Salut,
peut être un premier élément de réponse dans l'utilisation de la jeunesse :
Robert Gellately, in Avec Hitler. Les Allemands et leur Fuhrër, a écrit: A la veille de la nomination de Hitler, régnait dans le pays un climat de désespoir, que reflète bien le taux de suicide : en 1932, il était plus de quatre fois plus élevé en Allemagne qu'en Grande-Bretagne à la même date, et près du double du taux prévalant aux Etats-Unis. Le sentiment était largement partagé que le pays vivait l'effondrement de ses valeurs morales et culturelles. [...Après l'installation au pouvoir de Hitler...]
L'emploi et les revenus rebondirent, l'espoir revint, surtout chez les jeunes gens, auxquels on proposait aussi de brillants programmes parrainés par l'Etat (du type "aide rurale", "année de la terre" et "Service du travail") qui donnaient une expérience du travail à la campagne. Ces projets étaient aussi faits pour cimenter la "communauté du peuple" en rassemblant des jeunes de diverses origines.
Autrement dit, des jeunes qui ont vu leurs parents galérer face à la défaite, l'occupation et la crise, découvrent grâce au nouveau régime ce qui semble être un monde meilleur comme le décrit August von Kagenek in Notre histoire (1922-1945) entretien avec Hélie de Saint Marc :
A. von KAagenek a écrit:Pour moi, le premier acte a consisté à devenir membre du Jungvolk. Le Deutsches Jungvolk réunissait les jeunes garçons jusqu'à quatorze ans. Il était faiblement idéologisé. Ensuite, les jeunes Allemands étaient accueillis dans la Hitlerjungend. Si, en 1932, celle-ci comptait déjà cent mille membres, imaginez quelques mois après l'accession d'Hitler au pouvoir, elle était déjà forte de cinq millions de jeunes Allemands. [...] J'y suis rentré volontairement à douze ans. Pas par goût pour un système sur lequel j'avais bien peu d'idées, mais pour rejoindre mes camarades de classe. Les adolescents éprouvent le besoin de vivre en meute et de se comporter par mimétisme. L'indépendance est le privilège des adultes. [...] Comme je l'ai dit précédemment, le Jungvolk, bien qu'étant le premier niveau de la Hitlerjungend, comportait peu d'endoctrinement. Marches, camps, jeux de plein air, chants : à première vue, il ne se distinguait pas beaucoup des autres mouvements de jeunesse et comblait la soif d'aventure et de vie au grand air des jeunes garçons. [...] Oui, en 1934, la formation doctrinaire au sein de la Jungvolk était faible. Un peu plus importante dans la Hitlerjungend que j'ai connue à Bad Godesberg à partir de 1936, quand j'ai troqué ma chmeise noire contre une brune. Mais nous étions jeunes et nous n'avions pas conscience des discours que nous entendions.
Nos chefs évoquaient les grandes pages de l'histoire allemande, largement mythifiées, depuis les luttes des Germains contre les Romains jusqu'à la fondation du premier Reich. Et évidemment, la Première Guerre, le funeste traité de Versailles et l'irruption du mouvement hitlérien tenaient une grande place dans cette pédagogie... Au sommet de cette construction historique se tenait le Furhër, qui luttait pour le rétablissement de l'Allemagne et aussi pour la préservation de la pureté du sang allemand. Ces discours odieux ne m'ont pas rendu raciste pour autant. Je n'aimais que la vie en forêt, les défilés et les veillées aux flambeaux, et même si j'en mesure aujourd'hui la folie, les thèses nazies n'ont pas eu de prise sur moi.
Je ne sais pas si on peut dire que la jeunesse allemande était déboussolée. Je crois qu'après avoir grandi en plein marasme économique, social et moral, ils ont découvert à l'adolescence des moments de joie intense basée sur la camaraderie et de fil en aiguille ils se sont trouvés pour une grande majorité d'entre eux embrigadés dans l'hitlérisme, les plus fanatiques embrassant le nazisme sans condition. Quand la guerre éclate, c'est tout naturellement que la majorité d'entre eux va suivre le mouvement par esprit de camaraderie.