas de prendre telle ou telle décision; on vous demandait simplement de transmettre ce télégramme."

Gensoul en remet alors une couche (noyeuse de poisson et mensongère à la fois) sur les difficultés de transmission, prétendant faussement qu'il a reçu la "première réponse" de France "à peu près cinq minutes après le départ des premiers coups de canon anglais". Une minute après il dit "dix minutes" ! C'est ce qu'on appelle se rapprocher de la vérité... Car il avait reçu des messages de ses supérieurs métropolitains à 15h 05 et peu après 16h (ouverture du feu d'après son propre rapport du 9/7/40 : 16h 56) !

Nouvelle passe d'armes amusante, avec l'ancien ministre radical Paul Bastid, député :

"-N'avez-vous pas dit que vous aviez besoin d'en référer à votre gouvernement ?

-Bien entendu, je leur ai dit, pour essayer de gagner du temps."

Puis il s'explique sur son état d'esprit du moment (j'y reviendrai). Continuons avec les diversions : Gensoul fait état d'un télégramme disant "cessez toute communication avec l'ennemi"... mais un interrogateur lui fait reconnaître que c'était à 20h 30, après la bataille ! Ensuite, le député MRP Jean-Marie Louvel fait remarquer, d'après le journal de Baudouin, que Pétain, Darlan, Weygand, Laval et Baudouin délibèrent à 15 30 sur l'ultimatum qui n'offrirait à Gensoul que la possibilité "de rallier la flotte anglaise ou de saborder ses navires". Et Charles Serre, président de la commission, enfonce un clou dans la croix de l'amiral en faisant état de l'arrivée de la même information tronquée à la commission de Wiesbaden, à 15h 30.

Gensoul s'en sort en disant qu'il n'était pas à Wiesbaden...

Sur son état d'esprit, je retiens cet excellent résumé :

Au début, quand j'ai vu arriver l'ultimatum anglais, j'ai cru, malgré les termes de cet ultimatum, à une intimidation faite par les Anglais de façon un peu brutale suivant la façon anglaise. C'est à ce moment-là qu'appliquant les ordres généraux que j'avais reçus de ne pas entrer en contact avec les Anglais, je n'ai pas voulu recevoir directement le commandant Holland et que nous avons conversé par l'intermédiaire de mon aide de camp et de mon chef d'état-major. Puis naturellement, les heures passant, la situation s'aggravant, je me suis rendu compte que ce n'était plus une simple intimidation. Quand j'ai vu qu'environ une heure avant la fin du délai imparti les choses allaient se gâter, quand j'ai vu des avions anglais venir mouiller des mines magnétiques dans la passe de sortie, je me suis dit : "C'est tout de même inimaginable, effroyable, de penser que nous allons nous trouver en butte avec les Anglais, échanger des coups de canon avec eux ! Il faut absolument gagner du temps. Tout le temps gagné permettra peut-être de trouver une solution autre que celle des canons."


Je verse ces pièces au débat. Elles me semblent éclairer la journée d'une lumière souvent brouillée par les analyses ultérieures.

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Re: Mers el Kebir

Nouveau message Post Numéro: 246  Nouveau message de François Delpla  Nouveau message 03 Avr 2009, 18:35

Ces déclarations de Gensoul semblent indiquer qu'il n'a pas eu confiance dans sa hiérarchie. Il confirme d'ailleurs devant la commission ce qu'on savait, que Darlan n'avait jamais causé de MeK avec lui ! ... en dépit de très nombreuses occasions de rencontre, Gensoul ayant été nommé à la tête des oeuvres de la Marine. Je parlais d'ailleurs récemment de la sortie de De Gaulle devant Peyrefitte (années 60), suivant laquelle il aurait dû accepter de sortir, pour ensuite "faire ce qu'il aurait voulu" : eh bien Darlan en aurait dit autant à son fils Alain.

L'état d'esprit du commandant de la Force de raid semble donc celui-ci : la flotte "invaincue" doit donner l'exemple du refus de se laisser marcher sur les pieds par quiconque. C'est un ordre permanent, indiscutable, dont l'application ne requiert pas d'instructions nouvelles. Il pense d'ailleurs sans doute sincèrement que les Anglais bluffent : raison de plus pour considérer cela comme une affaire locale.

