Dog Red a écrit:@Loïc : est-on encore bien dans une activité de ferrailleur à ce niveau industriel d'exploitation ?
Comme dans tous les domaines industriels, dans le "ferraillage", tu avais les "gros faiseurs" et les "bricoleurs". Les "gros faiseurs", qui avaient les moyens financiers et le matériel nécessaire, n'étaient pas très nombreux, mais ils avaient (français, belges, allemands, tous confondus), très probablement, raflé plus de 70% du marché, à travers l'Europe, les "bricoleurs", le reste.
Si je me réfère au "marché du fer" lorrain que j'ai assez bien connu, dans les années 70-80, les "gros ferrailleurs" avaient, tous, dès l'avant-guerre, pignon sur rue. Généralement, en dehors du siège social qui demeurait dans un immeuble bourgeois, leurs sites d'exploitation étaient installés aux sommets des crassiers, qui jouxtaient les hauts fourneaux.
A la différence des terrils, pour le charbonnage, il existait, sur les crassiers, où s'accumulaient les scories, les loupés et résidus de coulée, une importante activité de récupération, à l'aide de puissants électro-aimants manœuvrés par des grues, la ferraille, ainsi, récupérée sur le crassier, repartait, aussi sec, vers les hauts-fourneaux, qui coulaient du fer ou de l'acier de diverses qualités et teneurs.
C'était une activité "polluante à souhait", peu valorisante comparée à d'autres, mais très lucrative; de véritables fortunes familiales s'étaient, ainsi, constituées. C'est ce genre d'entreprises qui, disposant d'une réelle expérience dans le domaine, avaient raflé le gros du marché de la ferraille militaire, à la fin de la WW2. Découper une jeep, une Kubelwagen ou un camion au chalumeau oxhydrique, avec une équipe de 4 pinpins, est une chose, mais faire de même avec le blindage allié et épais d'un Panzer IV, un Sherman, voire un Panther, une toute autre! Cà exige des moyens techniques (lourds) spécifiques, du personnel nombreux et de grandes surfaces de travail... donc, au final, du pognon, ne serait-ce que pour acquérir les lots mis en adjudication.
Dans un domaine "adjacent"... en France, après-guerre, la production de matériels de travaux publics (grues de levage, bulldozers, chargeuses, etc.) était quasiment inexistante. La seule solution pour en acquérir était de s'adresser aux revendeurs américains et à leurs agents européens, qui proposaient alors, le monumental marché d'occasions "réformés à dater de 1946", entre autres, par le génie constructeur de l'US Army. Comme Internet n'existait pas encore
, il circulait une flopée de catalogues proposant à la vente, une généreuse liste, souvent accompagnée de photos de divers matériels; çà allait du poste à souder ou à découper industriel, au bulldozer, à la dragline, la grue treillis de levage sur chenilles, en passant par le compresseur, la niveleuse ou le compacteur!
Cà avait beau être du matériel d'occasion, proposés à prix défiant "toute concurrence" (sauf que les circuits de revente se gavaient largement au passage!), il fallait, néanmoins, aligner les biftons pour l'acquérir, d'autant que le franc français, après plusieurs dévaluations successives, valait des clopinettes comparé au dollar US pétant de santé!
Certes, il y avait eu, aussi, des "ferrailleurs", qui, après-guerre, partant de zéro ou presque, avaient, également, réussi à "faire leur pelote", mais ceux-là avaient pris soin, au moins au début de leur activité, de ne surtout pas se fourvoyer en acquérant des lots trop compliqués à "démolir".