L'énigme Pierre Pucheu

L'énigme Pierre Pucheu. Gilles Antonowicz. Nouveau Monde Éditions. 428 pages. octobre 2018.



« Une biographie de Pierre Pucheu, ministre de l'Intérieur du gouvernement de Vichy du mois de juillet 1941 au mois d'avril 1942. Il est notamment soupçonné d'avoir établi la liste des otages fusillés à Châteaubriant en octobre 1941. En novembre 1942, il change de camp et rejoint les alliés en Afriqque du Nord ou il est condamné à mort après le premier procès de l'épuration en mars 1944.»

Il est notamment soupçonné d'avoir établi la liste des otages fusillés à Châteaubriant en octobre 1941.

Il me semble que c'est plus qu'un soupçon. A l'époque, il était même assez fier d'avoir réussi à diminuer le nombre de fusillés demandé par les Allemands, en leur fournissant à la place des militants communistes.

En revanche il a été jugé et fusillé alors qu'à Alger on n'en avait pas la preuve. (les communistes le soupçonnaient fortement.) Mais ce n'est pas la seule chose qu'on avait à lui reprocher. La collaboration, on l'oublie trop souvent, en l'absence de traité de paix - que Hitler ne voulait pas signer - c'était juridiquement la collaboration avec l'ennemi.

Je n'ai pas encore vu ce nouvel opus de Gilles ANTONOWICZ, mais pour l'avoir déjà rencontré et pour avoir apprécié son "Isorni", je confirme que nous avons affaire à un excellent auteur. Un rédaction de haute tenue.
JD

plus un plaidoyer (en défense) qu'un livre d'histoire.

Peu justifiable, en particulier, l'absence de toute mention du Vichy tel quel de Dominique Canavaggio, enfin publié par son fils en 2015. L'auteur était un journaliste passé par Normale sup en même temps que Pucheu et le tutoyant, et proche également de Laval. Il porte sur le premier des deux Pierre un regard à la fois bienveillant et sévère : il débordait de confiance en lui... pas toujours à raison !

Je trouve vraiment sympa de commenter un livre sans l'avoir lu. Faudra pourtant que j'évite cette bien mauvaise habitude ...
Mais :

il débordait de confiance en lui... pas toujours à raison !

Est-ce la bonne raison pour conserver ce témoignage comme pièce maîtresse de l'analyse ? Il doit bien y avoir chez Gilles ANTONOWICZ, le connaissant, un certain nombre de référence archivistiques à l'appui de sa démonstration (?) [je m'engage peut-être un peu sur ce coup là ...]
JD

[frontovik 14]

Isorni et Pucheu... Ça sent le plaidoyer pro Petainisterie à plein nez, non??? Mais attendons les commentaires de ceux qui ont lu l'ouvrage...

Tu n'as pas lu, Fronto, son Isorni. Sais tu ce qui concerne la période 1940-1944 dans cet ouvrage ? Tu serais surpris d'apprendre qu'Isorni, une fois encore, était du côté de la Défense.


Pour en revenir à Pucheu, j'aurais tendance à préférer les archives aux racontars tardifs et remaniés d'un journaliste. Vraiment une pièce maîtresse ? À vérifier.

JD

Pour en revenir à Pucheu, j'aurais tendance à préférer les archives aux racontars tardifs et remaniés d'un journaliste. Vraiment une pièce maîtresse ? À vérifier.

cela se complète sans s'opposer : aucune archive ne remplace des confidences confiantes à un vieux copain de Louis-le-Grand et de la rue d'Ulm. Connaissez-vous le livre de Canavaggio ? C'est un apport essentiel, rédigé aussitôt après la guerre. Paru deux ans avant celui d'Antonowicz. Il est vraiment très fâcheux qu'il n'y soit pas cité une seule fois.

C'est un apport essentiel, rédigé aussitôt après la guerre.

Hum, encore un achat perso en perspective, en plus du "Pucheu" !
François est vraiment un excellent VRP de la librairie d'occasion.

Cette fois je place la barre encore plus haut : je vais commenter les raisons qui firent que l'auteur n'a pas cité un livre que je n'ai pas lu pour écrire un ouvrage pas encore acquis .... Connaissant le travail de Gilles, je suppose qu'il privilégie l'étude des sources archivistiques, mais ce n'est bien entendu pas une raison pour boycotter les témoignages. Et pour les deux, seule la rigueur de l'analyse conditionne le bon ouvrage.
Fidèle aux nouvelles orientations de la com vers les post-vérités toute pétries de croyances et d'émotions, j'ajoute que je ne crois pas un seul instant à un plaidoyer hémiplégique en faveur de Pucheu. L'auteur est beaucoup trop nuancé pour présenter d'autres résultats que ceux de ses investigations à charge comme à décharge. Il faudrait donc replacer les impressions de CANAVAGGIO au fil de la démonstration et les analyser pas à pas ...
JD

je ne crois pas un seul instant à un plaidoyer hémiplégique en faveur de Pucheu. L'auteur est beaucoup trop nuancé

Puisque aucun avocat ne fréquente à ma connaissance le forum, à l'exception d'un Nicolas Bernard qui a sans doute d'autres centres d'intérêt, je me permets de protester au nom de cette corporation : les bonnes plaidoiries en défense sont loin d'être hémiplégiques. Elles cultivent la nuance, font une place aux éléments à charge et s'efforcent de faire pencher la balance en faveur des éléments à décharge, fût-ce d'une courte tête.

C'est ce que fait GA en faveur de PP : non pas de l'histoire, en recherchant ce qui s'est passé et dans quelle logique cela s'inscrivait, mais du nettoyage d'image, à partir des préjugés qui ont cours sur un mal-aimé.

C'est ainsi qu'il loupe à mon avis l'essentiel. Lors de son passage au ministère de l'Intérieur vichyssois (juillet 41-avril 42), Pucheu se montre PATRIOTE, en fonction de la conjoncture et de la façon dont il l'analyse. L'Allemagne attaque à l'est, ya bon ça, il faut lui montrer qu'elle n'a rien à craindre de la France sur ses arrières, qu'elle pourrait y alléger son dispositif et même l'évacuer sans inconvénient aucun.

C'est là, à mon avis, la raison majeure de la focalisation de la répression sur le parti communiste, et non le fait que le ministre soit un industriel à qui les grèves de 1936 restent en travers du gosier.