Post Numéro: 1 de LENEVETTE Roger 25 Fév 2010, 18:02
Broualan dont j'ai écrit une cinquaantaine de pages est évidemment beaucoup plus que le compte rendu du membre du PPF figurant sur ce forum. Ci dessous un aperçu deu commandant "Loulou" en Normandie.
Le Commandant Pétri en Normandie
La guerre éclair menée par l'Armée Allemande fait qu'en six semaines la Fance est défaite.
Le 14 Juin 1940 Paris est occupé Le 17 juin 1940 les troupes Allemandes entrent en Bretagne.
Le 18 elles sont à Rennes, le 19, à Nantes et à Brest et le 21 à Lorient.
Le 10 juillet 1940, l'Assemblée Nationale donne "Tous Pouvoirs" à Pétain.
Le 24 octobre 1940, c'est la poignée de main Pétain-Hitler à Montoire.
Il existe quelques grands livres généralisant ce que l'on sait de la Résistance en France durant la Seconde Guerre Mondiale. Mais il existe parallèlement des dizaines d'ouvrages élaborés par des témoins qui se sont efforcés de retracer toute une épopée populaire pleine de sang et de souffrances, d'abnégation et de dévouement sans fin, de fraternité et d'enthousiasme mêlés, que seuls, ceux qui ont connu l'occupation nazie peuvent avoir ressenti.
Parmi ces textes, celui que nous donne René Brune est sans doute l'un des meilleurs. Son livre " Broualan" montre ce que furent les débuts d'une Résistance où se rencontrèrent les volontés patriotiques de femmes et d'hommes d'opinions différentes certes, mais unis par un même idéal.
Des militants communistes qui, au sein du Front National furent les premiers à s'armer dés juillet 1940, et dont le bras armé sera le mouvement F.T.P.F. pour l'inévitable combat libérateur, aux militants de Libé-Nord à partir de 1941, de l'Armée Secrète et de l'O.R.A. en 1943, de tant d'autres réseaux du B.C.R.A. ou des Services Secrets Britanniques, ce sont toujours des françaises ou des Français qui sous des formes diverses affronteront le même ennemi.
Les souvenirs relatés ici sont liés à l'été 1944, et le sort de la Wehrmacht ne fait désormais plus aucun doute. Tout un peuple s'est alors levé pour une ultime bataille, mais il n'en aurait pas été ainsi si ceux qui s'étaient éveillés avant le jour J, n'avaient au prix de multiples sacrifices, fait murir d'abord, les fruits fragiles de l'arbre de liberté.
En lisant cette chronique de la Résistance en Ille (et-Vilaine, on se rendra mieux compte de ce que fut l'histoire de la France au cours de ces années écartelées de la guerre et de l'occupation. Puisse l'avenir en tirer leçon.
J'ajouterai que l'histoire de Cuguen est liée à celle de Broualan et nous découvrirons ici à quel point. Deux groupes se retrouvent dans ce combat. Celui des Franc Tireurs et Partisans Français (F.T.P.F.) et celui de "Défense de la France" (D.F.) se battant l'un et l'autre par patriotisme. Dans ce récit, on ne sait pas toujours qui appartient à l'un, ou qui appartient à l'autre, mais ce qu'on peut y découvrir, c'est que l'un et l'autre se battent pour la même chose : LIBERER LA FRANCE..
Un homme va souvent y être cité, "Louis Pétri". Même s'il n'apparaît pas beaucoup au moment de la descente de Milice, il ne faut pas oublier que Broualan et Cuguen sont aux confins de la Bretagne et de la Normandie. Avec le débarquement du 6 juin 1944, et par les missions qui lui étaient confiées, Louis Pétri était l'homme de toutes les situations, avec des hommes se battant en Bretagne comme en Normandie, dixit Lignières la Doucelle
Le 7 juillet, c'est Broualan, le 8 juillet c'est Vieux Vy sur Couesnon dont le groupe de 9 FTPF sous les ordres de Louis Pétri a été un groupe charnière. Je n'en parlerai pas ici afin de rester avec les différents récits faits par d'anciens Résistants, souvent commentés par Raymond Le Pen et rapportés dans le livre de René Brune.
