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Nouveau messagePosté: 23 Mai 2006, 21:13
de Igor
Contrairement à ce qu'on pense souvent, la naissance de l'Etat d'Israël n'est pas une conséquence de la Shoah. Voici ce qu'en pense l'historien Georges Bensousson:

GB nie le lien entre shoah et création de l’Etat d’Israël.

Dans cette vision, la création de l’Etat d’Israël (Eretz Israel ) aurait été une compensation imposée par l’occident, au détriment des Arabes innocents.

GB relève l’absence de compassion aux EU et au Royaume-Uni
Lors de la conférence des Bermudes, le 19 avril 1943, au moment de la révolte du ghetto, on parle du sort " des réfugiés " : ce sont bien sûr des juifs dont il s’agit.
En mars, un diplomate écrit " les juifs, ce sujet bien ennuyeux "

Il note que George Marshall était hostile à la création de l’Etat d’Israël, et qu’il a presque convaincu H Truman

Le vote de la résolution de l’ONU (29 novembre 1947) serait resté lettre morte s’il n’y avait pas eu la détermination
des 600 000 personnes installées en Palestine, et l’existence d’un quasi-état.

La shoah n’est donc pas à l’origine de l’Etat d’Israël.
Au contraire, la création de cet Etat est signe d’un triple échec du sionisme :
- Echec moral : seule une minorité de juifs rejoignent la Palestine, et c’est souvent contraints et forcés pour ceux qui vivaient en Allemagne ou en Autriche.

- Echec politique : la communauté juive a été incapable de secourir les juifs d’Europe

- Echec démographique : la shoah a anéanti les réserves démographiques dont l’Etat d’Israël avait besoin pour exister durablement.


http://aphgcaen.free.fr/cercle/bensoussan2.htm

Nouveau messagePosté: 23 Mai 2006, 21:53
de Murdock
Igor,

La création de l'état d'Israel et la Shoah ne sont peut être pas liés (enfin pas directement en tout cas), mais dans les propos de Georges Bensousson, certains points m'interpellent.

Il parlent d'absence de compassion envers les juifs par les britanniques et les américains, mais est ce qu'ils en ont eu moins que les autres victimes du régime nazi (tziganes, slaves, etc ... )

Dans le lien que tu donnes, M Bensousson souligne la montée du racisme envers les juifs en France. Cela est possible, surtout qu'actuellement un amalgame a tendance à être fait entre les juifs et l'état d'Israël. Mais, le fait de clamer sa différence, la nécessité d'être traité différemment, d'être pris plus en considération que les autres (comme notamment l'emploie du mot antisémitisme), cela ne favorise t il pas le racisme envers les juifs ?

Emettons l'hypothèse suivante :

Un Français tue un juif lors d'un cambriolage qui tourne mal. Il est casi certain, au moins à travers les médias, que l'on parlera d'antisémitisme à un moment ou à un autre, même si l'acte au final n'est qu'une conséquence qu'un crime plutôt banal.

Pour répondre, un peu de manière humoristique à la conclusion de M Bensousson, les juifs ne sont ils pas victimes d'un complexe de persécution (je le répéte, ne le prenez pas au premier degré)

Nouveau messagePosté: 23 Mai 2006, 22:32
de Colonel Fabien
Murdock a écrit:Emettons l'hypothèse suivante :

Un Français tue un juif lors d'un cambriolage qui tourne mal. Il est casi certain, au moins à travers les médias, que l'on parlera d'antisémitisme à un moment ou à un autre, même si l'acte au final n'est qu'une conséquence qu'un crime plutôt banal.



