LA REDDITION FINALE ET LES REGLEMENTS DE COMPTES.Le maggiore Vanna à la tête du II° battaglione de la IIIa Legione GNR di Frontiera quitte Tirano le 27 avril pour se diriger vers le lac de Côme où il entend faire la jonction avec la colonne de Mussolini.
Au niveau du Santuario della Madonna, les véhicules sont pris à parti par les partisans qui tirent des hauteurs. La mort dans l'âme, Vanna retourne à Tirano. Durant la nuit, il décide, avec 200 volontaires de reprendre la route vers le lac de Côme. Il pense que le Duce est arrivé, ou du moins ne va pas tarder à rejoindre Sondrio. Il ne sait pas que Sondrio est aux mains des partisans. A Ponte Valtellina, une voiture vient vers les fascistes, à l'intérieur, le chef partisan Mario Abbiezi dit Maio. Il a avec lui le général Onori, chef des forces de la Valtellina. Il demande à Vanna de déposer les armes, le fascisme est arrivé à sa fin : Mussolini a été capturé et exécuté.
Quelques jours plus tard, Vanna et des centaines de brigadisti seront sortis de leur geôle et exécutés sommairement.
A Tirano, la Milice s'est retirée dans la caserne Torelli et avec une poignée d'artilleurs SS italiens appartenant à la 29.Waffen-Grenadier-Division der SS Italien, repousse les assauts de la division alpine Valtellina, composée de partisans giellisti non-communistes (du parti Giustizia e Liberta).
Darnand a laissé un témoignage des combats de Tirano : «le 25 avril (c'est une erreur, il s'agit du 28 avril, ndA) à 5 heures du matin, attaque généralisée, après un bombardement par mortiers qui touchent au but à chaque coups. La défense s'organise : les fenêtres sont tenues par les fusils mitrailleurs, les mitrailleuses et les fusils. Des créneaux sont montés en utilisant des sacs de terre, des matelas, des bancs. Tirs d'interdiction de notre part mais, à partir de dix heures, les feux des partisans, à armes automatiques nous atteignent de très près. Toute la population tire des immeubles voisins (il s'agit de l'hôtel Stelvio, ndA). Presque de suite, Fouques et le capitaine Rollet, commandant la compagnie lourde (ancien LVF et Croix de Fer), sont tués ainsi que plusieurs chefs de section et francs-gardes. Carus, Fontaine, de Pous sont parfais mais un peu ignorant du combat d'infanterie. Je fais descendre tout le personnel inutile à la cave car les mortiers démolissent les toits et causent des pertes. Dans la cave, Hoareau organise son poste de secours. Suzanne (Charasse, la secrétaire de Darnand ndA) le seconde et reçoit le dernier soupir de nombreux camarades.
La situation s'aggrave d'heure en heure. Je me demande comment tout cela va se terminer. Les officiers sont décidés à se défendre et à mourir. Je circule partout et réconforte les hésitants. Distribution de tabac, chants et musique.
Vers midi, je fais monter deux pièces de 45 antichars dans les étages. C'est un groupe de SS italiens qui sert les pièces. Tir à vue sur les immeubles voisins. Nous nous dégageons tant soit peu et respirons de midi à deux heures. Ensuite, reprise, mortiers et infiltrations ennemies jusqu'au mur d’enceinte. Défense avec toutes nos armes et canons. »Les Miliciens perdent six des leurs, une trêve est négociée, et après concertation, les partisans italiens acceptent de concéder à Darnand l'honneur des armes. Après une dernière revue, les Miliciens sont consignés et envoyés à Coltano, immense camp de prisonniers de guerre.
Fritz Birzer et ses hommes passent la frontière suisse pour rejoindre l'Allemagne, la mission a échoué mais Birzer n'a plus à craindre pour sa vie, Hitler s'est suicidé dans le bunker de la Chancellerie.
Sur le front des Alpes Occidentales, les Alpini de la division Monterosa et les paras du régiment Folgore, après avoir mené des combats à plus de trois mille mètres d'altitude cotre les Chasseurs Alpins français se replient en bon ordre sur Aoste et se livrent aux troupes US qui leur accordent l'honneur des armes.
Wolff, bloqué à Bolzano envoie deux plénipotentiaires partis d'Annecy munis des lettres de créance pour signer la reddition sans condition à Caserte auprès des Alliés: le SS-Sturmbannführer Eugen Wenner pour le compte de Wolff et des SS et l' Oberstleutnant Viktor Schweinitz pour le compte de von Vietinghof représentant la Heere et le Maréchal Graziani pour les forces armées de la RSI. Arrivés en civils, ils signent l'acte de capitulation le 29 avril à 14h00 devant le général US Morgan, les hostilités cessant le 3 mai 1945.
