Post Numéro: 16 de JARDIN DAVID 09 Jan 2023, 21:57
Sortie de livre imminente ...
Mais déjà quelques mots de présentation par JM BERLIERE dans son infolettre "aux amis" :
En 2012, François Hollande avait insisté sur le fait que pas un soldat allemand n’avait
participé aux rafles des 16 et 17 juillet 1942. Emmanuel Macron a repris exactement la
même formule en 2022 à Pithiviers. C’était un crime « commis en France par la
France », «pourtant la France le fit, l’État français le fit ». En d’autres termes, Hitler,
Himmler, Heydrich, Eichmann… connaissent pas ! « Vichy », « demandeur » de la
collaboration, empressé de répondre aux exigences de l’occupant, voire à les
devancer (l’héritage Paxton), est seul et décide de tout : pas de défaite, pas de clauses
contraignantes d’armistice, pas d’occupation !
« Historiens de cour » et présidents de la République, tout occupés à culpabiliser les
Français, à stigmatiser l’État français et les policiers français, se retrouvent unis pour
effacer purement et simplement l’acteur principal, le « donneur d’ordres »,
l’initiateur du judéocide, dont tous les historiens savent qu’il a pesé d’un poids
essentiel et déterminant, dans ce drame. Les nazis sont quasiment absents des
articles, ouvrages, discours qui se sont multipliés pour condamner « Vichy » sans se
poser la moindre question sur les conditions dans lesquelles Pétain, chef de l’État
français, Laval, chef du gouvernement, Bousquet, secrétaire général à la Police, ont
été amenés à agir pour prendre les décisions tragiques que l’on sait et dont certaines,
moralement condamnables comme le choix de la livraison des juifs apatrides ou
étrangers de zone non occupée, ont permis aux Juifs français de bénéficier d’un statut
qui a permis à 92% d’entre eux d’échapper à la déportation. Mais oser le dire relève
d’un tabou.
Certes, on sait que la commémoration n’est pas plus la connaissance que la mémoire
n’est l’histoire. On sait aussi qu’idéologie et histoire n’ont jamais fait bon ménage,
mais on a assisté à l’occasion du 80e anniversaire des « rafles » de juillet 1942 à des
sommets d’imprécision, d’approximations, d’erreurs, d’élusions, d’affirmations
erronées, de simplifications abusives, le tout avec la complicité ou à tout le moins le
silence complaisant d’historiens, pour lesquels la vérité historique importe moins que
la lutte -sans danger, mais source de grande exposition médiatique -contre le
« fascisme » incarné par certaine-certain des candidats à l’élection présidentielle…
Devant les contre-vérités entendues lors de ces commémorations, il a semblé
nécessaire, voire indispensable aux auteurs, de dénoncer cette instrumentalisation de
l’histoire à des fins politiques, de rappeler quelques vérités et cette règle essentielle
de l’histoire scientifique : rendre au passé son futur afin d’éviter toute téléologie.
Il n’est donc pas question de « défendre Vichy » ou Laval, Bousquet, Pétain… mais
de défendre la vérité et l’histoire. En effet, depuis les années 1970, il est admis qu’à
propos de Vichy tout écart par rapport à la connaissance historique est licite s’il va
dans le sens d’une aggravation de la culpabilité de l’Etat français. « Vichy » a
pourtant suffisamment de responsabilités dans la question juive sans qu’il soit besoin
d’ajouter à son passif ce qui n’est pas de son fait.
Dès le début des années 1970, Paxton avait pratiqué ce genre d’«histoire-réquisitoire»
dans le bilan qu’il dressait de Vichy à la fin de La France de Vichy, ne sélectionnant
pour faire des comparaisons que les chiffres qui étaient en défaveur de Vichy…
Il n’est que temps de remettre l’histoire – ses exigences, ses règles, sa rigueur… en
place. C’est ce à quoi se sont attelés les auteurs de cet ouvrage.
Cette culpabilisation, ces dérapages des discours commémoratifs s’inscrivent dans
une dérive idéologique suscitée par quelques historiens ambitieux oublieux de leur
éthique professionnelle, mais aussi le prudent silence des autres qui ne pouvaient
ignorer les contre-vérités proclamées en ce mois de juillet 2022. D’autant que cette
analyse biaisée, ces contre-vérités ont été largement relayées – ad nauseam - dans les
médias grand public qui désormais « font » l’histoire, décrètent « ce qu’il faut dire »
comme l’expliquait sans fard Léa Salamé dans un débat fondateur que le livre
évoque.