Le Commandant Pétri dans la Manche :
Depuis 1942, la Résistance dans le département de la Manche s'est considérablement fortifiée. Des groupes nombreux, mobiles et efficaces, se sont formés un peu partout. Qu'ils soient rattachés à "Libé-Nord" comme ceux de Marland à Granville, d'Etienvre à Saint-James et Trelly, ou à l'O.C.M. comme Frank à Saint-Lô, Marie à Granville, Tabur à Avranches; ils se manifestent indifféremment pour l'ennemi. De même les formations dépendantes du F.N. mènent une guérilla très active, et le colonel von Achberg a bien vu leur implantation : Avranches, Saint-Hilaire-du-Harcouët, Brécey, Sourdeval, Gathéno, auxquelles il convient d'ajouter celles de Cherbourg, de Coutances, de Lison, de Saint-Lô, Agon-Créances, etc…
Dès Juin 1942, les résistants de Cherbourg incendient le dépôt de camions allemands, installés dans les locaux de l'entreprise Grouard, rue Carnot, et c'est à la suite d'une odieuse dénonciation que quelques membres du groupe seront arrêtés : Gustave Jurczyszin (fusillé à Saint Lô), Roger Anne et Lejeune, qui n'avaient que dix sept ans !
Un coup de filet de la Gestapo permet la capture du premier inter-régional, Lemerre, qui sera fusillé avec son fils dans une ferme de Quétreville. Son successeur "Goliath" connaîtra le même sort en 1943. Une autre trahison amène l'arrestation de Loison à Montjoie, de Cholet à Saint-Pair, de Chartier et Collin à Granville, de Lebas, Lepetit, Régis Massac à Coutances, de Cancel à Hambye, puis de Parisy (mort en déportation) et Marcel Leclerc à Céaux.
Réorganisation :
La réorganisation s'effectue par l'entremise de PETRI et LEROUX en Ille et vilaine, qui envoient Jean Turmeau prendre le relais. Arrêté en septembre 1943, Turmeau s'était évadé de la prison de Prévalaye. Il prend l'inter-région sud de la Manche sous le pseudo de "Alfred" et constitue avec Léon Pinel "Jules" et Berjon "Emile" le groupe d'Avranches, avec le concours de Lourdais, Renault, Morozin, Mansuy. Immédiatement, leur activité est considérable.
Les Actions :
Déraillement effectué au Tann, près de Folligny le 5 décembre 1943; au Val-Saint-Père quelques jours après; à Marcy en janvier 1944 où 43 wagons militaires sont détruits; les rails arrachés sur 150 mètres à Pontaubault en février où un train de permission se couche sur le ballast, lourdes pertes; à Lolif, etc…
A Avranches, un sabotage bloque quatre-vingt wagons (tuyaux de freins coupés).
A la centrale de Vezins en janvier, destruction de quatre transformateurs qui alimentent alors l'arsenal de Cherbourg.
Au cours d'une mission à Flers, "Alfred" est appréhendé. Il sera fusillé en mai près de Saint-Lô.
A Becey, Louis Pinson dirige une section de FTP, appuyé par Louaisel, Duval, André Debon et Michel Tauzin. Le curé du village voisin de Cuves apporte son soutien, de même que l'abbé Bourget professeur de l'institut d'Avranches.
Un déraillement est organisé à Saint-Aubin-des-Bois en janvier 1944, un autre à Sainte-Cécile en février.
Le 5 juin, les FTP de Becey sabotent et court-circuitent la ligne téléphonique Cherbourg-Rennes au nord de la bourgade. Ils récidivent le lendemain.
Mais pour tous ces groupes de patriotes, l'armement fait cruellement défaut. Ils ne disposent que de quelques explosifs et doivent opérer leurs interventions sur les voies-ferrées par déboulonnage. Cela va bientôt s'améliorer.
