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La nouvelle "Désespoir est mort" de Vercors

Nouveau messagePosté: 03 Oct 2019, 16:24
de Fab
Dans la nouvelle Désespoir est mort, on décrit le nouveau quotidien d'officiers français cantonnés dans un village des Alpes (un personnage lit "Le petit Dauphinois") après, je pense, l'armistice du 22 juin 1940. Aucune date n'est mentionnée dans la nouvelle.

Un indice : "Dans ce mess hétéroclite, où le désastre avait rassemblé une douzaine d’officiers venus de toutes parts, sans point commun sinon celui de n’avoir pas combattu, la note dominante n’était pas le désespoir. "

Quelqu'un peut-il expliquer cette phrase : "Il avait, lui, participé à « notre » bataille : à la bataille postiche, au déshonorant simulacre qui nous en avait plus appris, en ces trois jours serrés entre deux armistices, sur l’infamie dérisoire de certains hommes couverts d’honneurs, que l’expérience de toute une vie."

Voici un autre passage qui pourrait éclairer la période :
"Il lisait le Petit Dauphinois. C’était un des premiers qui nous parvînt, après ces quinze horribles jours. Et soudain il me le tendit, silencieusement et rageusement, marquant du pouce l’éditorial, et tandis que je lisais à mon tour, il garda posés sur moi ses yeux lumineux. Oui, ce qu’il me fit lire dépassait tout ce qu’on pouvait attendre. Ce que le plus grand mépris des hommes n’aurait suffi à nous faire croire sans preuve. On nous ressortait, simplement (n’oubliez pas que c’était la première fois), Jeanne d’Arc, Sainte-Hélène, et la perfide Albion. Dans cette même colonne, sous cette même signature, où trois semaines plus tôt le même homme nous parlait encore, avec une délectation sadique, des milliers de barbares teutons que la Lys et la Somme charriaient, sanglants et putrides, vers la mer."

Si j'ai raison de penser qu'il s'agit de la période de démobilisation, quelles étaient les circonstances des officiers français ? Dans cette nouvelle, ils semblent pouvoir se déplacer en liberté au moins dans le village, et il y a un mess où tous les officiers prennent leurs repas.
Qu'en était-il des simples soldats ?

Re: La nouvelle "Désespoir est mort" de Vercors

Nouveau messagePosté: 03 Oct 2019, 17:25
de brehon
Bonjour,
Fab a écrit:après, je pense, l'armistice du 22 juin 1940.

Et même après le 24 juin car:
Fab a écrit:à la bataille postiche, au déshonorant simulacre qui nous en avait plus appris, en ces trois jours serrés entre deux armistices, sur l’infamie dérisoire de certains hommes couverts d’honneurs, que l’expérience de toute une vie."

Il est fait référence à la période entre les armistices franco-allemand et franco-italien.

Fab a écrit:C’était un des premiers qui nous parvînt, après ces quinze horribles jours.

On doit être dans les jours immédiatement après le 24 juin. Les "quinze horribles jours" étant la durée de la guerre franco-italienne.

Re: La nouvelle "Désespoir est mort" de Vercors

Nouveau messagePosté: 03 Oct 2019, 20:06
de Fab
Ah, merci !
Et savez-vous quel était le sort des officiers français pendant cette période, que leur avait-on dit de faire ?

Re: La nouvelle "Désespoir est mort" de Vercors

Nouveau messagePosté: 03 Oct 2019, 21:48
de Alfred
Ne croyez surtout pas que Tous les officiers avaient une attitude uniforme.......La France était divisée,ses officiers également.Dans le régiment où se trouvait mon père ,c'en était ainsi depuis au moins janvier 1940.quand la 10ème batterie du 309ème RATT fut au complet...Les insultes volaient bas,quelques jeunes excités s'étaient même battus devant la troupe à la sortie du mess:"salaud de communiste!" à quoi répondait"ordure de royaliste!".....A l'annonce de l'armistice une partie du personnel,en partie les Alsaciens Lorrains avait les larmes aux yeux.Enfin,ils étaient en vie,alors,ils ont savouré de bons crus pour tenter de se réjouir le coeur ,ensemble, avant de se séparer tout en créant une "Amicale Régimentaire"Tel est le témoignage que m'a laissé mon père sur cet après armistice........

Re: La nouvelle "Désespoir est mort" de Vercors

Nouveau messagePosté: 04 Oct 2019, 13:56
de Fab
Alfred a écrit:Ne croyez surtout pas que Tous les officiers avaient une attitude uniforme.......La France était divisée,ses officiers également.Dans le régiment où se trouvait mon père ,c'en était ainsi depuis au moins janvier 1940.quand la 10ème batterie du 309ème RATT fut au complet...Les insultes volaient bas,quelques jeunes excités s'étaient même battus devant la troupe à la sortie du mess:"salaud de communiste!" à quoi répondait"ordure de royaliste!".....A l'annonce de l'armistice une partie du personnel,en partie les Alsaciens Lorrains avait les larmes aux yeux.Enfin,ils étaient en vie,alors,ils ont savouré de bons crus pour tenter de se réjouir le coeur ,ensemble, avant de se séparer tout en créant une "Amicale Régimentaire"Tel est le témoignage que m'a laissé mon père sur cet après armistice........


Oui, en effet, la nouvelle met en lumière ce dont vous parlez. Voici quelques citations :
"Il y avait là un homme que j’appellerai le Capitaine Randois. Je ne l’aimais pas. Dès avant la défaite, tout en lui m’était ennemi : son caractère hautain, ses convictions monarchiques, son mépris de la foule. J’évitai de lui parler. Je craignais qu’il ne laissât, d’un mot, deviner la satisfaction que les malheurs de la République, le triomphe de la tyrannie, devaient avoir fait naître en lui."

"Votre Maurras se range sans restriction derrière le Maréchal. »

Quand il parlait, il semblait que son accent fût noyé dans une gorgée d’eau, qu’on se fût attendu à voir couler entre ses lèvres molles. « Je suis un vieux radical, mais, dans le malheur de la patrie, il faut oublier ses convictions. Votre Maurras, bravo, c’est très bien. Que penseront nos vainqueurs, selon vous ? »"

" On nous ressortait, simplement (n’oubliez pas que c’était la première fois), Jeanne d’Arc, Sainte-Hélène, et la perfide Albion. Dans cette même colonne, sous cette même signature, où trois semaines plus tôt le même homme nous parlait encore, avec une délectation sadique, des milliers de barbares teutons que la Lys et la Somme charriaient, sanglants et putrides, vers la mer."

Re: La nouvelle "Désespoir est mort" de Vercors

Nouveau messagePosté: 04 Oct 2019, 14:53
de JARDIN DAVID
Tout cela ce sont des mots ... Plus ou moins bien rangés dans ce qu'on nomme des "phrases", lesquelles s'ordonnent en "paragraphes" dont la succession peut accoucher d'un "livre". Très utile en temps de guerre.
Préférons le dialogue d'un "Taxi pour Tobrouk" : un con qui marche ira toujours plus loin qu'un intellectuel assis.
JD