Tom cite apparemment deux passages différents de Leleu sur cette crainte d'un "Etat communiste dans le Massif central" : c'est d'abord une phrase de Jodl à l'adresse des cadres opérant en France, puis Leleu la reprend à son compte sans guillemets, mais au milieu d'une énumération de facteurs.
Oui, deux passages de la même page 794 :
1) Les raisons ne manquaient pas [...] pour commander une telle action terroriste [le massacre d'Oradour] : l'urgence de la situation tout d'abord, avec l'annonce le 9 juin du désengagement du groupement tactique SS en vue de son envoi sur le front le 11 (dès le 9 pour les éléments chenillés) ; l'"impotence" des services allemands ensuite, incapables aux yeux de Lammerding de faire face à la situation sur place après le départ des troupes SS ; la certitude de voir apparaître dans ces conditions "un nouvel Etat communiste" dans le Massif central ; enfin la perte d'un commandant de bataillon, mortifiante pour l'esprit de corps de l'unité. Une action terroriste "en guise d'avertissement pour l'ensemble de la population" s'imposait dès lors pour donner un coup d'arrêt à l'extension de l'insurrection avant le retrait des troupes SS.
Pour Leleu, "les raisons [...] pour commander une telle action terroriste" (à Oradour, différente de l'action de représailles menée à Tulle sur les ordres de Lammerding) sont celles - au-delà de l'Ob. West qui "a cessé de jouer un rôle moteur [...] en se bornant à relayer la consigne" (cf. page 792) - de l'OKW qui, dès le 8 juin 1944, "avait donné un blanc-seing à la troupe pour qu'elle agisse brutalement" (cf. page 793), mais "la certitude de voir apparaître un nouvel Etat communiste" dans le Massif central est, sans conteste, pour Leleu, avant tout celle de Lammerding, puisque ce facteur vient entre deux autres qui le concernent : "l'impotence des services allemands [locaux] incapables aux yeux de Lammerding" et "la perte d'un chef de bataillon"...
2) L'encadrement de la division était du reste intimement persuadé d'être en présence d'un adversaire employant les mêmes méthodes et ayant la même idéologie que les partisans soviétiques. En clair, la maxime de base de l'éradication du "judéo-bolchevisme" établie par Bach-Zelewski en 1941 s'appliquait parfaitement dans ce cas [...].
Ici, il ne s'agit pas du tout de l'OKW, mais, comme Leleu le dit clairement, de l'"encadrement de la division", c'est-à-dire au moins de Lammerding, de son état-major et des officiers supérieurs, commandants de régiments et chefs de bataillons, qui sont persuadés avoir affaire, dans le Massif central, à des partisans de type soviétique...
Donc, votre affirmation en tout cas cela n'établit nullement l'existence d'une telle crainte [d'un Etat communiste dans le Massif central] chez quelque membre que ce soit de la Das Reich est contradictoire avec celle de Leleu, laquelle est, je le rappelle, très étayée (voir les 7 lignes de sources page 1074).
François Delpla écrit :
Rien de contradictoire avec une consigne de massacre d'un gros village paisible au lendemain du débarquement dans une région de maquis, passée d'abord par Himmler et Lammerding en avril.
Certes non, mais nous n'en avons aucune preuve ; il s'agit d'une simple supposition... A ce compte-là, nous pouvons aussi supposer qu'Himmler connaissait, par ses services de police (Sipo-SD) en France, le danger de l'"apparition d'un nouvel Etat communiste" dans le Massif central et pensait pouvoir faire en sorte que l'OKW ordonne à la Das Reich d'accomplir une mission de répression dans cette région juste après le débarquement effectivement attendu des Alliés au printemps 44 (dans son journal de guerre, Ernst Jünger écrit que l'on ne parlait que de cette éventualité au grand état-major allemand à Paris dès mai 1944)...