Le 27 juin 1944 :
Perçant le brouillage lancinant, la voix du speaker de la BBC débite les messages personnels : "Nous n'irons plus au bois" ; "Jeannot pense bien à Loulou" ; "Les carottes sont cuites" ; "Ils sont trop verts, dit-il" ; "Henri a fait un bon voyage" ; "L'étang est sans rides" ; etc… Le long chapelet des phrases sibyllines s'égrène. Penchés sur le poste, les maquisards concentrent toute leur attention : "La banque est fermée" ; ça y est ! Cette fois, c'est le bon. Celui qui les informe du parachutage, "Loulou" ferme le poste et distribue les ordres. Le maquis va recevoir des armes.
Fougerolles-du-Plessis :
Sur le terrain balisé par le commandant PETRI, les lampes-codes clignotent dans le sens opposé du vent. Tout autour, huit hommes attendent, allongés sur l'herbe. En lisière, une autre équipe se tient prête. Répartis aux alentours, une quinzaine de FTP assurent la sécurité. Un bourdonnement lointain, un ronron familier qui se rapproche, les marquages s'allument. Quelques secondes encore, puis un gros Liberator apparaît dans un grondement de moteurs. Il passe au dessus du terrain, et sous la carlingue, une lumière jaillit, c'est le signal de reconnaissance. Il vire là bas sur les bois et revient; les parachutes sont largués avec une maîtrise admirable et viennent s'affaler entre la deuxième et la quatrième balise. Vite les hommes se précipitent, coupent les sangles, plient les toiles et traîne les containers vers le fossé. Aussitôt, Pétri actionne à nouveau son code, et voici qu'un autre avion se présente juste derrière. La même manœuvre se répète et la seconde équipe de réserve court à son tour recueillir les précieux colis. Puis les marquages sont éteints, cette fois l'opération est terminée. Rapidement le chef de maquis s'informe. Seize containers ? C'est bon, le compte y est. Un coup de sifflet long suivi de deux brefs signalent aux transporteurs qu'ils doivent s'approcher, et voici que du vieux chemin masqué par les deux hautes haies, débouchent trois attelages. En hâte, le chargement est hissé et les voitures vont aller déposer leurs cargaisons aux endroits prévus. Lorsque le dernier a quitté le champ, Pétri rejoint à son tour au pas de course les garçons qui regagnent leur base. Ils sont tous rayonnants et malgré le silence de rigueur dans leur marche feutrée, certains ne peuvent s'empêcher de chuchoter leur joie. Ils le peuvent, plusieurs tonnes d'armes viennent de tomber du ciel !
Le Commandant :
Le commandant Pétri dit "Loulou", dit "Tanguy" que nous venons de voir diriger la réception d'un parachutage à Fougerolles-du-Plessis, est un baroudeur expérimenté de la Résistance. Son activité essentielle s'est développée dans l'Ille-et-Vilaine et dans la Mayenne. Mais les recherches incessantes de la Gestapo l'ont incité à se déplacer. C'est ainsi qu'il a participé avec quelques uns de ses hommes, aux combats de Lignères-la-Doucelle ainsi qu'à ceux de la bataille entre Avranches et Rennes.
C'est lui qui grâce aux parachutages de Fougerolles-du-Plessis, va pourvoir en armement les groupes de la Manche et particulièrement ceux de Saint-Hilaire-du-Harcouët, d'Avranches et de Brécey. Le transport d'armes sur un assez long trajet était délicat en raison des faibles moyens de circulation et de la présence permanente des troupes allemandes.
C'est un négociant en volailles du Neufbourg, près de Mortain, qui se chargea de celui-ci. Dissimulant grenades, mitraillettes, plastic, etc… sous des cages à poulets, il parvint à ramener sans encombre son chargement près de Brécey, chez Louis Hardy.
