thucydide a écrit:Le manque de prévision est notable, ce qui dénote la croyance uniquement en leur valeur militaire du moment.
Mais l'autre problème que montre Tooze est la difficulté pour le reich de réaliser luttes administratives, les pesanteurs et luttes internes.
Hitler a aussi lutté d'une certaines manière contre les structures hiérarchiques allemandes.
Bonjour,
Un enquiquineur patenté qui ne cessera de mettre des bâtons dans les "chenilles" de ses petits camarades, n'est autre que Ferdinand Porsche, président de la Panzer-Kommission! Même poliment écarté de cette fonction, il continuera à interférer (exemple, en 1944, lors du choix du Jagdtiger et de son train de roulement!).
Mais ce n'était pas le seul, Krupp et Rheinmetall-Borsig (ex-Ehrard, en 14-18), dans le domaine des pièces d'artillerie, ne pouvaient pas, non plus, se blairer et passaient leur temps à se faire des crocs-en-jambes, à l'entrée (et à la sortie!) des réunions de commission d'armement! Même motif, même punition, entre MAN et Daimler-Benz, etc. Les vieilles luttes fratricides entre fabricants dataient du II.Reich!
Tout çà était des histoires de gros sous et de contrats juteux! Un bel exemple de perte de temps et de pépètes est résumé par la fameuse Zimmerit du Herr Doktor Zimmer et de son entreprise la Chemische Werke Zimmer und Kompanie Gmbh (CWZ). En fait, seule, l’armée allemande utilisait des mines antichars magnétiques (Haft-Hohlladung 3Kg à charge creuse). Bref, hormis quelques soldats de l’Armée Rouge, au tempérament suicidaire, qui tenteront de retourner des armes capturées sur leurs propriétaires, cette mine efficace mais au maniement délicat était une exclusivité de la Heer - en plus, le bazooka, autrement plus efficace, venait de faire son apparition. Malgré tout, une note officielle du 29 décembre 1943 (HTV 44 –Nr.30), entérine le « zimmeritage », commencé partiellement depuis le mois d’août précédent. Deux cents kilos de Zimmerit sont nécessaires pour enduire un Tiger I ou II. L’application, effectuée sur les blindages apprêtés à l’antirouille, comporte quatre phases, une première couche d’environ 5mm d’épaisseur sculptée en carrés à la spatule, une période de séchage de 24H00 minimum, en fonction de la température ambiante, une seconde couche de 4mm travaillée comme la précédente mais selon des schémas élaborés par chaque usine et, enfin, un séchage au chalumeau, tout en respectant une distance minimale car, surchauffée, la Zimmerit à tendance à prendre feu ! En principe, cette superbe invention ne s’applique que sur les parties verticales ou inclinées et se limite à la hauteur que la main d’un homme peut atteindre. Le département Wa Prüf 6 informera les usines, le 9 septembre 1944, qu’il n’est plus nécessaire d’appliquer la Zimmerit sur les Panzer et Sturmgeschütze, suite à des rumeurs, qui s’avèreront inexactes, signalant une fâcheuse tendance de l’enduit à s’enflammer un peu trop facilement, au combat, et provoquer des incendies majeurs. C'était, plutôt, une bonne nouvelle, car cette opération longue et fastidieuse nécessitait des temps de séchages importants entre les deux couches successives et retardait d’autant la sortie des blindés neufs. Pour clore cette anecdote de l’Histoire, à la fin du conflit, les services de renseignement alliés auront toutes les peines du monde pour obtenir la formule chimique de la Zimmerit.
On en retrouvera des stocks inutilisés de plusieurs tonnes, dans les usines, à la fin du conflit. Le "malheureux" Doktor Zimmer avait vu son contrat d'approvisionnement interrompu, quasiment, du jour au lendemain, mais, à mon avis, Frau Zimmer avait du se voir offrir quelques jolis manteaux de zibeline!
Là, il ne s'agit que des matériels terrestres, mais la même ambiance "sympathique" devait, également, régner dans l'aéronautique et le naval.
Albert Speer et ses services s'étaient, aussi, efforcés, de leur côté, d'y mettre le holà, mais il y a de vieilles habitudes qui perdurent. Tout national-socialiste qu'était le régime, les entreprises allemandes fonctionnaient selon le principe "capitaliste"!
Il y aura, aussi, de belles empoignades entre les services de l'Armée et les constructeurs, quand, à l'interruption d'une production, ces derniers réclamaient l'indemnisation de leur stocks de pièces , désormais, inutiles.
Grosso merdo, la livrée gris unie des Panzer - conçue pour un environnement d’Europe occidental, en adéquation avec les zones d’ombre d’un habitat dense et un environnement boisé - s'était révélée inadaptée, en période estivale, à l'Est, sur le flanc sud, dès le printemps 42 - avant, on ne s'était pas trop posé de questions -. Ladite peinture grise était réalisée à partir de pigments d'aluminium... et, l'aluminium, Albert Speer, dès son arrivée dans le fauteuil de son ministère, en 1942, avait souhaité en réserver l'emploi à la seule Luftwaffe - en plus, ces cochons de Français passaient leur temps à tricher sur la teneur de la bauxite qu'ils devaient fournir au "Grand Reich"... une petite couche de "riche", sur une grosse pile de "maigre", dans les wagons! -. Mais il y avait, alors, des piles de fûts de pigments chez les fabricants! Courant 42, quand ils avaient commencé à râler sur la baisse des appros, on leur avait conseillé de couper leur gris avec du blanc, d'où un éclaircissement visible sur les clichés d'époque. En parallèle, les chimistes bossaient sur la mise au point de pigments peu coûteux ; travaux qui aboutiront sur la mise au point du jaune sombre (Dunkelgeld), obtenu à partir de la Terre de Sienne - un truc pas cher et disponible à profusion! -. L'année 1942 s'écoule, les constructeurs raclent le fond de leurs fûts de pigments gris, et, en février 1943, est publiée la HM instaurant l'application systématique de la livrée "jaune". En juillet 1944, face aux attaques aériennes alliées sur les convois allemands de véhicules militaires, on demandera aux fournisseurs d'appliquer un camouflage sur les véhicules neufs, avant expédition. Sauf que les usines ne réceptionne que du jaune! Le vert (Olivgrün) et le marron (Rotbraun) n'étant distribués qu'aux unités, en pots de pigments de 2 ou 20 kg, il n'y a pas de stock disponible pour fournir les usines! En désespoir de cause, on leur propose d'utiliser leurs vieux stocks de "gris"... One more time, ce n'était pas possible, vu qu'elles l'avaient, toutes, épuisé... ce qui était voulu, car la Heer n'avait pas eu l'intention, début 1943, de les défrayer pour la valeur du stock "perdu". Ach, subtile manoeuvre comptable!
Du coup, durant plusieurs semaines, les Panzerounets seront livrés en jaune "flamboyant", jusqu'à la livraison des premiers fûts de vert et marron, en août 44!