Il faudrait déjà établir que ce bon Français savait que le cambrioleur était juif. Ce qui impliquerait que ledit Français le connaissait. L'hypothèse est mal choisit je trouve. Je ne pense pas que les médias spéculeraient aussi grossièrement là-dessus.
Après qu'il y ait un antisémitisme latent en France c'est plus qu'évident. Je ne serai pas étonné de voir encore aujourd'hui des disciples de Drumont ou des gens applaudir des deux mains en lisant Rebatet. Il n'y a qu'à voir le félés qui croient encore au complot judéo-maçonnique.
Que la création d'Israël soit une conséquence de la Shoah franchement je ne sais pas. Je n'ai pas étudié la question à fond. Cependant l'antisémitisme a toujours été présent à plus ou moins forte dose en France. Je ne vois pas en quoi dénoncer l'antisémitisme aujourd'hui favoriserait encore plus celui-ci. Que préconise t'on? Qu'ils se laissent marcher sur le coin de la figure? J'ose espérer que non.

Nouveau messagePosté: 23 Mai 2006, 22:38
de romsail
Non, mais pour faire taire certains on pourrait arrêter d'être sectaire dans ce pays.

Tuer un juif est un crime de lèse-majesté en France qui fait déplacer 3 présidents de l'exécutif et du législatif dans une synagogue.

Pas un président, pour une ratonnade ou une lapidation...

Pas un président, pour l'assasinat d'une jeune handiquapée...brulée vive, je le rappelle.

Point barre.

Nouveau messagePosté: 23 Mai 2006, 22:55
de Prosper Vandenbroucke
romsail a écrit:Non, mais pour faire taire certains on pourrait arrêter d'être sectaire dans ce pays.

Tuer un juif est un crime de lèse-majesté en France qui fait déplacer 3 présidents de l'exécutif et du législatif dans une synagogue.

Pas un président, pour une ratonnade ou une lapidation...

Pas un président, pour l'assasinat d'une jeune handicapée...brulée vive, je le rappelle.

Point barre.

Je crois que le poste dérive un tantinet.
Donc revenez-en au sujet initial. Et pas d'allusion politique non plus.
Merci de votre compréhension
Prosper

Nouveau messagePosté: 23 Mai 2006, 22:59
de romsail
Oui pardon, c'est de ma faute ce dérapage !!!

Nouveau messagePosté: 23 Mai 2006, 22:59
de Colonel Fabien
Murdock a écrit:Pour moi, les victimes du régime nazi doivent être honorés et reconnues en tant que tel sans tenir compte de leur nationalité, de leur religion ou de leur idée politique. En clair, je pense que l'importance accordée aux victimes juives du régime nazi a quelque chose de choquant vis à vis des autres victimes qui sont ainsi peu à peu oublié.

A qui la faute? N'y aurait-il pas aussi un problême historiographique ? Si il existe aujourd'hui un si grand nombre d'ouvrage sur la Shoah c'est aussi à cause du négationnisme. La bombe lancée par Faurisson (qui visait essentiellement la solution finale pour les juifs) dans les années 70 l'a été dans une époque ou l'historiographie sur cette question était quasiment nulle en France. La réaction des historiens a été salvatrice et a mis sur le devant nombres d'études sur le meutre méthodique de masse de tout un peuple.
Il faut aussi prendre en compte que les juifs ont les moyens de se faire entendre. La prise de conscience en France vient aussi du procès Eichmann. Qui parmi les autres victimes de l'extermination de masse pouvait prétendre mettre sur le devant de la scène international ce qu'ils ont subit? Les tziganes ? Ils n'ont que peu de poids. Les homosexuels? En France cela n'a été dépénalisé que dans les années 80 et encore aujourd'hui on peine à leur reconnaitre un statut entier de victime. (à mon arrivée ici je suis même tombé sur un type qui soutenait qu'ils avaient bien mérité ce qui leur était arrivé...O_o). Alors oui la Shoah prend une place prépondérante mais il serait aussi temps que les historiens se penchent un peu plus sur les autres victimes.

Nouveau messagePosté: 23 Mai 2006, 23:09
de Murdock
Donc, si j'ai bien compris colonel Fabien nous sommes d'accord :lol:

Pour l'hypothèse, j'avoue qu'elle est peu probable mais elle traduit bien mon sentiment général sur la question (ce que romsail a souligné également de façon assez directe :wink: )

Nouveau messagePosté: 23 Mai 2006, 23:32
de Colonel Fabien
Pour en revenir à la question de savoir si il y a corrélation entre la création d'Israël et la Shoah je vient de retrouver un article paru dans la revue L'Histoire (n°294, janvier 2005) qui restranscrit les propos par Esther Benbassa, directrice d'études à l'EPHE et chercheur invité au Netherlands Institute For Advnaced Studies.

