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"Les résistants de Dieu"

Nouveau messagePosté: 04 Déc 2008, 16:22
de Tom
Voici un extrait d'un article de Chantal Delsol de l'Institut :

On se sent petit. Voici publiés les lettres et carnets [chez Tallandier] des deux étudiants, Hans et Sophie Scholl, qui dirigèrent le groupe résistant de La Rose blanche dans l'Allemagne en guerre. [...] ils distribuèrent six tracts, en réalité des textes argumentés qui sont des analyses de philosophie politique sur la culpabilité allemande, sur la "dictature du mal", sur la grandeur de la conscience. [...] Le frère et la soeur furent arrêtés le 18 février 1943 et condamnés à mort [...]. Ils avaient respectivement 24 et 21 ans. [...]

Il est bien étrange que la France, pays où la condamnation du nazisme représente, depuis quarante ans, la seule armature morale et le principal socle culturel, ignore pratiquement l'histoire de La Rose blanche. Déverser des propos haineux contre Hitler si longtemps après ne coûte pas de pain (même si c'est un ticket de bonne conduite). En revanche, les écrits de ceux qui ont littéralement payé de leur vie acquièrent une singulière valeur. Hans et Sophie Scholl n'étaient pas seulement antinazis, mais antitotalitaires. Ils ne payaient tribut à aucune oppression de rechange. Ils étaient tout simplement croyants, et nourris de lectures et de réflexions propres à leur inculquer la distance face à la propagande. Ils n'ont pu résister qu'en s'appuyant sur un autre socle, moral et spirituel.

Re: "Les résistants de Dieu"

Nouveau messagePosté: 04 Déc 2008, 17:22
de romualdtaillon
Bonjour,

merci pour cette citation mais qu'est-ce que c'est vraiment "être croyant" ? Les régimes totalitaires d'Espagne, d'Italie, d'Allemagne et surtout du Japon ont tous pris assise sur la religion institutionnelle et ont rallié une pléthore de "croyants".

De même, bon nombre de leurs opposants n'étaient pas des mystiques mais simplement des humanistes n'ont pas eu besoin des sermons de von Galen pour vouloir agir...

Re: "Les résistants de Dieu"

Nouveau messagePosté: 04 Déc 2008, 19:57
de Audie Murphy
Je vois où tu veux en venir, Romuald. Les pilotes qui ont lancé leurs avions dans le World Trade Center devait sûrement être "croyants" eux aussi. On va nous accuser de chercher la bête noire...

Re: "Les résistants de Dieu"

Nouveau messagePosté: 04 Déc 2008, 21:44
de Tom
Tout d'abord, les véritables régimes totalitaires (par ordre d'apparition : l'URSS communiste, l'Italie fasciste, l'Allemagne nazie) ne se sont pas fondés ni appuyés sur les religions traditionnelles ; bien au contraire, ils ont cherché à remplacer ces dernières par des "religions immanentes" (dont le principe supérieur n'est pas transcendant comme Dieu par rapport au monde). L'Italie fasciste n'a signé qu'un concordat (accord à caractère de compromis) avec le pape ; l'Allemagne nazie a combattu les Eglises ; l'URSS communiste les a supprimées. L'Espagne de Franco était un Etat autoritaire, mais pas totalitaire, au sens de régime à parti unique qui confisque toutes les activités d'une société.

Ensuite, le fait d'être "croyant" (en Dieu) n'implique bien sûr pas que l'on résiste forcément au Mal, mais suppose nécessairement que l'on ne se prenne pas pour Dieu et que l'on ne divinise pas un dirigeant ou un système...

En effet, Dieu est l'élément de la vie en vertu duquel le jugement se hausse au-delà des faits d'existence jusqu'aux valeurs d'existence.

A. N. Whitehead

P.-S. J'ai choisi une citation de Whitehead parce qu'il est pour moi un cas limite qui formule un monisme panthéiste faisant de Dieu une réalité immanente de l'existence et de la connaissance, mais agissant aussi dans le monde de manière transcendante par la voie de la finalité.

