Bruno Roy-Henry a écrit:Mais oui ! le fait de ne pas respecter le mandat qui vous est confié rend nulles les décisions prises en-dehors de celui-ci. C'est le cas de Pétain le 11 juillet : il s'arroge les pleins pouvoirs alors que le parlement ne lui a donné les pleins pouvoirs que pour rédiger une nouvelle constitution, ce projet devant encore être approuvé par les chambres... Il n'y a là aucune difficulté : ne pas l'admettre me semble étrange
Reprenons le texte de la Loi constitutionnelle du 10 juillet 1940...
L'Assemblée nationale donne tout pouvoir
au gouvernement de la République, sous l'autorité et la signature du maréchal Pétain, à l'effet de promulguer
par un ou plusieurs actes une nouvelle Constitution de l'État français.
Cette Constitution devra garantir les droits du Travail, de la Famille et de la Patrie.
Elle sera ratifiée par la Nation et appliquée par les Assemblées qu'elle aura créées.
Quel est, pour l'essentiel, le contenu des quatre actes constitutionnels du lendemain 11 juillet ?
1 /
Déclaration du Maréchal, d'assumer les fonctions de chef de l'État français.
Abrogation de l'article 2 de la loi constitutionnelle du 25 février 1875 qui prévoyait la durée du mandat du président de la République, pour sept ans.
2 /
Définition des pouvoirs _ gouvernemental et législatif _ du chef de l'Etat,
jusqu'à la formation de nouvelles Assemblées3 /
Maintien des deux Assemblées jusqu'à leur remplacement par les nouvelles comme prévu...
Ajournement des sessions ordinaires des deux Chambres...
Réunions extraordinaires, uniquement sur convocation du chef de l'État.
4 /
Mesures de précaution en cas d'empêchements, avant la ratification par la Nation de la nouvelle Constitution, d'exercer les fonctions de chef de l'État (Pétain) et du vice-président du conseil des ministres (Laval)
..........................................................
Au lu de cela on comprend que l'élaboration d'une nouvelle Constitution ne se réalise pas en un tour de main.
On imagine mal, le Maréchal, sortant le précieux document d'une pochette surprise, s'adressant au peuple de France en louant sa souveraineté et en l'invitant à se rendre aux urnes pour lui faire la grâce, à lui Maréchal vénéré d'accepter sa nouvelle Constitution !... ça n'est pas sérieux !
Comment peut-on concevoir le processus ?
Chacun aura noté que la loi du 10 juillet 1940 donne tout pouvoir
au gouvernement de la République.
Il faut donc constituer un nouveau gouvernement, c'est ce qu'a fait Pétain et il l'a annoncé aux Français dans son discours du 11 juillet 1940.
<< Douze ministres se répartiront l'administration du pays. Ils seront secondés ppar des secrétaires généraux qui dirigeront les principaux services de l'Etat >>
Création d'une nouvelle Assemblée... ça prend du temps.
La ratification par la Nation ?
Dans ce deuxième semestre de 1940, après le désastre de juin 1940, une grande partie de Français se trouvait dans des communes "aboutissants des chemins de l'exode". Où étaient-ils recensés ?
D'autres avaient rejoint leurs villes qui pour beaucoup, portaient les traces des séquelles des batailles et des bombardements. Toutes les structures administratives étaient à reconstruire.
Alors une opération de ratification par le peuple dans ces conditions là ?
Et on pourrait ajouter le conditionnement humain de tout ce peuple dant la préoccupation première était l'art d'accommoder les topinambours et les rutabagas. La Constitution... Qu'est-ce qu'ils en avaient à foutre !
Je termine par une réflexion personnelle, au su des évènements du temps de ma jeunesse...
Le scénario de juillet 1940 a été orchestré par un Laval toujours aux premières loges.
Mais à quel point cet homme là, bercé par ses illusions de la Collaboration, devait être aveuglé, au point de ne pas avoir appréhendé les périodes tourmentées qui ont succédé à son projet de loi ?
Roger