"La naissance d'Israël en 1948 est souvent située dans une vision téléologique : du génocide à la rédemption. La dimension de sacralité que confère l'Etat hébreu sa fonction rédemptrice, directement lié au génocide, l'a longtemps mis à l'abri des critiques et a justifié son existence.
Emil Fackenheim, penseur juif d'origine allemande, considérait au lendemain de la guerre des Six-Jours que l'Etat hébreu était une réponse à Auschwitz. Ce qui fait oublier qu'Israël est l'aboutissement d'un mouvement national né dans la foulée des nationalismes européens du XIXè siècle. Certes, le génocide a hâté la reconnaissance de l'Etat des Juifs, mais celui-ci n'est nullement une création spontanée.
De plus, la prise en compte de la Shoah par Israël a été lente. A la suite de la Seconde Guerre mondiale, environ 250 000 européens ont immigré en Israël.
Or, dans les premières années de l'Etat, on a manqué d'empathie à leur endroit, on a même cultivé une attitude critique et méprisante. On se demandait ainsi comment ces Juifs s'étaient laissés conduire à l'abattoir "tels des moutons". Le génocide était perçu par les fondateurs de l'Etat et les pionniers comme la conclusion tragique et inévitable du parcours des Juifs de la Diaspora, comme une défaite juive, opposé au glorieux combat de ceux qui avaient versé leur sang pour construire Israël.
Le procès Eichmann en 1961 marque un réel tournant parcequ'il donne une voix et une légitimité aux témoins et aux victimes, rattache les jeunes Israëliens à leur passé juif et confère une identité collective aux Israëliens par-delà leurs divergences. Désormais les Juifs de la Diaspora eux aussi se confrontent au génocide et en trament la mémoire pour l'ériger en marqueur identitaire.
Progressivement, la Shoah se met à occuper une place centrale, est intégrée dans l'histoire du sionisme et projetée sur la situation moyen-orientale. L'occupation de la Cisjordanie, de Jérusalem-Est et du Sinaï après la guerre des Six-Jours, qui ouvrait la voie à l'établissement du "Grand Israël", sera interprétée comme une victoire face au risque d'un second holocauste, et par conséquent comme une nouvelle réparation. Revenir en arrière signifiait dès lors, selon Abba Eban, revenir aux "frontières d'Auschwitz".
L'arrivée au pouvoir du Likoud, parti de droite, en 1977, donnera lieu à une utilisation obsessionnelle de la Shoah pour asseoir la politique belliqueuse d'Israël. L'adversaire arabe et palestinien était de plus en plus "nazifié" et "Israël" victimisé", petit pays entouré d'ennemis nombreux contre lesquels il devait se protéger en ne comptant que sur lui. Quitte à faire fi d'une mémoire palestinienne qui, à son tour, se construisait à partir de ses propres blessures."

Nouveau messagePosté: 23 Mai 2006, 23:38
de Colonel Fabien
Murdock a écrit:Donc, si j'ai bien compris colonel Fabien nous sommes d'accord :lol:

Pour l'hypothèse, j'avoue qu'elle est peu probable mais elle traduit bien mon sentiment général sur la question (ce que romsail a souligné également de façon assez directe :wink: )

Pas tout à fait. La place prise par la Shoah dans l'historiographie ne me dérange pas. C'est juste qu'on ne donne pas autant d'importance on un peu plus aux autres victimes. On ne peut pas reprocher aux Juifs d'avoir défendu leur propres cause ni même les historiens d'avoir travaillé sur la Shoah. Cepedant en terme d'études il apparait évident qu'on délaisse le sort des tsiganes, homosexuels etc...