Dés lors, les actions vont se multiplier :
Les sections de Louis Blouet, à Saint-Hilaire-du-Harcouët, tendent des embuscades à Martigny, au Pointon, à Saint-Martin-de-Landelles, aus Loges-Marchés. Une sizaine s'introduit en pleine nuit dans un cantonnement allemand et y dérobent plusieurs FM.
Déjà le 24 juin, alors qu'ils n'étaient que faiblement armés d'une seule mitraillette et de quelques pistolets, les hommes de Blouet s'étaient rués sur un convoi SS qu'ils avaient tenus en haleine durant plusieurs heures. Ils avaient décroché à la faveur de la nuit. Le 1er juillet, près de Parigny, alors que le groupe attaque un détachement ennemi, son chef, Louis Blouet, est gravement blessé par une balle de FM qui lui perfore un rein et l'intestin. Opéré sans équipement sur une table de ferme, il s'en tirera et, à l'ébahissement des médecins, reprendra sa place au combat début août ! En son absence, Julien Lamanilève prend le commandement.
A Brécey, Louis Pinson et ses camarades disposent des crèves-pneus sur les routes, ainsi que des mines de poche, désarment une escouade allemande, cisaillent sans arrêt les câbles téléphoniques. Louis Pinson est capturé par la Gestapo le 29 juillet. Il parvient à s'échapper à la faveur des bombardements et reprend son activité auprès du groupe Blouet.
A la lisière sud-ouest du Calvados, le maquis de Champ-du-Boult (maquis Guillaume le conquérant) prête main forte aux partisans de Gathéno, de Saint-Michel-de-Montjoie et de Coulouvray. Les frères Hilliou font un sérieux travail de liaison entre les formations, de part et d'autre de la limite des deux départements. Dans cette région, au sol rocailleux, les rudes granitiers, solides comme la pierre qu'ils travaillent, vont posément tendre l'embuscade et faire le coup de feu.
A Barenton, sous la direction du chef de brigade Dauvergne, une poignée de patriotes entre en action le 6 juin. Ils coupent les câbles, déplacent les panneaux routiers de direction des Allemands, sèment des clous. Au début juillet, un commando placé sous les ordres de Dauvergne, avec Vasselin, Moucheboeuf, Géoffroy, Fouqué, Bansard, Bouvier attaque un camion SS chargé de munitions et anéantit le tout ! Le 2 août, Géoffroy, Reulette, Bansard, Fouqué, Lebigot minent le pont près de Saint-Cyr-du-Bailleul, et font sauter un char et un camion rempli de munitions.
Au Teilleul, un groupe commandé par Emile Bizet détourne les convois ennemis, et procède à plusieurs sabotages de matériel. Ses hommes vont s'illustrer en servant d'éclaireurs aux Alliés
A Coutance, l'organisation du FN peut compter sur Robillard, chef de district à la SNCF, sur Bouffay et Maître Delagarde, juge de paix de quatre-vingt ans !
A Juvigny-le-Tertre, le docteur Lemonnier a regroupé quelques volontaires et leurs actions commencent à peser sur les soldats du Reich !
A Saint-Lô, indépendamment des hommes des PTT, le directeur de l'Ecole Normale Defond et l'inspecteur primaire Ogé, le distillateur Brûlé-Beaufils sont en liaison avec Jean Lamotte, instituteur à Airel, qui assure le contact avec Cherbourg. D'autres groupes se manifestent à La-Haye-Pesnel, Folligny, Ducey, Mortain, Périers, Villedieu-les-Poêles, Ranville-la-Bigot, Cerisy, Les Pieux et tessy-sur-Vire.
Mais la Gestapo est elle aussi présente partout, et elle va réagir !
La Gestapo :
A partir du 14 juin, les services de police allemands ; SD et Felfgendarmerie abandonnent leurs bureaux de Saint-Lô, la ville étant sévèrement bombardée, et se réfugient à Saint-Jean-du-Corail, au château de la baronne de Boissière (à 5 km de Mortain).
Ils y traînent avec eux les quelques mercenaires français, exécuteurs de leurs basses œuvres : Chénot, Dufour, Le Nourry, Fernandez.