En faisant connaître à sa hiérarchie la solution "Antilles", il craindrait sans doute que cela n'entraîne des palabres à Vichy et une tentation d'accepter... alors que lui, Gensoul, qui voit les canons braqués, qui ressent l'ultimatum comme un défi à son honneur, sait bien qu'aucune condition n'est acceptable.

Il a commis une autre faute, qui semble échapper à ceux qui ici l'interrogent : il n'a pas tenu le moindre conseil de guerre avec ses commandants d'unités, et il a même renvoyé Collinet, commandant du Strasbourg, qui se présentait devant le Dunkerque pour lui parler. Cela s'explique sans doute de la même façon : surtout pas de palabres ! Je suis responsable, je fonce ! Déjà très vichyste... On dirait Pétain au lendemain de Montoire et en cent autres occasions : "c'est moi seul que l'histoire jugera". Il erre d'ailleurs curieusement à ce sujet, en prétendant que le gouvernement n'était pas encore installé dans la ville d'eaux !

Dans l'après-midi il commence à se douter qu'il ne s'agit pas d'un bluff... mais il n'en tire aucune conclusion logique... il ne tire que son vin, et le boit. Il se raccroche à la chimère de faire musarder les Anglais jusqu'à la nuit.

Tout cela non pour l'accabler mais pour essayer de le comprendre. Car je considère aussi que les Holland et autres Somerville ont, en voulant certes sincèrement éviter l'effusion de sang, aggravé ou même créé celle-ci, puisqu'il entretenaient Gensoul dans l'idée qu'ils n'oseraient jamais tirer.

En tout cas tout cela confirme que Churchill, lui, a fait son devoir -montrer le chemin de la fermeté, en l'absence de toute révision claire du très dangereux article 8 de l'armistice- et que les morts sont dus à la mollesse des exécutants. Le sang, certes, ajoutait à la démonstration du fait que le défi de la barbarie nazie serait désormais relevé sans faiblesse, mais il n'était ni nécessaire ni programmé.

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Re: Mers el Kebir

Nouveau message Post Numéro: 247  Nouveau message de Pierre.S  Nouveau message 04 Avr 2009, 01:11

Bonjour,
Observation faite par un marin du Strasbourg : la vedette des parlementaires avait à peine dépassé la jetée, boum, voici les premiers coups de canons britanniques qui nous arrivent dessus alors que nous étions toujours au mouillage………Ce fait est confirmé coté Anglais ;
Somerville n’a donc pas attendu de connaitre le résultat des dernières négociations, Gensoul y proposait un désarmement sur place, pour ouvrir le feu.
Le dernier coup d’intox de Churchill a cette fois porté : l’arrivée imminente de renforts depuis Toulon et Alger (8h de mer).
Churchill a fait son devoir : assurer sa position et limiter les risques (supposés) encourus par la Grande-Bretagne, un minimum pour un chef d’état, mais au prix fort !!
Quant à la défense de Gensoul laissons le l’assurer lui-même dans sa réponse faite aux propos de Spears : « L’Amiral Gensoul a fait semblant de négocier pendant plusieurs heures pendant ce temps là il câblait à la flotte italienne le conseil de nous attaquer par derrière ».
Gensoul répond : « Tout d’abord je lui demanderai simplement quel amiral anglais, plus ou moins » stupide » que moi-même, aurait accepté de se soumettre à un ultimatum « si honorable » soit-il, présenté sous la menace des canons d’une flotte soi-disant alliée, ultimatum que M.Churchill, lui-même, savait parfaitement ne pouvoir être accepté, puisqu’il faisait saisir traitreusement et le matin même, tous les navires français se trouvant dans les ports anglais et qui justement, avaient déjà fait ce que l’on me demandait de faire….
Si j’ai essayé de faire trainer en longueur les pourparlers engagés avec l’amiral Somerville, dont je ne mets pas en doute le loyalisme, c’est que je ne pouvais arriver à réaliser que cette lutte fratricide était inéluctable et que, jusqu’au dernier moment, j’ai eu l’espoir de pouvoir l’éviter, m’astreignant à ne pas appareiller et à ne pas ouvrir le feu le premier. Quelle que soit la mauvaise foi dont fait preuve, à ce sujet, le général Spears, je reste pleinement convaincu, comme je l’ai dit devant les cercueils des victimes, que « s’il y a eu, ce jour-là une tâche sur un pavillon, ce ne fût certes pas sur le nôtre ».
Cette attitude n'est pas celle d’un stupide irresponsable…..
La question du destinataire de l'ultimatum n'a pas encore été abordé: pourquoi Gensoul en direct et non pas VICHY???
Cdt,
Pierre