Re: "Les résistants de Dieu"

Nouveau messagePosté: 04 Déc 2008, 22:43
de romualdtaillon
Tom a écrit:Tout d'abord, les véritables régimes totalitaires (par ordre d'apparition : l'URSS communiste, l'Italie fasciste, l'Allemagne nazie) ne se sont pas fondés ni appuyés sur les religions traditionnelles ; bien au contraire, ils ont cherché à remplacer ces dernières par des "religions immanentes" (dont le principe supérieur n'est pas transcendant comme Dieu par rapport au monde). L'Italie fasciste n'a signé qu'un concordat (accord à caractère de compromis) avec le pape ; l'Allemagne nazie a combattu les Eglises ; l'URSS communiste les a supprimées. L'Espagne de Franco était un Etat autoritaire, mais pas totalitaire, au sens de régime à parti unique qui confisque toutes les activités d'une société.

Ensuite, le fait d'être "croyant" (en Dieu) n'implique bien sûr pas que l'on résiste forcément au Mal, mais suppose nécessairement que l'on ne se prenne pas pour Dieu et que l'on ne divinise pas un dirigeant ou un système...

En effet, Dieu est l'élément de la vie en vertu duquel le jugement se hausse au-delà des faits d'existence jusqu'aux valeurs d'existence.
A. N. Whitehead

P.-S. J'ai choisi une citation de Whitehead parce qu'il est pour moi un cas limite qui formule un monisme panthéiste faisant de Dieu une réalité immanente de l'existence et de la connaissance, mais agissant aussi dans le monde de manière transcendante par la voie de la finalité.



Désolé, mais je ne partage pas du tout ce point de vue. Pour la simple et bonne raison que le bien et le mal sont des valeurs relatives et que le fidèle, s'il ne se prend pas pour un dieu, suit quand même les préceptes des autorités qui représentent un aspect du divin.

Ainsi, quand Hirohito prônait le hakkō ichiu, la réunification des 8 coins du monde sous un seul toit, par la guerre sainte contre la Chine, il le faisait à titre de descendant et de grand-prêtre de la religion d'état (kokka shintō) vouée à la déesse Amaterasu. Les soldats nippons qui égorgeaient les civils et violaient les femmes le faisaient donc au nom du représentant divin et de son autorité sacré puisqu'il était juste que certains périssent afin que s'accomplisse le destin du peuple Yamato.

Quant à l'Espagne, l'Italie et l'Allemagne, on joue ici sur les mots, puisque si ces régimes autoritaires ne parlaient pas au nom des chefs religieux, ils prenaient tous assise dans leur mystique sur les valeurs traditionnelles de la patrie comme la famille et la religion et incorporaient la religion chrétienne à leur rhétorique en pigeant ça et là les éléments qui faisaient leur affaire. Donc, en suivant le chef et sa doctrine, le citoyen accomplissait indirectement son devoir de bon chrétien. D'ailleurs, les autorités chrétiennes de ces pays ont-elles dénoncé publiquement le régime ?

"Comme chrétien, je n'ai pas à me laisser berner mais j'ai plutôt le devoir d'être un combattant pour la vérité et la justice." Adolf Hitler (The speeches of Adolf Hitler, April 1922-August 1939, Oxford University press)

Re: "Les résistants de Dieu"

Nouveau messagePosté: 04 Déc 2008, 23:04
de romualdtaillon
Audie Murphy a écrit:Je vois où tu veux en venir, Romuald. Les pilotes qui ont lancé leurs avions dans le World Trade Center devait sûrement être "croyants" eux aussi. On va nous accuser de chercher la bête noire...


Très bon exemple qui se passe de commentaires....

Re: "Les résistants de Dieu"

Nouveau messagePosté: 04 Déc 2008, 23:14
de Audie Murphy
Je comprends ton point de vue Tom, mais la religion, toute pure à la base, devient ce que l'homme veut bien en faire. Donc le croyant pense toujours agir pour le bien. Je sais que je pousse à l'extrême, mais je ne suis pas le seul. Demande aux extrémistes !

Pour ce qui est de ton exemple, je suis bien d'accord que la Rose Blanche a agi selon des valeurs morales très élevées et qu'ils ont compris la menace que faisait peser le national-socialisme contre ces valeurs. Je ne cherche nullement à remettre ce point en question.

Re: "Les résistants de Dieu"

Nouveau messagePosté: 05 Déc 2008, 02:43
de Daniel Laurent
Bonjour,
Audie Murphy a écrit:Je comprends ton point de vue Tom, mais la religion, toute pure à la base, devient ce que l'homme veut bien en faire. Donc le croyant pense toujours agir pour le bien.

De plus ta remarque, Audie, peut aussi s'appliquer aux "croyants" communistes. Il est beau sur le papier leur ideal...