Post Numéro: 22 de Eric Denis 20 Juil 2017, 00:35
Bonsoir,
Lorsque N. Bernard parle de l' "Etat français" c'est l'appellation de ce régime et pas une reconnaissance de sa légalité juridique.
C'est donc une révolution au sens théorique du terme, qui, comme cela a été rappelé plus haut, a été approuvée par la majorité des élus de l'assemblée nationale. A mon sens, il s'agit donc d'un pouvoir certes illégal mais légitimé par un vote des deux Chambres du Parlement, réunies en Assemblée nationale. L'on a d'ailleurs parlé à l'époque de "révolution nationale".
Alors que penser de son statut? Si l'on se place exclusivement du coté juridique, l'illégalité de ce pouvoir est manifeste. Si l'on se place du coté de sa légitimité parlementaire c'est bel et bien le gouvernement français.
Il faut aussi se souvenir qu'il n'y a pas plus de légitimité à la France libre, et il y en a même moins, puisqu'elle n'a aucun support juridique, ni même de légitimité parlementaire. En termes purement juridiques, la France n'a donc aucun gouvernement légal à cette époque.
Débrouillez-vous avec ça, serais-je tenté de dire...
A n'en pas douter, si, cet "Etat français", que l'on a coutume d'appeler Vichy, avait organisé un référendum en 1940 afin de rendre son existence légale, nul doute qu'il aurait été soutenu par la majorité des Français à cette époque. Ce n'est bien entendu pas une charge envers mes compatriotes de l'époque, qui pensaient assez logiquement que Pétain était l'homme de la situation pour défendre au mieux leurs intérêts vis-à-vis de l'occupant.
Quelques années plus tard, j'ose espérer que cela aurait été moins évident...
Ceci étant, le fond du problème n'est pas là. Aussi illégal qu'il fut, l' "Etat français" fut l'organe de pouvoir dirigeant la France à cette époque et il est donc directement et entièrement responsable des crimes ordonnés et commis par lui ou en son nom.
Ce qui me dérange dans l'argumentaire de certains à ce sujet, c'est l'utilisation de l'illégalité juridique de ce régime pour masquer certaines responsabilités individuelles dans les crimes commis par l' "Etat français". D'autres, bien sur, et probablement les plus représentatifs de cette époque, ont été jugés et condamnés, et c'est fort heureux.
Mais certains rouages majeurs de ce régime, comme par exemple Jardin, secrétaire de cabinet de Laval en 42-43, et directement impliqué dans l’organisation de la rafle du Vel d'Hiv, n'ont jamais été inquiétés après guerre, tout comme un certain nombre de fonctionnaires de Vichy, pourtant parfaitement conscients des conséquences des décisions qu'ils prenaient ou conseillaient à cette époque, et particulièrement vis-à vis des juifs.
C'est surtout cela que l'on peut reprocher au gouvernements français d'après guerre. Ne pas avoir voulu faire toute la lumière sur la responsabilité de certains Français, faute de pouvoir poursuivre globalement un régime, en fonction de son illégalité juridique.
Il faut néanmoins reconnaître que la réconciliation nationale, prônée à cette époque, faisait suite à une autre période trouble, celle de la libération et des nombreuses exactions commises contre les collaborationnistes, bien qu'elle soit probablement plus légitime, si tant est que ce terme puisse être employé à son sujet.
Mais de nombreux fonctionnaires "mouillés" par les décisions et les actes du régime de Vichy s'en tirèrent sans poursuites grâce à cette réconciliation nationale, et continuèrent leurs carrières dans l'administration après guerre.
En conséquence la France, au travers de la parole de certains de nos dirigeants actuels et passés, a raison de reconnaître une bonne fois pour toute la responsabilité de ces Français dirigeant le pays sous l'occupation.
Il faut savoir accepter son Histoire, aussi bien dans les périodes glorieuses que celles qui le sont nettement moins. Fort heureusement, de nombreux historiens font correctement leur travail et nous permettent de voir les faits sans a priori politiciens, même si cette démarche intervient des décennies plus tard.
Cordialement
Eric Denis