Jean_D a écrit:Zgorzelsky a écrit:Jean_D a écrit:vers juillet ou août 40 l'huma a été autorisée à reparaître. Pas longtemps il est vrai.)
Vous êtes sûr de ce fait ?Zgorz.
Affirmatif. Info trouvé aux Archives Nationales. Je peux retrouver la cote mais j'ai un peu la flemme. J'ai 599 Mo de notes en format Word.
De mémoire ils ont paru 2 mois.
Jean
bonsoir
l'Humanité n'a jamais eté autorisée à reparaitre officiellement
- Il y a bien eu pendant la guerre une 'Humanité" clandestine
-la seule tentative de la faire reparaitre officiellement ,date de juin 40 elle etait le fait de membres du parti , mandatés par le B.P (?) ,auprés des autorités d'occupation ,mais l'entreprise a echoué
voir ce lien ,trés documenté:
http://www.inprecor.org/494/Huma_hkrivine.htm je cite
…et une falsification de taille
Jusqu’à présent nous n’avons rendu compte que de quelques omissions ou déformations des faits, Mais il y a beaucoup plus grave : au bas de la page sur l’année 1939 on peut lire un petit paragraphe sous le titre " L’Humanité interdite ". Je le cite intégralement : " 25 août. L’Humanité est interdite ainsi que Ce Soir. Dès le 28 est publié le premier des 300 numéros de l’Humanité clandestine. En juin 1940, deux responsables du PCF négocient à l’ambassade d’Allemagne la reparution légale de l’Humanité, avec l’accord de Jacques Duclos. Il faut attendre le retour de Benoît Frachon à Paris trois jours plus tard, pour que l’erreur soit réparée ".
Il s’agit là d’un mensonge pur et simple : non pas, hélas, la demande de parution légale de l’Huma faite par des militants du parti mais la soit-disante " réparation de l’erreur " trois jours plus tard grâce au retour de Benoît Frachon. Il y a certes un progrès par rapport au manuel d’Histoire du PCF édité en 1964 par les Editions sociales où l’épisode n’est même pas mentionné mais un mensonge délibéré est-il préférable à un mensonge par omission ? De nombreux auteurs ont détaillé ce qui s’était passé, outre des historiens comme Jacques Fauvet (2) ou Philippe Robrieux (3) également d’anciens responsables du PCF comme Charles Tillon (4) ou Auguste Lecoeur (5).
Mais commençons par le témoignage du personnage-clé, celui qui aurait commis l’erreur, Jacques Duclos.
Voici ce qu’il écrit dans le tome 3 de ses Mémoires (6), paru en 1970 :
" Dans ce climat, des camarades animés sans aucun doute de bonnes intentions et qui, par la suite, se battirent courageusement contre les occupants, pensèrent que la presse du Parti pourrait paraître légalement puisque aussi bien d’autres journaux étaient publiés. La direction du Parti désavoua ces démarches, et les auteurs reconnurent leur erreur. "
Quels étaient ces camarades " sans doute animés de bonnes intentions " ? Mystère. Ce n’est certainement pas lui puisqu’il était le principal responsable de la direction qui " désavoua ces démarches ". Il s’agit là également d’un mensonge pur et simple.
Si l’on prend les deux gros tomes de la collection des Huma clandestines édités par les Editions Sociales en 1975 (et préfacés par Jacques Duclos) on constate que jusqu’en janvier 1941 dans presque chaque numéro se trouve un petit placard demandant " la parution libre de l’Humanité ". Voici celui du dernier numéro de janvier 1941 : " Français, demandez pour l’Humanité le droit de paraître normalement ". Jacques Duclos était le principal rédacteur de l’Huma clandestine. Il semble donc qu’il a fallu un peu plus de trois jours pour réparer l’erreur ...
Par ailleurs, jusqu’à l’invasion de l’URSS, le 22 juin 1941, l’Humanité semble ne combattre que Vichy et pas le nazisme, elle met sur le même plan les impérialismes britannique et allemand et ne cesse de chanter les louanges de l’URSS (le pacte germano-soviétique du 23 août 1939 est toujours en vigueur). A partir de l’agression allemande tout change, la lutte contre le nazisme et la défense de l’URSS deviennent les tâches principales. Nous publions une photo démonstrative prise dans le livre de l’ancien dirigeant communiste Auguste Lecoeur " Le Parti Communiste Français et la Résistance " paru en 1968 : elle montre la différence abyssale entre les mots d’ordre ornant la première page de l’Huma du 20 juin 41 et celle du 2 juillet...
