Voilà une initiative intéressante à partir d'un fil qu'un "cavalier seul" a pas mal bouleversé depuis la semaine dernière.
Donc je me lance même si en modérateur débutant, je ne suis pas certain de m'y prendre correctement. Mes collègues rectifieront si nécessaire.
Lusi a écrit:Dans les pages précédentes est abordée la problématique de la légalité de « l’Etat Français » de Pétain et de la France Libre de De Gaulle.
Cela me semble propre au cas de la France et j’aimerais que nos amis étrangers, issues d’un pays également occupés nous donnent leurs avis, ressentis, comment cela s’est passé chez eux, … Bien évidemment les autres peuvent répondre aussi.
Pour moi le problème vient du fait que contrairement à la majorité des autres pays, le dirigeant et/ou son gouvernement n’a pas quitté le sol national pour rejoindre la Grande-Bretagne ou au moins l’Empire.
De plus, il me semble, qu’une des particularités de la France est d’avoir eu un changement de gouvernement juste avant l’armistice (ceci ayant aussi permit cela), ce qui fait qu’aucun membre de cet ancien gouvernement ; où qu’il soit ; n’avait plus, on va dire, la légitimité « légale » donnée par un gouvernement en activité.
Je ne sais si je suis compréhensible. Ce n’est bien évidemment pas une critique contre de Gaulle, ni une approbation de Pétain et de son gouvernement.
Aucun personnage du nouveau gouvernement légitime du moment (Président du conseil nommé par le Président de la République) n’a rejoint l’Angleterre.
Le Président de la République est resté en métropole. Aucun des anciens présidents du conseil, aucun des anciens ministres importants, aucun des deux présidents des chambres n’ont rejoints l’Angleterre ou l’Empire. Donc aucune personne n’apporte avec lui la légitimité (comme Président de la République) ou une représentativité importante.
Il ne reste en Angleterre pour représenter la France et continuer le combat au nom de celle-ci, qu’un général (à titre temporaire), simple sous-secrétaire d'Etat (donc pas grand-chose dans un gouvernement) et qui plus est d’un gouvernement qui n’est plus en exercice.
Donc la représentativité de celui-ci est dure à vendre aux alliés. Et de Gaulle est de Gaulle, sa personnalité a surement joué aussi contre lui.
Pour compliquer cette reconnaissance, l’Empire ne le reconnait pas et globalement suit le gouvernement Pétain. Les autres Etats reconnaissent le gouvernement Pétain.
Dans le cas des autres Etats occupés, ils semblent qu’ils sont arrivés avec une représentation jugée légitime, ce qui n’a pas été le cas de la France.
Comme la France ils se sont pris une déculottée, mais ce qui a aussi surement aussi joué contre la France, c’est que contrairement aux autres, elle avait une armée considérée comme puissante contrairement à d'autres.
Comme d’habitude, petit rappel, je un aimable amateur, donc pas sur la tête.
A+
JP
Et tant qu'à m'y lancer, j'y vais à fond en apportant un point de vue belge.
La Belgique est un pays compliqué (vous avez dû vous en rendre compte), les 2 guerres mondiales n'y sont pas étrangères.
Concentrons nous sur la seconde.
Le 28 mai 1940, notre vaillante petite armée capitule, épuisée par 18 jours de retraites difficiles et successives dues à une aile droite sempiternellement dépassée par la course des Panzer à la mer.
Le gouvernement s'exile donc à Londres où il rejoint, en bonne entente ceux des Pays-Bas et du Grand-Duché du Luxembourg, neutres et balayés par l'agression allemande, comme la Belgique. Le roi Léopold III prend alors la décision unilatérale de ne pas se réfugier à Londres et de rester... partager le sort de ses soldats. Rappelons au passage que Léopold III est le fils d'Albert I, le "Roi chevalier" qui, en 1914, refusa de capituler et partagea le sort de ses soldats dans le réduit national, derrière l'Yser, à un jet de pierre de Dunkerque. Léopold est donc le fil d'une légende. Ce doit être lourd à porter.
Léopold III le paiera chèrement. Le peuple belge comprenant mal pourquoi il n'avait pas choisi de poursuivre la lutte, pourquoi le roi avait semble-t'il eu des contacts (pseudo-collaborationnistes?) avec l'occupant et pourquoi le roi était parti en Allemagne (en réalité contraint après le débarquement des Alliés en Normandie). Le tout déboucha sur une crise très grave dite "de l'affaire royale" qui faillit provoquer une guerre civile, opposa Flamands (très catholiques) et Wallons (socialistes et plutôt républicains) et mena à l'abdication de Léopold III en 1951.
Voilà déjà un beau particularisme.
Autre belle pomme de discorde : les nationalistes flamands voient en l'arrivée des Nazis une belle occasion d'assouvir leur politique indépendantiste. D'origine germanique, ils (les nationalistes, les "flamingants") vont pouvoir s'émanciper au sein du Reich qui s'étend à l'ouest. De nombreux flamands se porteront volontaire dans la Waffen SS. La paix revenue, ils seront jugés comme traitres à la patrie (ce qu'ils sont évidemment à mes yeux). L'amnistie de ces condamnés reste, 70 ans plus tard, une revendication flamingante même si son évocation s'estompe avec le temps (le réservoir électoral des amnistiables s'épuisant naturellement, je suppose).
Côté francophone, il y eut également des volontaires Waffen SS à la suite de DEGRELLE et de sa Légion Wallonie. Il y eut, là aussi, des condamnations la paix revenue (DEGRELLE, réfugié en Espagne, sera condamné par contumace).
Mais dans la seconde moitié du XX siècle, au clivage linguistique Flamands/Wallons, va s'ajouter celui de Flamands tous collabos/Wallons tous résistants. Un clivage qui tend seulement à s'effacer depuis le 50e anniversaire de la Libération grâce au travail d'une nouvelle génération d'historiens.
Ceci, très très résumé et sans traiter des collaborations et résistances "très ordinaires".
C'est un premier jet, l'amorce d'une pompe sur un sujet que je maitrise mal.
Je laisse à mes compatriotes du forum le soin de compléter tout ça.