Bonjour Elise,
Comme je l'ai déjà dit sur ce forum et ailleurs, je ne peux et ne veux parler que de ce que j'ai "vécu" et "subi" pendant ces années de guerre
1939/1945 ainsi que ma jeune soeur.
Notre convoi a quitté, de grand matin, la gare du Havre le jeudi 02 octobre1941, avec le concours de la Ligue des Familles nombreuses du Havre, du centre
Georges Guynemer et la Croix rouge.- Assistaient à notre départ :MMrs.le Maire du Havre, le Sous-Préfet, 1 délégué du Secours National, 1 secrétaire général,
trésorier et autres personnes (extrait de l'article du journal du Havre paru le 03 octobre 1941), nous partions, minimum 6 mois/maxi.15 mois.
Le débarquement des Alliés en Afrique du Nord le 08 novembre 1942 a "chamboulé" tous les beaux plans et programmes établis, plus question de retour dans nos familles, la France étant entièrement occupée.- Après le 08 mai 1945, nos retours se sont échelonnés, nous, nous sommes rentrées au Havre en juillet
1945 avec le bateau "Kerouan"- dormant sur le pont - en juillet pas de problèmes, au contraire.- Une "ex réfugiée" qui m'a contactée récemment me dit, être partie
de Saint-Nazaire le 23.04.1942, être arrivée à Oran en juin 1942 et être revenuedans sa Famille en août 1945.
46 mois, loin de notre famille, c'est long et même trop long..... et cela a certainement été plus dur pour notre Mère, car, à part un message radiophonique, fin 1942,
lui apprenant que nous étions en vie, en bonne santé et bien accueillies dans des
familles à la campagne, cela a été tout comme nouvelle.
En ce qui concerne les pressions diverses, comme je l'ai déjà écrit, en 1941, rien ne pouvait se décider et faire sans l'aval de l'Etat français et des autorités occupantes,
Alors !!!!!!!!... Je pense que si l'on faisait partir les enfants en priorité, c'est qu'ils sont l'avenir d'une Nation et, si j'avais un choix à faire présentement, c'est certain, j'enverrai, si la possibilité m'en était donnée, mes Petites Filles dans un "lieu sécurisé", c'est dur de se séparer de ses enfants, mais de devoir les priver quand vous n'avez rien ou presque à leur servir, les voir se terrer quand les sirènes s'ébranlent et courir aux abris en pleine nuit, c'est encore pire.- C'est toujours facile de refaire l'histoire, bien installé devant son écran d'ordinateur ou de télé, mais, quand vous avez des enfants, vieillards, civils sous le feu des "projecteurs" vous parez au plus pressé et essayez de survivre et faire survivre vos enfants.
Je ne crois pas que mes Parents aient eu à subir une pression quelconque de la part de qui que ce soit, à part celle de nous préserver et protéger de ces horreurs que nous subissions.
Pour ce qui est de la réadaptation, elle n'a pas toujours été facile, comme pour beaucoup je suppose, car les restrictions n'ont pas cessé le 09 mai 1945, les écoles n'étaient pas toutes libérées par l'Armée, les transports en commun quasiment inexistants!!!!!!! et de toute façon il fallait se "remuer" si nous voulions nous en sortir, nous reconstruire, reprendre une vie familiale et sociale...... mais nous avions été pendant 4 ans, grâce à des PERSONNES vraiment
Formidables, loin des bombes et des restrictions, sans connaître aussi, l'humidité, le brouillard
le gel, verglas et neige et cela était inoubliable ......Je ne sais pas de quel ressentiment le Maire de Limoges (que tu cites) voulait parler, mais
ce que je sais c'est que j'éprouve une farouche hostilité envers la guerre et ceux qui la provoque.- et aussi du gaspillage (du pain en particulier), car je me souviens que ma pauvre Mère, pour ne plus nous entendre nous chamailler à propos du pain, avait pris la décision de peser à chacun sa ration journalière - J.3 = tant de grs - tu décides de manger tes grammes comme tu le veux, je préférai garder la plus grosse part de mes grammes pour le goûter de 4 heures (avec un peu de saindoux dessus à la place du beurre, essaies, tu verras c'est délicieux) !!!!- Mais toutes ces "infortunes" nous ont forgé le caractère, qui nous a permis de remonter à la "surface"....
Tu as eu de la chance de retrouver des archives car au Havre, elles sont parties en fumée lors des différents bombardements de la ville.
Je pense avoir fait le tour de tes questions, j'y ai répondu le mieux que j'ai pu.
A plus, peut-être.
Cordialement. Mimosas.