François Delpla a écrit:C'est le 28 mai 2005 qu'est paru le livre de Martin Allen. C'est donc depuis un an que Blair observe, face à une polémique sur un point important de l'action de son prédécesseur le plus célèbre, un silence de plus en plus gênant et, on peut le dire aujourd'hui à coup sûr, gêné. Il est vrai que les historiens, à part votre serviteur, ne semblent guère lui en tenir rigueur, de même que certains passionnés d'histoire ou prétendus tels qui hantent les forums.
Je crois que Blair a d'autres chats à fouetter...
Comme toujours, on ne sait à qui en vouloir le plus, entre ceux qui n'ont jamais rien dit et se sont empressés de croire l'affaire entendue dès que le mot "faux" a été imprimé dans un journal conservateur au début de juillet,
En l'occurrence, le
Daily Telegraph a fait un travail d'enquête - en bref : son boulot -
et a formellement établi que les pièces sur lesquelles reposait la "thèse" du meurtre étaient de vulgaires faux. et les rares qui, comme Andrew Roberts (
http://www.delpla.org/article.php3?id_article=177), ont brièvement exigé une enquête, une plainte et une ouverture d'archives, puis se sont tus devant les lenteurs de la première et l'absence des deux autres. Entre les conformistes totaux et les curieux au souffle court, nous sommes bien montés !
Blablabla...
Quant à votre serviteur, accusé de toutes les turpitudes parce qu'il essaye de faire son boulot sans égard à quelque autre considération, il se voit notamment reprocher deux choses contradictoires : de refuser de se remettre en question, et d'avoir corrigé son appréciation première.
Ladite correction s'est, en fait, opérée de manière
très progressive, lorsque l'évidence s'imposait chaque jour que Himmler s'était bel et bien suicidé.
D'une certaine manière, ce type d'évolution, de votre part, m'a fait penser au
Führer qui donnait parfois des ordres de repli à la dernière minute, donc bien souvent trop tard.
Comme le dossier de mon site, accessible par le lien ci-dessus, est un peu long et que je ne cesse de prôner la concision, je vais faire ici un résumé :
-au reçu du livre, début juin, je dis deux choses : que les révélations d'Allen sont convaincantes, et que la version traditionnelle tombe en poussière; je le ferais encore si j'avais à le faire :
Merci de le confirmer...
tous nous faisons confiance aux archivistes, sinon ça tuerait le métier.
Pourtant, il y a de quoi se méfier. J'avais pourtant, dès avant la confirmation apportée par le
Daily Telegraph, suspecté lesdits documents d'être des faux. Et cité, en référence, la fameuse anecdote suivante.
En juillet 1985, un ufologue plutôt adepte des théories du complot gouvernemental sur les OVNI découvrait aux...
Archives nationales américaines un mémorandum du 14 juillet 1954 signé Robert Cutler, conseiller du Président Eisenhower. Ce document était, indéniablement, une bombe : il confirmait l’existence d’un organisme interagences - dénommé
Majestic 12 - chargé d’étudier les débris d’une soucoupe volante qui se serait écrasée à Roswell (Nouveau-Mexique) en juillet 1947.
Une telle trouvaille s’intégrait dans la publication (plutôt énigmato-bordélique) d’autres documents relatifs à
Majestic 12. Malheureusement, il a été depuis démontré que de tels papiers étaient des faux habilement conçus, et que le "mémo Cutler" avait été déposé aux Archives nationales américaines par une tierce personne inconnue à ce jour.
Conclusion : il faut se méfier des pièces d’allure sensationnelles qui surgissent parfois à la manière d’un lapin du chapeau du magicien. Ce n’est pas parce qu’un document est retrouvé aux archives nationales qu’il est authentique.
-lorsqu'il est question de faux glissés dans les archives,
L'expertise a confirmé que les documents appuyant la "thèse" du meurtre de Himmler étaient des faux.
début juillet, pour moi ça ne rétablit pas la crédibilité du récit traditionnel;
François Delpla a cru immédiatement à la "thèse" du meurtre, avant même d'achever la lecture du livre de Martin Allen. Mais malgré la révélation d'une falsification, il ne fera pas preuve, par la suite, d'un aussi rapide revirement...
