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Quand Jean Oberlé et les siens faisaient des leurs

Répondant à l'appel du Général de Gaulle, des milliers de combattants français se lèvent en Europe et en Afrique. Retrouvez ici la 1ère DFL, la 2ème DB, les FAFL, FNFL... Mais aussi celles et ceux qui ont résisté à l'occupant en entrant dans la clandestinité pour rejoindre le maquis ou les groupes de résistants.
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Quand Jean Oberlé et les siens faisaient des leurs

Nouveau message Post Numéro: 1  Nouveau message de hilarion  Nouveau message 09 Oct 2006, 18:45

Pendant la seconde guerre mondiale, la radio est le seul média de radiodiffusion de masse il est l'un des seuls liens entre la France occupée et l'angleterre. Le pouvoir de ce média a été très fort, en effet, la B.B.C. a soutenu le moral des Anglais durant la bataille d'Angleterre, les estimations d'avions abattus ont été bien souvent faussées, par ailleurs la radio ennemie argumentait dans un autre sens Qui croire…? Si radio Paris a eu ses adeptes, radio Londres a été, ceci malgré le brouillage très écoutée des français. Tout le monde a en tête, la Vème de Beethoven puis la célèbre phrase d'introduction "Ici Londres les Français parlent aux Français Voici quelques messages personnels…… "Cette radio de la France libre va naître dans le courant du mois de juillet 1940 sous l'impulsion de Jacques Duchesne. L'équipe qu'il forme comprend Jacques Borel, Pierre Bourdan, Marin Jean Oberlé Pierre Lefevre et Maurice van Moppès, des noms prestigieux vont s'y succéder Maurice Schumann, Pierre Dac. Si derrière le micro l'unité a semblé de mise, les pensées des uns et des autres n'ont pas été dans leur ensemble favorable au général de Gaulle. Le but n'est pas de refaire ici l'histoire de radio Londres que Jean Oberlé à si bien écrite, mais m'attarder sur un "détail " qui a eu, en son temps, une importance sur les ondes : Barbichou.
J'avoue avoir bien ri après avoir posé cette question sur le forum, e je me devais donc de vous raconter cette histoire dans un cadre plus étendu.

Barbichou va naître un peu après le raid de Dieppe. Il faut redonner un peu le moral aux Français. En effet, la propagande allemande a su parfaitement tirer l'exploitation de l'échec de ce raid, il faut reconquérir la confiance des français qui voient s'éloigner un débarquement proche, de plus, le ras-le-bol des émissions patriotiques et stratégiques se fait sentir. Jean Oberlé et jacques Duchesne vont créer "la discussion des trois amis".Oberlé y Campe un type septique bourru et rebelle au bourrage de crâne, Duchesne lui un conciliateur mais ce ne sont que des français de la radio de Londres qui ne cherchent à capter l'attention de leurs concitoyens.

L'idée va venir, alors que Louis de Villefosse, en compagnie d'Oberlé, Labarthe et Duchesne évoquent des souvenirs de Paris et notamment des soirées du Vieux-Colombier, Louis de Villefosse se met à réciter des passages du testament du père Leleu avec des intonations de vieux paysan. Duchesne vient de trouver la voix qui va animer le nouveau personnage qu'il a trouvé dans le journal allemand édité en France "le Pariser Zeitung", Barbichou, qui fait allusion à un personnage, petit bourgeois, naïf grincheux et réfractaire à la collaboration, mais toujours condamné faire les frais de sa crédulité envers les Anglais, ses déboires sont affichés sur les murs parisiens.

L'idée de Jacques Duchesne va être de donner une voix à ce personnage, et de lui prêter une existence fictive, de lui permettre de parler en connaissance de cause de l'occupation et se faire le relais des doléances des Français à l'égard des anglais, de rendre compte de ses démarches et dresser un tableau véridique de la situation.

En résumé une vraie manipulation des esprits.

Louis de Villefosse donne donc son accord pour l'interpréter, mais comme tout bon comédien il va devoir s'identifier à ce personnage, et l'éducation reçue à l'école navale ne prévoit pas de cours de théâtre…
Autre problème, en 1942, les français de Londres sont totalement déconnectés de la vie en métropole, il va donc falloir trouver des renseignements, éviter de faire une bourde radiophonique qui permettrait aux allemands de rebondir.
Ce travail de recherches, Louis de Villefosse va le faire en compulsant les lettres reçues à la B.B.C. des découpures de presse et des rapports sur la vie des français face à l'occupant. Interroger le plus de gens possibles ayant passé récemment la manche, récolter des informations sur les fameuses affiches placardées dans Paris, mais rien car les affiches étaient trop récentes.