 

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Re: Mers el Kebir

Nouveau message Post Numéro: 248  Nouveau message de François Delpla  Nouveau message 04 Avr 2009, 15:42

PIERRE.S a écrit:Observation faite par un marin du Strasbourg : la vedette des parlementaires avait à peine dépassé la jetée, boum, voici les premiers coups de canons britanniques qui nous arrivent dessus alors que nous étions toujours au mouillage………Ce fait est confirmé coté Anglais ;
Somerville n’a donc pas attendu de connaitre le résultat des dernières négociations, Gensoul y proposait un désarmement sur place, pour ouvrir le feu.


des erreurs ici, et des imprécisions à clarifier :

*Dufay, ordonnance de Gensoul, est de retour au Dunkerque 5 minutes avant le feu (rapport Gensoul 9/7); Holland est alors revenu avec Davies sur sa propre vedette, qui effectivement n'est pas loin de la jetée; mais il a rendu compte de l'échec de sa mission, via Gensoul et les signaux optiques du Dunkerque;

*Gensoul n'a pas proposé un désarmement sur place dans l'immédiat (ce que Somerville avait pour consigne d'accepter... dans la limite des 6h d'ultimatum, expirées depuis longtemps), de façon à faire les sabotages l'après-midi sous contrôle anglais.




PIERRE.S a écrit:Le dernier coup d’intox de Churchill a cette fois porté : l’arrivée imminente de renforts depuis Toulon et Alger (8h de mer).


*rien ne dit aux Anglais que ces renforts ne seraient pas partis peu après leur propre arrivée, à 7h; 7+8 = 15, ils peuvent désormais survenir à tout moment;

*ils peuvent aussi être aériens ou sous-marins : le message de Vichy est un vrai chiffon rouge, un constat d'état de guerre.

PIERRE.S a écrit:Churchill a fait son devoir : assurer sa position et limiter les risques (supposés) encourus par la Grande-Bretagne, un minimum pour un chef d’état, mais au prix fort !!


Il faut rappeler qu'il a seul sur les bras la charge de détruire le nazisme, face à des amiraux français (Darlan, Odend'hal, Gensoul et autres) qui s'efforcent de démontrer que sa signature (celle du nazisme) est solide ! et encore : le texte signé, l'article 8, est très dangereux mais présenté comme caduc, ce dont les Français sont incapables d'apporter la preuve et pour cause, les Allemands n'ont pas encore acquiescé ! (mon livre sera le premier à clarifier vraiment ce point)



PIERRE.S a écrit:Quant à la défense de Gensoul laissons le l’assurer lui-même dans sa réponse faite aux propos de Spears : « L’Amiral Gensoul a fait semblant de négocier pendant plusieurs heures pendant ce temps là il câblait à la flotte italienne le conseil de nous attaquer par derrière ».
Gensoul répond : « Tout d’abord je lui demanderai simplement quel amiral anglais, plus ou moins » stupide » que moi-même, aurait accepté de se soumettre à un ultimatum « si honorable » soit-il, présenté sous la menace des canons d’une flotte soi-disant alliée, ultimatum que M.Churchill, lui-même, savait parfaitement ne pouvoir être accepté, puisqu’il faisait saisir traitreusement et le matin même, tous les navires français se trouvant dans les ports anglais et qui justement, avaient déjà fait ce que l’on me demandait de faire…


Spears écrit des sottises (il n'y a pas eu demande de renforts, pas plus italiens que français, par Gensoul)... et Gensoul s'en empare pour se justifier ! De bas étage dans les deux cas. Intérêt historique faible.



PIERRE.S a écrit:Si j’ai essayé de faire trainer en longueur les pourparlers engagés avec l’amiral Somerville, dont je ne mets pas en doute le loyalisme, c’est que je ne pouvais arriver à réaliser que cette lutte fratricide était inéluctable et que, jusqu’au dernier moment, j’ai eu l’espoir de pouvoir l’éviter, m’astreignant à ne pas appareiller et à ne pas ouvrir le feu le premier. Quelle que soit la mauvaise foi dont fait preuve, à ce sujet, le général Spears, je reste pleinement convaincu, comme je l’ai dit devant les cercueils des victimes, que « s’il y a eu, ce jour-là une tache sur un pavillon, ce ne fut certes pas sur le nôtre ».
Cette attitude n'est pas celle d’un stupide irresponsable…..


ciel, qui a dit cela ? pas moi en tout cas, relisez mon message. Je le vois plutôt comme un militant de l'armistice (au moins après l'entrée en vigueur de celui-ci et son acceptation par Esteva et Noguès).

