Tyanne a écrit:Ce n'est que très récemment que j'ai compris tous les enjeux qui se cachaient derrière ce genre d'idéologies. Jusqu'à maintenant, je ne me rendais pas forcément que ça pouvait discréditer toute la thèse. Comme Aldebert, j'ai pris ça pour de la ressource documentaire.
En fait, un document brut reste un document brut, que ce soit en Histoire ou ailleurs. On peut lui faire dire tout ce qu'on veut et être parfaitement convainquant en le faisant.
C'est bien là le problème avec les révisionnistes et les négationnistes (qui bossent pour le même patron à petite moustache, même si ils n'ont pas exactement la même façon de le faire) : ils s'appuient sur les mêmes documents que tout le monde, mais s'attachent à exploiter leurs failles, réelles ou supposées. Dans le cas qui nous intéresse par exemple, tu as noté qu'il met en avant les contradictions entre les témoignages des témoins. Pourtant c'est un fait classique, bien connu de tout policier normalement constitué (et donc des historiens, ils ont le même boulot, tout ce qui change c'est la potentialité de trouver un témoin vivant, en général inexistante pour un historien) : les témoignages sont toujours sujets à caution, simplement parce que chacun a sa propre sensibilité, son propre vécu, et va assimiler les détails qui le marqueront le plus, plus ou moins déformés. Il est de ce fait totalement impossible de reconstituer un événement exactement tel qu'il s'est passé, on ne peut en faire qu'une approximation. Mais nos adeptes du côté obscur de l'Histoire se gardent bien de rappeler cette remarque de bon sens, et font croire à des complots entre les témoins, qui bien entendu sont censés tout faire pour alourdir l'ardoise déjà bien remplie des nazis.
Pour les documents écrits, c'est pareil : ils vont chercher tous les manques, approximations, effets de style, etc... qui pourraient prouver qu'ils ont raison.
L'objectif est toujours le même : prouver une idée préconçue par des faits et des documents, si nécessaire en les discréditant si ils contredisent l'idée de départ.
L'Histoire c'est l'inverse : partir des documents pour arriver à une reconstruction d'un événements, d'une société, d'une pensée. Mais ce fonctionnement lent, difficile, aride, ne plait ni aux fanatiques du IIIe Reich ni au grand public, toujours avide de "mystères", de "complots", de "on nous cache tout on nous dit rien" et de "pourfendons l'Histoire officielle qui comme chacun sait est écrite par les vainqueurs donc fausse"...
D'où la défiance des hautes sphères du site face à ton intervention, la technique du "je ne sais rien mais j'ai lu la prose de untel et je la trouve pas si mal" est un classique de ce genre de personnage.
En espérant que cette petite explication pédagogique aura éclairé ta lanterne, je te conseille de lire un petit bouquin très éclairant sur comment on peut manipuler un texte :
L'affaire du chien des Baskerville, de Pierre Bayard, dans lequel il montre, preuves (à mon avis fausses et tirées par les cheveux) que Sherlock Holmes s'est trompé de coupable dans sa célèbre enquête sur la lande de Dartmoore.
Bonne soirée,
Seb.