Le problème, c'est que vos sources sont les mêmes que celles de Paxton. Des compte-rendus nazis... Faut-il les prendre au pied de la lettre ? Ce n'est pas mon avis.
Message par BRH » Samedi 23 Août 2008 17:08:10
Je remets ici ce petit texte que j'avais publié sur histoforums, avant qu'il ne soit retiré...
Ceci permettra aux uns et autres de se faire une idée de mon positionnement par rapport "aux heures les plus sombres de notre histoire". Je préviens qu'il ne s'agit pas d'une apologie de Vichy comme quelques-uns m'en accusent déjà. J'ai trop été pétri par le Gaullisme (mais aussi par sa légende) pour tomber dans cette difficulté. Comme beaucoup, j'avais lu Raymond Aron sur cette période noire ou même Henri Amouroux. Des témoignages recueillis auprès de mes proches ou de personnalités que j'avais rencontrées (et souvent des camps opposés, comme André Astoux ou la belle-fille du général Brécard), j'avais un positionnement classique sur Vichy: une pétaudière très vite à la dérive qui ne sût pas résister avec efficacité aux exigences allemandes. La révolution paxtonnienne s'abattit alors sur la France, et -à partir des années 80- fit florès en recrutant une multitude d'adeptes. Sans être un critique et un commentateur averti de toute cette littérature, j'en ai lu assez pour m'en faire une certaine idée qui sera probablement considérée comme "répugnante". J'en prends le risque. Voici :
"Décidément il est bien difficile d'étudier certaines périodes de notre Histoire ! Scrutées de l’extérieur, avec des idées préconçues, elles apparaissent souvent déformées. Aujourd’hui, tout un courant de l'historiographie française s'est mis à la remorque du célèbre universitaire américain, Robert Paxton, professeur à l’Université de Columbia. Ses représentants paraissent épouser les querelles du XXème siècle, au lieu de s’en dégager.
En résumé, cette thèse, énoncée avec une tranchante assurance, se réduit à cette conclusion implacable : la collaboration n’est nullement une exigence allemande mais une avance de Vichy que les nazis, trop heureux de cette aubaine, acceptent avec satisfaction et ricanements. Ce n’est pas Berlin, en effet, qui aurait imposé la collaboration, mais Vichy qui l'aurait mendié constamment ! Pétain n'est qu'un maquignon, marchandant à peine la reconnaissance des nazis. Il offre des gages qu'on ne lui réclame pas, des matières premières, de la main-d’œuvre et cède sans cesse. Après le 11 novembre 1942 -en plein accord avec Laval- il renonce à la flotte, à l’Empire, à l’armée d’Afrique. . De leur point de vue, il est incontestable et considéré comme insultant le fait de remettre en cause cette idée vichyste selon laquelle les épreuves purifieraient la France décadente d’avant-guerre et rétabliraient avec la Révolution nationale un retour à l’ordre moral. Dans cette perspective, la thèse du double jeu de Vichy n'est qu'une invention d'après la Libération et le flot des plaidoyers pro domo des ministres de vichy ne peut avoir aucune valeur. Vichy est donc un bloc dont tous les rouages sont contrôlés par les nazis ! Notons d'ailleurs que cette doxa n'est que la transposition des discours communistes et soviétophiles de l'après-guerre, plus ou moins repris ou validés par certains des dogmes gaullistes.
Mais me direz-vous, où donc se trouvent les preuves de cette formidable révélation ? Essentiellement dans les archives allemandes. Sans doute, celles-ci ont été trop souvent ignorées, mais leur seul examen ne déformerait-il pas la perspective de l'historien ? L'esprit critique, indissociable de la méthode historique, n'exige-t-il pas de corroborer toutes les sources dont on peut disposer et notamment des archives françaises assez connues ou -en tout cas- des témoignages innombrables donnés sur cette période ?
Pas un moment, les membres de cette nouvelle école historique, à la suite de Paxton, ne doutent de la valeur des propos tenus par les "Vichyssiens" aux Allemands, tels que ceux-ci les relatent, dans des rapports destinés à Berlin ! Et pourtant, peut-on vraiment croire que la correspondance entre Vichy et l’occupant était sincère et honnête ? Rappelons tout de même que les partenaires ne pesaient pas le même poids. Il y a donc une déformation de la réalité due à la nécessité de masquer sa pensée pour les Français et une autre de la part des Allemands enclins à retenir ce qui les arrangeait, sans être dupes d'ailleurs des intentions véritables des gens de Vichy ! Mais les nouveaux maîtres à penser paraissent désormais dans l'incapacité d’interpréter objectivement le contexte historique et de se rappeler que l’Histoire ne s'écrit pas seulement avec des sources écrites.
Il est certes loisible de tenir pour suspectes les plaidoiries des gens de Vichy, mais leur examen permet de comprendre le jeu de ceux qui ne tenaient pas pour acquis les thèses nazies. Il y a bien eu, par moment, de la part de ces personnages, la tentation de finasser, pour ne céder que le minimum. Cette vérité est devenue trop dérangeante, paraît-il et friserait le négationnisme ! Et pourtant, il existe quantité de textes de Hitler et de ses valets qui démontrent leur méfiance à l’égard de Pétain et de son entourage, Laval en étant à peine exempté... Précisons, qu'en contestant ce courant initié par Paxton et qui s'étale partout aujourd'hui, des universités aux media, le but n'est pas de vanter ou de condamner le régime de Vichy, mais de jauger une méthode historique."