pierma a écrit:C'est vrai que De Gaulle devait une part de sa légitimité à la Résistance, mais il la devait surtout au fait d'avoir mené la France Libre d'un bout à l'autre de la guerre.
Effectivement, mais les alliés ont toujours voulu débarquer De Gaulle et de le remplacer par un autre général. S'ils y étaient parvenus, je pense que la France libre l'aurait accepté (en faisant drôlement la grimace) car ce sont des militaires. La résistance, c'est le peuple qui refuse, c'est la France, l'autre France, celle sur laquelle on s'appuie pour battre l'Allemagne nazie. C'est, il me semble, pour ça que Douzou dit que De Gaulle doit sa légitimité à la résistance (surtout après l'affaire de Dakar).
pierma a écrit:De Gaulle, lui, ne voulait à aucun prix avoir dans les pattes des Comités Civiques ou des Comités d'Action prenant une part de l'autorité de l'Etat. Il faut dire que dans certains départements régnait à l'automne 44 une véritable anarchie, dans laquelle les préfets n'arrivaient pas à se faire obéir. Par exemple, il a été très difficile de garantir le rôle de la justice et des procès légaux dans l'épuration : partout fleurissaient les tribunaux populaires et les exécutions arbitraires. D'où une remise en ordre dans laquelle De Gaulle a fait preuve d'autoritarisme en signifiant à tous ces mouvements indépendants que leur rôle était terminé. Ce qui ne l'a pas empêché de prendre de nombreux résistants dans son gouvernement ou comme préfets.
Par contre, il ne faut pas oublier que la justice légale fut également arbitraire, et pas qu'un peu. La magistrature du pays à la libération était la même que celle de Vichy, idem pour la police. On a enlever du circuit quelques éléments assez "corrompus", mais pas tous. J'imagine que certains résistants qui furent déportés par ces mêmes juges, durent faire une drôle de tête en voyant les mêmes lascars jouer du maillet au tribunal, à leur retour.
Il y a une image qui a fortement marqué les esprits, c'est celle du résistant qui se fait justice. Qui attrape les femmes, pour les tondre et les jeter avec leur enfant sur les routes. Loin de moi de vouloir dire que ce ne se soit pas passer, mais les médias ont focalisé dessus, un peu comme on l'a fait sur la terreur au moment de la révolution française ou pour la commune qui aurait mis le feu à Paris et tué des curés. C'est faire abstraction à chaque fois des exactions commises sur le peuple par le pouvoir en dénonçant ce même peuple pour ses gestes violents. Le fait de transformé le peuple qui fut victime, en bourreau, permet de tenir celui-ci. Il y a là, une belle manipulation des esprits.
pierma a écrit:Il faut noter aussi que bon nombre de résistants se sont fait élire députés, et se sont heurtés à De Gaulle en lui imposant une constitution de la 4ème République dans laquelle le président n'avait aucun pouvoir, ce qui l'a amené à démissionner début 46.
C'est vrai, mais combien de députés, maires, préfet, issus de l'ancien régime. Je ne dis pas que tous ont participé activement au vychisme (car pour ça il aurait fallu les juger), mais tout de même un certain nombre de ces mécréants n'ont jamais été inquiétés.Je me souviens avoir lu, il y a une dizaine d'années, le témoignage d'une résistante normande, institutrice, arrêtée dans son école. Elle avait caché des preuves dans le sac d'un élève. Le père, ne voulant certainement pas d'ennui, porte ces preuves au maire qui lui, fait des pieds et des mains pour que le préfet donne cela aux autorités (ce dernier s'y refusait). L'élu passa outre le préfet et alla voir la police française pour faire tomber l'institutrice communiste. À la libération, le maire sera réélu et jamais inquiété. L'institutrice survivra à la déportation.
Je crois qu'en France il eut bon nombre de ces histoires avec des représentants publics criminels et d'autres qui tentaient de limiter les excès des nazis et de leurs amis sur les populations.