JARDIN DAVID a écrit:A mon avis il faut rester prudent sur les conclusions concernant la désinvolture policière nazie. Que penser, côté Alliés, du suicide d'HIMMLER par exemple ? Ou de l'exfiltration réussie de nombreux cadres allemands ? Même Pierre LAVAL est passé à deux doigts du suicide réussi.
Les résistants prisonniers de haut rang étaient brutalisés, mais pas plus que nécessaire. Sans aucune preuve à avancer, j'ai l'impression qu'à ce niveau de responsabilités FFI, il n'y a pas d'autres "bavures" enregistrées.
Pour en revenir à MOULIN, et sans porter de jugement, il me semble possible qu'il ait raté son suicide, mais de très peu, d'où son état incertain ... et l'énervement allemand.
Autre question : sommes nous certain du silence de J MOULIN sous les coups ?
JD
En parlant de désinvolture des nazis, j'évoquais leur propension guerrière aventuriste, leur excès irrationnel de confiance. Derrière la préparation pendant des années et la planification méticuleuse, c'est la nature hideuse du régime qui compromettait dès le départ tous ses projets, autant qu'un oubli de l'Histoire, ce que de Gaulle avait été un des premiers (et des seuls) à comprendre dès mai 1940. On trouve une illustration parmi d'autres de cette assurance germanique belliciste inappropriée, dans l'incapacité des allemands à tirer un profit politique de la capture du chef suprême de la RIF. C'est d'ailleurs une constante dans les guerres injustes, au sens clausewitzien du terme, encore plus évidente ici où il s'agit de guerre totale, caricaturalement jusqu'au-boutiste.
Le bilan de cinq années d'Occupation est d'ailleurs très lourd pour la résistance française: environ un tiers des résistants ont connu au moins une arrestation (environ la moitié des arrêtés ont connu l'emprisonnement et la déportation); on totalise plus de 35000 morts et disparus pour faits de résistance dont 20000 parmi les 57 000 déportés, plus de 4500 fusillés (sans compter les 1200 otages fusillés par les allemands, les 200 par les cours martiales de Vichy) , plus de 3000 exécutés judiciaires par les TM allemands, plus de 300 morts sous la torture, plus de 200 suicidés, sans compter les morts en mission, ceux qui ont été abattus lors de leur arrestation, les exécutions sommaires, le tout sans préjudice des quelques 20 000 morts dans les combats de la Libération...
Au même niveau que JM, on trouve les "bavures" de Bingen, Brossolette, Cavaillès, un peu en dessous d'Albrecht, Bloch, Scamaroni etc.
A priori, aucun d'entre eux n'a parlé. Pour Moulin, c'est quasi-certain, puisque l'AS et le CNR n'ont pas été sur-impactés dans les semaines qui ont suivi Caluire.
Au fil de mes lectures, j'ai acquis la conviction que JM était depuis son entrée dans la clandestinité, un homme préparé à la mort, mais pas prêt au suicide (il ne l'était déjà pas en juin 1940 et n'avait pas sur lui la capsule de cyanure qu'on lui avait donnée à Londres) . Il est bien sûr impossible d'exclure catégoriquement qu'il soit mort des suites d'une ou plusieurs TS, mais le témoignage de Fuchs en 1983 doit à mon avis primer, pour être très proche de ce qui s'est vraiment passé à Lyon le 25 juin 1943. Cela ne remet pas en cause les qualités et le courage de Jean Moulin. Bien au contraire...