L'identification physique au personnage est plus dure, il l'imagine pourvu d'une barbiche, porteur d'un chapeau rond et porteur d'un binocle, il va aller jusqu'à le croquer, mais il fut très difficile de trouver la bonne intonation, le bon accent. De Villefosse va devoir durant une semaine s'imprégner de la voix de Barbichou en parlant comme lui. En effet la radio de Londres à annoncé à mots couverts et en termes propres à piquer la curiosité l'arrivée de ce personnage.

Le 13 septembre 1942, Barbichou est décrit puis, présenté par le speaker de la radio, Barbichou raconte son évasion et son arrivée mouvementée à Londres. Il est convenu que Barbichou interviendra tous les dimanches soir à la radio.
Le 20 septembre Barbichou parle de sa librairie de l'avenue Orléans, de son attitude de résistant outres quelques tracasseries policières, lui ont valu les affiches Parisienne. Son intervention se termine avec son intention de rencontrer les chefs alliés.

Le 27 septembre, il interrompt une émission sur l'affaiblissement du moral en Italie, proteste contre ce bourrage de crâne, discute aigrement avec Oberlé et Duchesne et insiste pour voir De Gaulle et Churchill
Le 4 octobre Barbichou est fictivement introduit près de de Gaulle, un reporter décrit pendant ce temps l'extérieur de Carlton garden et l'attente de la future interview.

Les deux dimanches suivants, Barbichou est reçu par Churchill à Downing Street , accompagné par Oberlé et Duchesne. Tout y passe, discussion avec le portier, description du hall. Il raconte comment il a fait répéter à Churchill son discours à la France, alors qu'ils étaient sous les bombardements Allemand. Barbichou évoquant son arrière-boutique, où il a entendu la première fois, ce discours. Un secrétaire accueille les visiteurs, Barbichou lui fait la description des privations et du courage des français, traduit avec véhémence l'attente de l'ouverture d'un second front et insiste pour que le débarquement arrive au plus vite. La première émission s'arrête au moment où il est introduit.

L'émission suivante devait être logiquement, le récit de l'entrevue. Mais deux jours avant les secrétariat du War cabinet suspend l'autorisation de passer le texte avant qu'il soit soumis au secrétaire particulier du Premier Ministre, ou de Churchill lui-même.
Compte-tenu des délais, l'accord à obtenir risque d'être long. On conseille donc à Louis de Villefosse de procéder à une nouvelle écriture des textes, car on ne peut prendre la responsabilité de laisser la radio prêter au Premier Ministre des propos qu'il n'a pas effectivement prononcé.. Louis de Villefosse va tout recommencer et faire que Barbichou raconte sa visite sans la raconter. De Villefosse fait entrer Barbichou en transe, jouant l'agacement, l'agité l'air absent, éludant les questions dont on le presse. Puis il s'adresse aux français pour leur dire sa tension, son exaltation croissante des derniers jours, et de son dernier rêve sur la libération prochaine de la France et de la joie que cela va engendrer, au cours de ce rêve paraît et parle Churchill en surimpression de la visite.

Au cours du septième sketch, Barbichou rencontre un capitaine américain qui a fait l'autre guerre et parle des préparatifs de son pays. Le huitième, quant à lui, le fait s'entretenir avec Jacques Borel sur l'interview donnée par M.Garreau , représentant la France combattante en URSS, il lui pose des questions sur les sacrifices et les efforts victorieux des russes et décide de partir en union soviétique.

La neuvième émission, elle devait se dérouler sur un terrain d'aviation le huit novembre, mais le 8 novembre 1942 les alliés décidaient du sort de Barbichou. Ils viennent de débarquer en Afrique du Nord et son accueillis par les canons Français devant Casablanca et Alger. Désormais les français attendent autre chose que les élucubrations de Barbichou.

Cette courte vie de Barbichou, est une goutte d'eau dans l'océan d'anecdotes de la seconde guerre mondiale mais, pour son auteur elle lui a value la reconnaissance de certains français et les félicitations de ses camarades. De Carlton Garden la réflexion suivante: "c'est tout de même malheureux de voir un officier supérieur faire le pitre comme ça…" Remarque qui à valu à son auteur une réplique d'Oberlé " ce qui est malheureux c'est de voir les pitres jouer aux officiers supérieurs. " Comprenne qui pourra.

Mais le plus beau des témoignages reçu est celui-ci

Roanne le 16 octobre 1942
Nous avons à féliciter M.Barbichou de sa belle causerie de dimanche dernier. J'étais à l'écoute, ainsi que beaucoup d'entre nous, et nous le remercions de plaider notre cause aussi patriotiquement : c'est le mot d'une humble mère, qui les larmes aux yeux n'a pus trouver mieux, pour résumer ce qu'elle ressentait.
Une mère bien éprouvée.

Source : Souvenirs d'un marin de la France Libre. Louis de Villefosse


 

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Nouveau message Post Numéro: 2  Nouveau message de Prosper Vandenbroucke  Nouveau message 09 Oct 2006, 19:12

Merci pour cette belle évocation mon cher Hilarion
Amicalement
Prosper ;)
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