Je vais vous donner un exemple de la "dissolution" de l'évènement militaire (ou assimilé) dans le temps.
A moins de 10 km de ma villégiature, il existe le champ de bataille de Froeschwiller (6 août 1870), où les pertes des deux côtés, françaises et "prussiennes", avaient été des plus conséquentes... Les Français, moins de 40 000 hommes, y avaient perdu 11 000 morts & blessés, avant de retraiter, plus 9 000 prisonniers, les Allemands - 50 000 hommes, puis 80 000, dans la dernière partie de la bataille -, 10 000 morts & blessés. Sur la surface relativement étroite du champ de bataille principal (Elsaßhausen/Froeschwiller/Woerth), de l'ordre de 2000 m de côté, on trouve un nombre impressionnant de stèles et monuments en tous genre - certains sont "colossaux" - qui ont été érigés par les deux camps, les derniers ayant été construits par les Français, à l'occasion du centenaire de la bataille, en août 1970.
Tout y est soigneusement entretenu, mais je peux vous dire, y faisant régulièrement une "ballade", que la présence de visiteurs, intéressés par la bataille, tend vers "zéro"! La quasi-totalité des "visiteurs"- dont la curiosité a , le plus souvent, été avivée par un banal panneau indicateur "champs de bataille 1870" - ne connait ni les tenants , ni les aboutissants de la bataille et sont, en général, très surpris quand on leur annonce le bilan humain. Sans chercher à faire des comparaisons "hors de propos" entre Français & Allemands, ces derniers sont, souvent, mieux informés sur la raison d'être de cette bataille (et des combats en Lorraine, le même jour).
Côté français, çà frise, hélas, le vide sidéral, la défaite de 1870 ayant été "enterrée", depuis longtemps, sous la Guerre de 14-18 et celle de 1939-45. Même localement, notre belle jeunesse est infoutue d'en préciser le contexte... et çà ne concerne pas que les jeunes!
Il faut, aussi, y voir nos méthodes pédagogiques pour l'instruction de notre Histoire nationale. Les profs, pour leur très grande majorité, ne sont pas en cause, mais les programmes qu'ils sont amenés à respecter, oui! Parmi nous, il y a des profs d'histoire, je serais curieux de connaitre le temps qu'il leur est imparti, durant leurs cours, pour évoquer la guerre de 1870! Si, de leur propre chef, ils envisagent d'y apporter un minimum de précisions, ils risquent de mettre en vrac le reste du programme de l'année scolaire! Si l'élève a la possibilité de suivre des études universitaires d'histoire, il pourra, en principe, combler ses lacunes... mais ce n'est même pas certain! Sinon, pour ceux qui se limitent au bac "général" (!) ou qui s'orientent, après, sur des branches spécialisées, leurs connaissances sur deux siècles d'histoire française se limiteront, bien souvent, au pensum qu'ils auront du pondre en terminal sur l'influence de la production agricole sur la production militaire soviétique, les "bienfaits" (supposés) de la Société des Nations, quant il ne s'agit pas du honteux coup d'arrêt fasciste qu'avait subi la République socialiste espagnole, à partir de 1936 - promis, juré, tous ces sujets d'interro, je les ai lus de mes propres yeux!
Un, le temps passe, deux, par voie de conséquence, l'instruction pédagogique de l'Histoire évolue nécessairement. La Guerre Froide, la Guerre du Vietnam - sans parler de celle d'Indo, pour les Français! - sont, déjà, au rencart des vieilleries. Le III. Reich n'a, désormais, d'intérêt que sous son seul aspect "Crime contre l'Humanité" - on expédie nos gamins pour visiter Auschwitz, Birkenau, etc., ou, quand les moyens financiers sont limités, Oradour-sur-Glane! -. Un vrai champ de bataille, quelque soit sa situation géographique, est beaucoup plus compliqué à décrire, car, entre temps, la reconstruction et l'évolution agricole ont fait leur œuvre! Par exemple, sur le champ de bataille de Froeschwiller, en août 1870, il y avait des vignes et des champs de houblons (avec leurs poteaux !), parmi lesquels la cavalerie française avait chargé ; sauf que, de nos jours, il n'y a plus un seul pied de vigne, ni la moindre culture de houblon!
. Dans les années 1970, les villages "martyrs" du département de la Meuse, réduits à néant par les pilonnages d'artillerie et les combats, qui n'étaient plus que des tas de ruines, enfouis sous 60 ans de végétation, étaient, juste, repérés par une panneau d'entrée et de sortie, que la vitesse, limitée volontairement à 70 km/h, sur la route nationale ou départementale, permettait de traverser en moins de 10 secondes!
Or, là, je viens de vous parler d'évènements récents, éloignés d'un peu plus de 150 ans - pour ce qui concerne la Guerre de 1870 -. Il vaut mieux oublier la Guerre de Cent Ans, qui aura, pourtant, des répercussions essentielles sur la construction étatique de la France! Quant à Napoléon Ier, la propagande intensive anglaise en a, désormais, fait un abominable dictateur assoiffé de sang! Amen!