Une dérive qu’il convient de mettre en lumière et d’analyser.
Devant cet oubli des règles élémentaires de la recherche historique - la critique et le
croisement systématique des sources -, ce naufrage de l’histoire scientifique et
critique, la perte de déontologie de journalistes évitant soigneusement toute voix
discordante, les auteurs de cet ouvrage, venus d’horizons différents, mais épris d’un
même souci de rigueur, ont souhaité redonner sa complexité à une question qu’on ne
saurait réduire à une initiative purement vichyste, au point d’effacer les circonstances
- la défaite, l’armistice, l’occupation- et le rôle essentiel de l’occupant nazi quasiment
absent des discours officiels.
La première partie et le cœur du livre sont donc une analyse historique qui remet en
cause le dogme paxtonien, la doxa qui a cours depuis plus de trente ans, et replace au
premier rang l’écrasante responsabilité des nazis (Allemands et Autrichiens !) dans le
drame de la déportation des juifs de France. S’agissant de la responsabilité française,
on s’écarte de la version développée par Serge Klarsfeld axée sur le rôle exclusif de
Bousquet dans les négociations avec les Allemands, qui fait du Secrétaire général à la
police une sorte d’électron libre uniquement guidé par ses propres objectifs
(l’autonomie de la police française). Or Bousquet n’a fait qu’obéir aux instructions de
Laval et, contrairement à la thèse de Klarsfeld et aux propos de tables d’historiens
conviés par les médias à alimenter le réservoir d’idées fausses ayant cours sur la
question, le marchandage- juifs français contre juifs étrangers- fut bel et bien au cœur
de la négociation entre Vichy et les Allemands fin juin, début juillet 1942.
Dans le flot de contre-vérités qui a déferlé, les médias ont joué un rôle déterminant.
Les spécialistes d’histoire de la shoah (jusqu’alors méconnus) que sont Léa Salamé,
Laurent Ruquier, Nicolas Demorand, Jean Lebrun, Daniel Schneiderman, etc…
entourés de spécialistes choisis avec soin (P. Ory, N. Offenstadt, L. Joly, S.
Klarsfeld… et d’autres franchement incompétents) ont décrété le vrai, au point qu’il
semble suicidaire d’essayer de remettre l’histoire en place.
Dans la 2e partie, Emmanuel de Chambost fait son miel de la source inépuisable
d’erreurs et d’inexactitudes diffusées dans les médias avec la complicité active
d’historiens idéologues et l’étrange passivité des autres, apparemment peu soucieux
de prendre des coups en allant à contre-courant de l’opinion.
Dans la troisième partie, René Fiévet développe l’idée selon laquelle ces historiens
idéologues sont devenus des historiens organiques de la mémoire nationale, exerçant
une influence directe sur le discours présidentiel. Car ce qui caractérise ces historiens,
ce n’est pas tant leur production intellectuelle, que leur place dans la société. Une
analyse de l’évolution des commémorations présidentielles au cours des trente
dernières années, montre que ce discours volontairement culpabilisateur (« la faute
de l’Etat », « la faute de la France», « Un crime commis en France par la France »,
dixit François Hollande) est un discours pétainiste, en ce sens qu’il relégitime le
régime de Vichy dans notre histoire nationale. Ce « pétainisme légitimiste » constitue
le paradoxe inattendu du discours mémoriel actuel qui relègue au rang des
accessoires la France libre et la Résistance, dont le seul rôle dans notre histoire a été
de « sauver l’honneur ».
Tout récit mémoriel public repose sur une morale.
Peut-on bâtir durablement une morale citoyenne sur le faux, le mensonger, la
falsification ? Voilà la question qui est posée par ce livre qui dérangera les
philosophes et historiens de cafés du commerce….
PS : les trois auteurs sont membres de HSCO dont on ne saurait trop recommander le
site qui met en ligne des articles sortant du conformisme et des sentiers battus.
"Laisse faire le temps, ta vaillance et ton roi" (Le Cid)