Bonjour,
Suite a une question de Laverdure (Que grace lui en soit rendue), j'ai demande a Roger Lenevette de me donner un coup de main pour vous raconter l'histoire du mouvement ouvrier francais dans les annees 30.
Le reponse de Roger est tres personnelle, mais me semble tout a fait digne d'etre postee telle quelle sur ce forum, quitte a completer par la suite.
Attention, ca decoiffe un peu, vous me direz...
"Le Communisme
Par Roger Lenevette
Ce que je puis dire, c'est la façon dont je l'ai vécu, mais pour n'être né qu'en 1925, il me parait difficile de le raconter à partir des années 1920.
Ce que je sais par mes lectures c'est que le terme de "Gauche" est apparu en France le 17 août 1789 dans l'Assemblée Constituante avec les Girondins, que le Communisme est apparu quelques années plus tard avec la "Conjuration des Egaux" qui se termine avec Babeuf guillotiné en 1796. que ce terme réapparaît avec la Commune de Paris dans les années 1870 et que Karl Marx obligé de fuir son pays vient en France y découvrir le communisme auprès d'hommes comme Saint Simon et etc …
Que ce terme Communisme est Français et bien de chez nous et qu'il a fait rêver un certain nombre de générations dont la mienne.
Que pour moi comme pour ceux de ma génération et celle de mes parents il se définissait surtout comme une meilleure répartition du travail au profit de ceux qui le produisaient.
L'Internationalisme comme on a voulu le définir depuis plus de soixante ans a surtout ete utilisé pour faire de l'anti-communisme sous le prétexte qu'on aurait été plus au service d'un pays étranger sous pretexte que la direction de ce parti s'était mise sous les ordres du pays des sovièts dés les années 1920.
Ce qui était vrai pour cette direction ne l'était pas pour les hommes de cette base, qui ont d'abord été des patriotes sans pour cela rejeter la notion d'internationalisme.
On peut être patriote, donc aimer son pays avant tout, sans pour cela être nationaliste en considérant son pays comme supérieur aux autres. On peut donc aimer et respecter les autres pays sans pour cela renier son pays. C'est sans doute toute la différence qu'il y avait entre les communistes de base que nous étions et la direction de ce parti.
Pourquoi on se considérait comme communistes ?
Parce que ce terme a plus ou moins été adjoint à la Russie qui a fait sa révolution pendant la Première Guerre Mondiale et que c'est ce peuple qui a pris le pouvoir dans ce pays à partir de 1917 et qu'à partir de ce moment les produits du travail étaient mieux répartis entre ceux qui le produisaient.
Que également, les terres étaient données à ceux qui la cultivaient, alors qu'en France les cultivateurs la travaillaient au profit de ceux qui leur consentaient un bail de trois, six ou neuf ans et vivaient pour la plupart dans la misère au même titre que le lot des petits commerçants et des artisans.
C'est d'ailleurs toujours vrai à notre époque mais c'est ce que nous souhaitions voir changer à la Libération mais qui n'a pas autant évolué que nous le souhaitions, même si par les lois sociales qui sont sorties des accords obtenus en février 1944 à Alger, un mieux a été obtenu pour le monde du travail. A ce sujet, nous ne pouvons que rendre hommage au Général De Gaulle qui a été un homme de parole, donc d'honneur, ce que nous n'avons guère vu depuis la Libération en dehors de lui.
Pour le Bolchevisme, ce mot est sorti du Congrès du Parti des Travailleur Russe en 1903. Il signifiait Majorité et a été échangé avec terme Communisme après les années 1920 pour mieux utiliser l'anti-communisme.
Le terme Communistes était utilisé depuis un certain temps en France par une grande partie du monde du travail qui se reconnaissait dans ce terme pour plus de Justice Sociale et dans sa définition d'origine.
C'est ainsi par exemple que dans mon groupe FTP nous étions neuf qui nous considérions comme communistes alors qu'un seul (Eugène Logeais), responsable du groupe, avait vraisemblablement sa carte du parti avant la Guerre. Son frère Isidore Logeais à mis en place une Cellule du Parti Communiste à Vieux Vy sur Couesnon après la Guerre, Eugène ayant été obligé d'aller travailler à Rennes du fait que sa ferme avait été pillée et brûlée le 8 juin 1944 par la Milice.
Les autres membres du groupe : mon père, mon frèreet moi travaillant à la Mine, René Chapon commis de ferme, Pierre Coirre maçon, Françis Aubrée cultivateur, Jean Piette cafetier, Jean Ferrand minotier.
Tout cela pour expliquer pourquoi et comment nous étions ou nous nous sentions communistes, et nous n'étions pas différents de beaucoup d'autres qui quoique l'affichant moins, aspiraient également à plus de justice sociale.
Ensuite en 1948 je suis remonté sur Paris pour travailler, et rapidement j'ai renoué avec le syndicat CGT où de nouveau je me retrouvais au contact des communistes pour continuer le combat vers plus de Justice Sociale. Les magouilles de la direction de ce parti, nous ne les avons découvertes qu'un certain temps après la fin de cette Seconde Guerre Mondiale avec ce qui s'est passé dans les pays d'Europe Centrale et particulièrement à Prague dont la presse s'est faites largement l'écho pour faire de l'anti-communisme.
Mais la direction de ce parti s'était déconsidérée avec les procès entamés contre des hommes tels que Louis Pétri responsable des FTP de notre région, qui en avaient été l'honneur pendant la guerre.
Le communisme était devenu difficile à vivre avec toutes les campagnes de presse organisées pour dénoncer les méfaits du Stalinisme, dénonçant les magouilles de cette direction. Pour nous, Staline avait été notre symbole d'espoir pendant la guerre, et il était difficile de croire tout ce que l'on entendait à son sujet.
C'était d'autant plus difficile, qu'avant la guerre, dans la presse, il y avait souvent été question d'accord entre la France, la Grande Bretagne et l'Union Soviétique qui étaient reportées d'années en années sans qu'on sache bien pourquoi, et que finalement cela s'était terminé par l'accord germano-soviétique de 1939 qui nous paraissait d'autant plus troublant que les accords de Miunich n'avaient jamais trouvé l'assentiment des Français qui les dénonçaient.
Selon nous, Staline avait voulu gagner du temps et nos gouvernement n'avaient rien fait pour s'allier avec lui mais bien le contraire depuis les années 1933-1935.
Finalement les Allemands attaquaient la Russie en 1941 et c'était Stalingrad que les Allemands n'arrivaient pas à prendre pour finalement y être battus et se rendre pour la première fois. Puis Moscou où ils étaient arrêtés puis repoussés. Puis Koursk, etc…
La campagne contre le bolchevisme utilisée pour faire de l'anti-communisme…
L'utilisation de ces deux mots pour ajouter plus de confusion dans l'esprit des travailleurs
Ce communisme qui était rentré dans beaucoup de foyers français et qu'il fallait détruire à cause des idées qu'il véhiculait."