Post Numéro: 444
de Nicolas Bernard
04 Nov 2008, 20:09
Que vous dites.
En attendant votre publication intégrale des documents relatifs au suicide de Himmler que vous avez pu retrouver avec trois ans de retard, et comme vous ne savez analyser le journal du camp 031 sans préjugé conspirationniste (je n'imaginais pas que vous iriez un jour accuser de complicité de conspiration le capitaine Selvester, dont vous avez fait, à coup de déformations et d'extrapolations de son témoignage de 1963, votre témoin vedette), vous ne vous apercevez même pas de ses différents apports :
1) Quoique la chose soit sans intérêt pour ce qui concerne la réfutation de votre théorie du complot, il confirme les horaires déjà rappelés par ailleurs de la détention de Himmler : arrivée au camp vers 18 h 30, identification probable à 19 h, départ du camp vers 22 h 40.
2) Selvester laisse entendre, dans ce journal, qu'il a certes fait surveiller Himmler, mais qu'il n'a pas été séparé de ses adjoints, ce qui sera vingt ans plus tard confirmé par le colonel Murphy - à moins qu'un document en votre possession, comme les rapports dudit Murphy, n'aillent prétendre le contraire (et vous comprendrez pourquoi j'attends de vous que vous les publiiez).
3) La fouille initiée Selvester ne paraît pas avoir été très complète : ce n'est qu'à l'arrivée de Murphy qu'il nous est précisé qu'il est déshabillé et qu'il est forcé de changer de vêtements, là encore un point confirmé vingt ans plus tard par le colonel Murphy.
4) Ce même journal nous informe que Himmler déguste un seul sandwich au fromage et du thé, non à l'initiative de Selvester... mais à sa demande. Ce qui jette une toute autre lumière sur les affirmations, fort tardives, du capitaine quant à sa fameuse "ruse" des sandwiches, qui du coup n'en était pas une. A moins d'un document contraire qui serait en votre possesson et qu'il serait opportun, de votre part, de publier, il semble bien que le capitaine Selvester ait proposé de la nourriture et du thé à Himmler, non par conscience professionnelle, mais par simple volonté de bien traiter le prisonnier. Toujours est-il qu'il confirme en 1945 qu'aucun sandwich, ni aucune boisson, n'a été servi au prisonnier après l'arrivée du colonel - autre point que confirme le témoignage de ce dernier en 1964.
Bref, ce journal du camp 031, signé Selvester, paraît remettre profondément en cause la version des événements que celui-ci va apporter vingt ans plus tard, tout en corroborant au contraire grandement le témoignage du colonel Murphy de 1964, sauf preuve contraire en votre possession. La surveillance de Himmler a certes été constante, mais la fouille n'a visiblement pas été jusqu'à l'exploration de chaque repli de son corps, en attendant l'arrivée de Murphy, outre que Selvester a, semble-t-il, transformé vingt ans plus tard sa générosité envers le Reichsführer en ruse destinée à lui faire perdre sa seconde capsule de cyanure... dont il ne semble même pas connaître l'existence lorsqu'il rédige le journal du camp en mai 1945.
D'où mon hypothèse suivante, en attendant mieux. Selvester, en 1963, s'efforce de faire croire qu'il a fait tout son possible pour prévenir le suicide du Reichsführer 18 ans plus tôt, ce qui ne me paraît pas exact. Il s'attribue des initiatives à mettre au crédit du colonel Murphy. Il n'a même pas pris la peine d'isoler Himmler avant l'arrivée du colonel. Par souci (fort louable) de respecter la convention de Genève, il a servi de la nourriture et du thé au prisonnier, sur demande de ce dernier, et l'a traité avec respect - ce qui est tout à son honneur, et s'avère psychologiquement judicieux -, ce qui deviendra 18 ans plus tard une tentative d'endormir sa méfiance et de le pousser à trahir la présence de la capsule de cyanure. Peut-être ne tient-il pas à être assimilé à un pro-nazi ?
Pas besoin d'accuser Selvester de mensonge. Je pense au contraire que sa mémoire a, en toute bonne foi, retravaillé cet épisode de sa vie, jusqu'à ce qu'il se convainque avoir fait plus qu'il n'a fait.
Hypothèses, bien sûr. Mais si François possède des documents de nature à les corroborer ou les contredire, qu'il les produise. Il m'intéresserait particulièrement de lire les deux rapports, l'un bref, l'autre plus circonstancié, du colonel Murphy émis à sa hiérarchie au matin du 24 mai 1945.
« Choisir la victime, préparer soigneusement le coup, assouvir une vengeance implacable, puis aller dormir… Il n'y a rien de plus doux au monde » (Staline).