Post Numéro: 16 de Petit_Pas 10 Jan 2005, 12:48
Salut,
un des historiens qui a assisté aux commémorations du 60e anniversaire sur France 2 (je ne me souviens plus de son nom et je n'ai pas le temps de chercher maintenant) a dit qu'il fallait faire le comptage suivant pour avoir une petite idée de ce que fut la résistance et la collabration :
pour 1 résistant atif, il faut compter 10 personnes qui sans être réellement identifiées (ou identifiables) en tant que résistantes permettaient aux résistants entrés en clandestinité ou dans le maquis de vivre et de mener à bien ses missions en lui fournissant renseignements, cartes de ravitaillement, papiers adminsitratifs, fournitures diverses, en "jouant" les facteurs pour faire passer les messages d'un membre à l'autre ou d'un réseau à l'autre, en hébergeant de façon temporaire des personnes recherchées le temps qu'elles soient évacuées, en prêtant leur domicile ou des bâtiments pour des réunions clandestines ou pour installer des imprimeries, des radios, des caches d'armes...
Cette "nébuleuse" autour du résistant pouvait être constituée de personnes qui se sont impliquées tout au long de la guerre ou de façon épisodique ; certaines n'ont aidé qu'une fois, d'autres à plusieurs reprises...
Le ratio est le même pour la collaboration : pour un collabo actif il faut compter 10 personnes plus ou moins impliquées dans des affaires de délations, de corruptions, de trafics divers...
Il y a également une différence notable entre le nord et le sud de la ligne de démarcation. Au nord, la résistance active va s'organiser beaucoup plus tôt que dans le sud du fait de la pression de l'occupant présent dès juin 40. A partir de fin 41, début 42, tandis que la résistance au nord connaît son apogée en terme d'effectifs, on note une montée en puissance dans la zone sud qui va s'amplifier après novembre 42 et le franchissement de la ligne de démarcation par les troupes d'occupation. Par ailleurs, dans le même temps, les deux mouvements vont bénéficier de l'entrée en résistance des communistes puis des réfractaires au STO. A partir de 43, les cellules de résistance du nord vont commencer à connaître d'importants revers car leurs organisations commencent à être soigneusement noyautées par des agents de la collaboration. Dans le sud, les réseaux continuent à s'étoffer et seront bientôt (fin 43 début 44) l'objet de noyautage minutieux... Au moment du débarquement, les cellules de résistance du Nord sont pratiquement à bout de souffle (selon certains résitants, si le débarquement n'avait pas eu lieu au printemps 44, les Alliés n'auraient plus trouver d'assistance dans les régions du Nord car toutes les cellules auraient été décimées du fait du noyautage) ce qui explique que les coups de force dans le sud ont été plus virulents et plus ambitieux que les sabotages dans le nord où la Résistance commençait à avoir de sérieux problèmes d'effectifs...
Bien sur il s'agit là d'un résumé hatif fait à l'emporte pièce, qui ne retrace qu'imparfaitement l'histoire de la Résistance et qui peut être nuancé et approfondi de nombreuses façons...
Pour l'historien cité plus haut, il ne faut pas compter plus de 500 000 résistants actifs sur tout la période de la guerre et sur tout le territoire français, même chose pour la collaboration. On arrive donc à des "nébuleuses" de l'ordre de 5 millions de personnes dans les deux camps entre 1940 et 1944.
A noter que si pour nous 500 000 résitants actifs semble être peu de chose au regard de la population française (autour de 40 millions d'habitants) il faut cependant prendre en compte les données suivantes :
dans 95 % des cas, les résitants actifs étaient des hommes entre 16 et 40 ans ; or à l'époque on compte 2,5 millions de prisonniers de guerre retenus en Allemagne ; des milliers d'hommes dans cette tranche d'âge sont internés ou déportés parce que juifs, tziganes, réfugiés politiques ; d'autres sont partis au STO volontairement ou sous la contrainte (entre 500 000 et 1 million), 5 départements français ont été annexés par le Reich... Compte tenu des difficultés à assurer la survie d'un résitant souvent contraint à vivre dans la clandestinité et donc dans la dépendance d'autres personnes, il faut admettre que 500 000 résistants actifs représente un chiffre non négligeable quoique l'on puisse en penser aujourd'hui bien à l'abri dans nos salons et sans souci d'approvisionnement.
Pour les 500 000 collabos, le chiffre est en fait beaucoup moins important qu'il n'y paraît car, au contraire de la résistance qui était fortement sexuée, la collaboration recrutait aussi bien chez les hommes que chez les femmes, même si on a trop souvent tendance à ne parler que des hommes, notamment à cause de la Milice et de la LVF.