Les Cosaques de l'Ataman Krasnov qui étaient arrivés durant l'été 1944 dans le Frioul pour créer un Kosakenland, après avoir livré de durs combats contre les partisans à Ovaro, se replient en Autriche fin avril pour se livrer aux Alliés qui les remettront aux autorités soviétiques avec le sort tragique que l'on connaît.
Pour les troupes fascistes qui se rendent, c'est le moment des règlements de compte. Malgré la promesse non tenue des partisans, des milliers de fascistes sont assassinés après une parodie de procès, parfois après avoir été torturés, allant jusqu'à être jetés vivants dans des hauts-fourneaux comme à Gênes. Des exécutions de masse ont lieu dans tout le nord de l'Italie :
-à Rovette, le 28 avril, 43 très jeunes Miliciens de la Legione GNR Tagliamento sont fusillés, le plus jeune ayant 16 ans. Giuseppe Mancini, figurant parmi les victimes est le neveu de Mussolini, fils de sa sœur Edvige ;
-à Codevigo, entre le 26 avril et la mi-juin, 136 Miliciens de la GNR et des Brigades Noires sont fusillés ;
-à Oderzo, 113 personnes fusillées après qu'un sauf-conduit leur ait été accordé ;
-à Vercelli, dans l'hôpital psychiatrique qui sert de prison, une soixantaine de fascistes sont exécutés
parmi lesquelles les femmes du Service Auxiliaire, les corps sont jetés dans le canal Cavour ;
-à Schio, 54 fascistes sont prélevés de la prison et fusillés...
-à Argelato, 29 exécutions sommaires, parmi les victimes, la fratrie Govoni de sept personnes …
Il existe des divergences concernant le nombre des victimes de l'épuration qui a pris des caractères arbitraires: des notables, des religieux, des Carabinieri, des innocents ont été assassinés pour des motifs qui n'ont rien à voir avec le fascisme. D'après Giampaolo Pansa, on peut estimer à 30000 le nombres de morts allant d'avril 1945 à la fin de 1946.
L'exécution de Mussolini, en compagnie de sa maîtresse Clara Petacci n'a cessé de donner lieu à des controverses, des contradictions, de faux témoignages voire même des élucubrations (concernant la culotte de Clara Petacci). Beaucoup de personnages ont préféré se taire, une omerta qui hante encore les historiens. Des protagonistes de l'affaire ont été assassinés juste après la fin de la guerre, comme Luigi Canali (Neri) qui avait proposé la cachette des de Maria ainsi que sa maîtresse Giuseppina Tuissi (Gianna), qui avait escorté Mussolini et la Petacci à Bonzanigo. Ces témoins génants ont disparu.
Parmi ceux qui ont menés des enquêtes sérieuses et approfondies, on peut citer le journaliste Franco Bandini, l'historien fasciste Giorgio Pisano et le grand Renzo de Felice. Pierre Milza a rédigé Les Derniers Jours de Mussolini (Fayard) en reprenant les différentes thèses, mais certaines parts d'ombre n'ont jamais été levées et ne le seront certainement jamais, peut-être un jour, du côté de la Via delle Botteghe Oscure à Roma, siège du PCI, les archives endormies depuis soixante-dix ans révéleront les raisons d'un mystère si bien entretenu.
SOURCESArrigo PETACCO: Il superfascista, vita e morte di Alessandro Pavolini. Mondadori.
Franco BANDINI: Les dernières heures de Mussolini. France-Empire.
Federico CIAVATONE: Brigate Nere, le Mobili, le Operativi, le Autonomi. Lo Scarabeo
Pierre MILZA: Les derniers jours de Mussolini. Fayard.
Laurent BERRAFATO: Le Crépuscule du fascisme. Godefroi de Bouillon.
Marco BAROZZI: le ultime ore della RSI.
Giampaolo PANSA: Il sangue dei vinti.
Vincenzo COSTA: L'ultimo Federale.
Frederick F. DEAKIN: L'Axe brisé, l'amitié brutale d'Hitler et Mussolini. Stock.
Pier Arrigo Carnier : L'Armata Cosacca in Italia. De Vecchi.
Peter Whittle : Un après-midi à Mezzagra. Fayard.
Archives Corriere della Sera
photos personnelles
Siamo 30 d'una sorte, 31 con la morte. Tutti tornano o nessuno. Gabriele d'Annunzio, Canzone del Quarnaro.