L'infiltration de leur agent Perrot, alias "Charlot" dans un groupe résistant amène une série d'arrestations :
Le groupe Jean Vauzelles de Sainte-Pience est décimé.
A Avranches Chénot et Dufour font appréhender Renault, Feuillet, frogé, Lerouxel, Jean Turmeau qui tombe dans un traquenard et sera fusillé en mai.
Quelques jours plus tard, le 27, Joseph Hilliou de Champ-du-Boult, en mission à Gathéno, est capturé à son tour.
Le 9 juillet, Le Nourry, Dufour et Fernandez, à la tête d'une troupe de SS, procèdent à un vaste coup de filet. Ils se saisissent à Sant-Hilaire-du-Harcouët de MM Jeanne, Fouqué, Joffrezic, Lemoussu et de Mme Guérandel.
A Mortain, ils arrêtent MM Blaize, Pérez, Le Diraison père et fils, Gournay et Johué.
A Sourdeval, MM Cherruault, Champagne, Fortin, Gombert et le docteur Putot sont emmenés. Au cours de ces interpellations, le boulanger Delaunay est abattu sur place.
Le 24 juillet, c'est le tour du père Haupais, trappiste à Bricquebec (mourra en déportation), puis le 27 à Saint-Laurent-de-Cuves, la famille Paris est également appréhendée.
Toutes ces personnes sont incarcérées dans les caves du château de Saint-Jean-du-Corail.
Le 28 juillet, le bataillon de SS dirigé par Fernandez et Le Nourry, cerne le village de Fougerolles-du-Plessis en Mayenne, aux limites de la Manche.
"Nid de Terroristesé", le pays est ratissé, les portes enfoncées, les habitants extirpés à coups de crosse de leurs demeures. La soldatesque se répand dans la campagne environnante, incendie quelques fermes et meules, pille maisons et basse-cours, malmène les paysans. Ils cherchent les armes mais ne trouvent rien. Alors le maire, Mr Lebouc, est sévèrement questionné, en vain ! Furieux, les SS arrêtent quatorze patriotes qui sont torturés sur place pour leur faire avouer où se cache le matériel. Les malheureux seraient bien en peine de le dire, cat il y a longtemps que la répartition a été effectuée. Sauvagement matraqués, ils sonr entassés dans un camion et la troupe repart pour Saint-Jean-du-Corail.
Les 29 et le 30, nouveaux interrogatoires, toujours négatifs. Les prisonniers sont enfermés dans les greniers et les communs. Avec tous ceux qui croupissent dans les caves, c'est près d'une centaine de personnes qui sont ainsi captives, dans l'incertitude angoissante de leur sort.
Le 31, alors que le jour se lève à peine, cinq prisonniers sont extraits de leur géôle : François Bostan, Victor Fréard, François Génevée, Julien Derennes, tous les quatre de Fougerolles-du-Plessis, et Joseph Hilliou de Champ-du-Boult.
Ils sont emmenés un peu plus loin, au château de Bourberouge, et à nouveau torturés. Dans l'après midi, ils seront abattus à coups de mitraillette dans une carrière proche.
Le 1er août, c'est le jeune Jacques Cercleux qui sera exécuté près de la ferme Moissé. Mais l'écroulement du front allemand de Saint-Lô, en cette fin de juillet, sonne l'heure d'une nouvelle retraite pour les Gestapistes et amènent d'autres râches pour les SS. Son incidence sur les autres prisonniers sera capitale. Nombre d'entre eux y devront la vie sauve !
La Mission Helsmann :
Le 16 juillet 1944, Londres passait un message d'une longueur inhabituelle. "La quatrième voiture a été en pabnne, si possible, recebvoir nos amis, nous irons ce soir au rendes vous. Si possible prévenir. La banque est dermée."
A Fougerolles-du-Plessis, PETRI comprend fort bien ce langage sibyllin; il indique simplement que le quatrième avion du parachutage du 11 a dû rebrousser chemin, mais qu'il se présentera ce soir sur le terrain avec la même phrase-code.