PIERRE.S a écrit:La question du destinataire de l'ultimatum n'a pas encore été abordé: pourquoi Gensoul en direct et non pas VICHY???


Il me semble que cela a été clarifié, dans la présente discussion, depuis longtemps. Le stade des demandes et pressions vis-à-vis du gouvernement dirigé par Reynaud puis Pétain, installé à Bordeaux puis Vichy, est dépassé. Les discussions n'ont rien donné, le désaccord est massif. Il s'agit maintenant de s'occuper des navires, là où ils sont.

Et aussi des marins, "de tous grades" comme dirait Pierre, clairement invités à désobéir. Et Vichy est invité à accepter le fait accompli, en invoquant pour sauver son cher armistice la "force majeure". Ce qu'il saura faire d'ailleurs, s'agissant des navires saisis en Angleterre ou de ceux d'Alexandrie (tenus théoriquement, au nom de l'armistice, de ne pas se soumettre sans combattre aux ennemis de l'Allemagne).

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Re: Mers el Kebir

Nouveau message Post Numéro: 249  Nouveau message de Pierre.S  Nouveau message 04 Avr 2009, 16:51

Bonjour,

Churchill, seul rempart contre le nazisme : n'est-ce pas l'idée qui sera imposée plus tard, après la guerre, pour glorifier, au-delà du necessaire, l'action de Churchill!!
Défenseur acharné de l'intégrité du territoire britannique ne conviendrait-il pas mieux, au moins pour cette période.
Spears raconte des "carabistouilles", mais c'est quand même un très proche de Churchill: inquiétant!!.
Somerville n'a pas directement accès aux informations sur les mouvements des batiments français d'Alger et de Toulon mais l'Amirauté britannique déchiffre les messages français et peut suivre tout ces mouvements, elle renvoie ensuite à Somerville ce qui lui convient.
C'est vrai la qualification de "stupide irresponsable" pour Gensoul n'est pas de votre fait, De Gaulle s'en approche.
Un reproche peut être fait à Gensoul et il n'est pas mince: ne pas avoir compris que les Anglais tireraient, avec des circonstances atténuantes: il y a encore quelques jours ils combattaient côte-à-côte. C'est là une différence fondamentale entre le mode de pensée d'un militaire "coincé" par le devoir d'obéissance et les règlements et celui d'un politique pour qui "la raison d'état" justifie tous les excès

Cdt,
Pierre


 

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Re: Mers el Kebir

Nouveau message Post Numéro: 250  Nouveau message de François Delpla  Nouveau message 05 Avr 2009, 06:25

Spears : il faudrait savoir si nous causons de Catapult ou des élucubrations à son sujet dans les milieux militants de tout poil. Mais je vous accorde que Rochas mélange volontiers les deux questions... pour accabler hémiplégiquement un côté.

Gensoul n'a pas compris que des visiteurs armés jusqu'aux dents allaient tirer s'il ne considérait pas leurs consignes avec le sérieux requis ? Eh bien il est, sur ce point, du niveau du loubard de banlieue de la chanson de Renaud "Si tu bouges t'es mort / j'aurais pas dû bouger maintenant je suis mort". C'était la base de son métier, que diable, de comprendre l'ennemi ! Certes l'Angleterre était officiellement l'allié et non l'ennemi mais elle se présentait précisément sur un ton peu officiel : tu les lâches, les Boches (Huns en anglais), ou t'es plus mon copain !

Je pensais que la discussion vous l'avait fait reconnaître, que Churchill agissait en champion esseulé de la lutte antinazie ! Opposer à cela qu'il se concentrait sur la défense des côtes anglaises, c'est s'écarter de l'histoire et de sa vision d'ensemble pour retomber dans les plus courtes vues des acteurs de l'époque : l'Angleterre se la joue et nous la joue, en fait elle ne pense qu'à elle comme toujours... le corollaire étant qu'elle va elle-même signer un armistice tôt ou tard et plutôt tôt que tard alors nos bateaux on se les garde !

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