Heureusement pour lui le PCF n’a pu refaire paraître légalement son journal. Tous les détails avaient déjà été donnés dès 1960 dans l’Histoire du Parti Communiste Français publiée en trois petits fascicules par le goupe dissident Unir-Le débat communiste. Les historiens et les anciens " permanents " du Parti n’ont fait qu’ajouter un certain nombre d’éléments. A l’évidence la décision d’essayer de refaire paraître légalement l’organe du Parti venait de Moscou et du Komintern (elle fut d’ailleurs apppliquée avec succès en Hollande et en Belgique). Duclos chargea Maurice Tréand, membre du Comité central, d’organiser les démarches auprès des services de l’armée d’occupation. Celui-ci se rendit le 19 juin 1940 avec Denise Ginollin, ancienne militante des JC, et Jeanne Schrodt, traductrice, au service de presse de la Kommandantur où ils rencontrèrent le lieutenant Weber qui donna son accord, sous certaines conditions. Cependant, deux jours plus tard, Denise Ginollin et Maurice Tréand étaient appréhendés par la police française alors qu’ils étaient porteurs des premiers articles à soumettre à la censure de la Propagandastaffel. Ils furent inculpés d’infraction au décret du 24 août 1939 qui interdisait la publication des journaux communistes. Duclos chargera alors l’avocat Robert Foissin (défenseur habituel de l’ambassade soviétique) et Jean Catelas, membre du Comité central, de s’occuper de l’affaire. Quelques jours plus tard les deux prisonniers étaient libérés sur ordre d’un dignitaire nazi. Les démarches sont reprises par Jean Catelas et Me Foissin. L’avocat remet une nouvelle demande aux autorités d’occupation dont Tréand (d’après Robrieux) affirme qu’elle a été rédigée par Léo (Jacques Duclos), bien que contresignée par lui et signée par Jean Catelas. Impossible de ne pas en citer un passage :
" L’Humanité publiée par nous se fixerait pour tâche d’être au service du peuple de France.
" L’Humanité publiée par nous se fixerait pour tâche de dénoncer les agissements des agents de l’impérialisme britannique qui veulent entraîner les colonies françaises dans la guerre et d’appeler les peuples coloniaux à la lutte pour leur indépendance contre les oppresseurs impérialistes.
" L’Humanité publiée par nous se fixerait pour tâche de poursuivre une politique de pacification européenne et de défendre la conclusion d’un pacte d’amitié franco-soviétique qui serait le complément du pacte germano-soviétique et ainsi créerait les conditions d’une paix durable ".
On ne saurait mieux dire ! Malheureusement (ou plutôt heureusement pour ses auteurs) la nouvelle démarche se heurta à la ferme opposition de Vichy (et de l’ancien communiste devenu vychiste, Jacques Doriot) et n’aboutit pas.
Certes, on ne peut reprocher à l’Huma du centenaire de ne pas avoir fourni toutes ces informations mais seulement d’avoir présenté comme vérité établie quelques lignes que la vérification historique met en pièces. Sans ignorer l’intérêt que l’on peut prendre à parcourir cette publication, par ailleurs très vivante, il y manque un mode d’emploi, en particulier à l’usage de la jeune génération ...
POST-SCRIPTUM
La rédaction de cet article était terminée quand j’ai eu l’occasion de parcourir le très gros volume relié qui vient de sortir et qui traite du même sujet. Il a été rédigé par le communiste Bernard Chambaz, s’intitule " L’Humanité 1904-2004 et est édité par Seuil/l’Humanité.
Il s’agit des vues personnelles du membre d’une famille communiste que les " anciens " ont bien connue, après avoir " feuilleté chacun des 36 500 numéros de cent ans d’Humanité (s) ". Les photos sont admirables, les réflexions sont originales même si parfois discutables et assez souvent " pas tout à fait dans la ligne ", mais surtout je suis tombé en arrêt sur la page 205 où il relate la demande de parution légale de l’Humanité en juin 1940. C’est exactement le contraire de ce que prétend le n° hors-série précédemment critiqué, pour ne pas parler des affirmations de Jacques Duclos. En voici quelques extraits :
" Paris est occupé par l’armée allemande, le gouvernement s’installe à Vichy et fait voter par les parlementaires la déchéance de la République. C’est dans cette situation que se pose la délicate question de la demande de reparution de l’Humanité, très longtemps niée après la guerre par le parti. En résumé, un avocat communiste — Foissin — transmet à un dirigeant du parti — Tréand — cette suggestion et propose d’établir un contact avec Otto Abetz à la Kommandantur. Les pourparlers s’engagent fin juin. Foissin, Tréand et Catelas — qui a remplacé Villon — se rendent dans le bureau d’Abetz. Il est difficile d’imaginer qu’ils agissent sans le feu vert de la direction, probablement Duclos, et sans l’accord du Komintern. (...) L’idée semble être qu’un pacte d’amitié franco-soviétique pourrait compléter le pacte germano-soviétique et ainsi assurer la paix en Europe. (...) Fin août le contact est rompu par les émissaires communistes, vivement critiqués par la direction du parti. (...)Toutefois sur sa lancée, l’Humanité propose en titre une sorte de syllogisme : 1) " des journaux pourris continuent à bourrer les crânes ", ce qui reprend encore le vocabulaire de la Première Guerre mondiale ; 2) " La presse communiste au service du peuple est toujours interdite " ; 3) " Demandez la parution libre de l’Humanité ". On sent une espèce d’agacement voire de rage à voir cette injustice se perpétuer. Depuis deux mois, elle ne cesse d’y revenir.(...)
Quant à l’Appel du 10 juillet 1940, signé par Thorez et Duclos, " s’il n’appelle pas au combat contre l’occupant, c’est que le sursaut national souhaité n’a pas eu lieu dans la seconde quinzaine de juin et que les directives du Komintern nourrissent une contradiction qu’il ne surmonte pas. Malgré quelques inflexions, ces contradictions demeurent jusqu’en juin 1941 ".
C’est quand même assez clairement énoncé de la part d’un militant communiste. Une question demeure : comment l’Humanité a-t-elle pu accepter de parrainer deux publications émettant des points de vue aussi contradictoires ? Une autre est sous-jacente : n’auraient donc droit à la connaissance de la vérité que ceux qui peuvent se payer un ouvrage à 39 ¤ ?
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* Jean-Michel Krivine, chirurgien retraité, est membre de la rédaction d’Inprecor.