"Ay, there's the rub" écrivait Shakespeare. A mes yeux, ce fait prouve l'existence, chez M. Delpla, d'un certain goût pour le scoop et le sensationnalisme. Quitte à ne pas revenir sur une erreur passée. Ce qui est hautement intéressant, quand on sait qu'à l'heure actuelle M. Delpla est le seul défenseur affiché de ladite "thèse" du meurtre. Même un Martin Allen a préféré se réfugier dans un silence pesant et prolongé...
ses obscurités et ses contradictions demeurent, et je m'en veux toujours autant de ne pas les avoir aperçues plus tôt. Dire le contraire, c'est précisément ce que j'appelle une contamination du débat scientifique par l'esprit religieux : le bien, le mal, le vrai, le faux, ne peuvent être que d'un camp et, si on les y découvre, prouvent la sainteté ou la damnation de celui d'en face.
"Moi contre le monde entier". Qui parlait d'esprit religieux ?
Donc, à partir de ce moment, je suspends mon jugement et exige toute la lumière possible.
Non, vous prétendez que Himmler a été suicidé par les Britanniques. Quitte à faire appel à une version des faits passablement embrouillée.
-je n'en continue pas moins d'essayer de la faire moi-même, avec les lumignons du bord; ainsi je constate que sur les trois documents invoqués par Allen pour prouver l'assassinat, le second, le plus explicite (disant une heure ou deux après que Himmler a été "silenced") a passé victorieusement l'épreuve de l'expertise et n'est mis en doute que par référence aux deux autres.
Mais bien sûr.
Tous les documents ont été reconnus comme faux ou fortement suspects.
Et imagine-t-on un document aussi explicite... exister ? Subsister dans les archives ? François Delpla dénonce une absence de déclassement des pièces : en ce cas, si vraiment Londres restait dominé par une conspiration du silence, comment expliquer qu'un document aussi manifestement explosif, trop beau pour être vrai, soit aussi facilement accessible ?
Surtout, je vais moi-même, dès que possible, aux archives de Londres, où je constate le très faible pourcentage des documents à ce jour communiquables et l'absence parmi eux de tout compte rendu des dernières heures de Himmler par les forces anglaises d'occupation en Allemagne à leurs autorités hiérarchiques. Cependant je tombe sur un dossier très éloquent, sur la façon dont le ministère a briefé Selvester, principal geôlier de Himmler, lorsque son témoignage fut sollicité par des biographes du Reichsführer SS dans les années 60.
http://www.delpla.org/article.php3?id_article=197
Eloquent en quoi ? Rien dans ce témoignage ne remet en cause la réalité du suicide.
AVEU très humble : cette visite aux archives m'a fait beaucoup cogiter.
Pour rien, malheureusement.
D'autre part, j'ai complété ma documentation par tous les moyens possibles et fini par lire un livre d'un bonhomme beaucoup moins bien considéré que Martin Allen, Hugh Thomas. Un auteur, pour le coup, parfaitement religieux, voire théâtreux : il ne jure que par les substitutions de personnes !
Hugh Thomas, à ne pas confondre avec l'historien de la Guerre d'Espagne, est un escroc fini, médecin malade et historien délirant. Comme l'a écrit un spécialiste de Himmler, Richard Breitman, Thomas
"assassine l'Histoire".
Le cadavre de Himmler n'est pas le sien, etc. Cependant, ce que je ne soupçonnais pas, d'où ma lecture tardive, il a enquêté très sérieusement, interrogé la totalité des survivants accessibles etc. Il en ressort que (contrairement à ce que tous disaient ou semblaient admettre dans le débat faisant suite au livre d'Allen), le lieu du décès n'était nullement une villa discrète réservée aux basses oeuvres des services secrets, mais un quartier général, soit, en ces premiers temps d'une occupation, un moulin très fréquenté, bref, le dernier endroit où commettre un meurtre qu'on voudrait maquiller en suicide.
Eh oui...
C'est embêtant, n'est-ce pas ?
Ce faisant, le suicide de Himmler s'est effectué devant témoins. Ce qui n'a peut-être pas autant d'importance que ça...