Il avise le commandant Claude-de-Baissac* qui contrôle les opérations du S.O.E., et ce dernier l'accompagne dans la nuit sur l'aire de réception où ils accueillent ensemble le capitaine "Eric" du "War Office"
* Claude-de-Baissac a été parachuté en Mayenne avec Renaud Dandicolle.
" Eric " :
" Eric" de son vrai nom Jack Hayes est chargé d'élaborer sur l'arrière des lignes allemandes, les préparatifs de l'opération militaire qui sera appelée la percée d'Avranches.
Son travail consiste à informer les Alliés sur les défenses ennemies, et de recruter des guides pour les avant-gardes libératrices.
Il lui faut pour réussir le concours des résiqstants de la Manche. Pétri le met en rapport avec le groupe Blouet de Saint-Hilaire-du-Harcouët, et c'est Julien Lamanilève qui assure cette liaison.
Immédiatement au travail, Eric installe son PC dans une ferme de Ducey, à la Mancellière, chez M. Bagot. La mission "Helsmann" est à l'œuvre.
Le département de la Manche est alors pratiquement coupé en deux par la ligne du front s'étalant de Saint-Lô à Lessay par Periers, ce qui ne facilite pas les contacts entre les résistants des deux zones !
Les formations clandestines sont alertées, et deux jours plus tard, 31 guides sont prêts, volontaires pour traverser les lignes.
Eric les avise de la tâche qui leur est demandée et des risques encourus. Ils acceptent tous. Il leur faut par équipe de deux, se faufiler au travers du dispositif allemand, repérer les installations défensives, joindre les forces américaines aux points prévus, et les guider lors de l'offensive. Munis des mots de passe, tous les éclaireurs partent, ils connaîtront des fortunes diverses : certain comme Victor Pelé de Louvigné seront arrêtés par les SS, d'autres tel Monnerie et Guillermic seront bloqués dans les ruines de Saint-Lô pendant plusieurs jours, Debon et Navier devront passer par mer avec un pêcheur d'Agon-Coutainville. Mais l'ensemble des informations qu'ils apportent aux Américains prouve que contrairement à ce qu'ils supposent, aucun dispositif sérieux ne s'opposera à la ruée des Sherman lorsque le front craquera. Ils pensaient devoir mener une campagne comparable à celle de Cassino en Italie, alors qu'en réalité lors de l'offensive, ils pourront s'enfoncer très vite vers le sud. Et Patton de son repaire de Saint-Sauveur-lr-Viconte va dégringoler à toute allure vers Avranches et Fougères.
Grâce à la mission Helsmann, grâce à la bravoure et au courage des volontaires normands, combien de villes et de villages seront épargnés de la terreur des longues préparations d'artillerie et des raids meurtriers des Typhons ?
Et de combien de temps le sort de la guerre en aura-t-il été modifié ?
Inspirées de cet exemple, d'autres missions analogues seront effectuées dans le secteur de Mortain – Saint-Georges-de-Rouelley au cours de la sévère bataille qui verra la cité Mortainaise changer de mains à plusieurs reprises*. A cette occasion, certains guides rempileront comme Tauzin et Debon qui resteront d'ailleurs avec l'armée américaine jusqu'en Allemagne. Eric prolongera son action en Mayenne et en Ille-et-Vilaine, et fera bombarder les dépôts de munitions et les installations ennemies en forêt d'Andaine et dans l'Alençonnais. Le commandant Pétri avec ses FTP pourchassera les fanatiques SS dans les massifs de Saint-Aubin-du-Cormier, de Chevré et de Cabière.
Plus à l'Est la tenaille se referme sur la Poche de Falaise après une terrible bataille qu'Eddy Florentin, l'historien de la bataille de Normandie n'a pas hésité à nommer : "Stalingrad en Normandie".
Le 9 août, la rupture du front allemand est consommée, les gestapistes évacuent Alençon. Une grande partie de la Bretagne est libérée.